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L'avenir masqué

RCF,  - Modifié le 6 octobre 2020
Nos sociétés se sont construites avec un attachement viscéral à la liberté individuelle, au projet. Et voilà qu’un bout de tissu nous renvoie tout autre chose : nous sommes vulnérables...
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L’avenir masqué

Depuis déjà quelques semaines et sans doute encore pour quelques mois, ou plus, il nous faut avancer masqués.

S’il est des régions du monde où la récurrence des pandémies rend la population très réactive, telle n’était pas notre situation, nous qui avons cette chance de ne pas avoir de grande pandémie meurtrière depuis la grippe espagnole à la fin de la 1re guerre mondiale et qui fit entre 50 et 100 millions de victimes dans le monde, plus de 400. 000 en France.
Alors oui le masque nous empêche de voir une grande partie du visage, nous cache le sourire et des expressions pourtant essentielles à notre perception. Le neurologue Laurent Cohen, qui exerce à l’hôpital de la Salpêtrière et à l’Institut du cerveau rappelle que la reconnaissance du visage mobilise des zones cérébrales aux fonctions bien précises. « L’une d’elles s’occupe d’identifier un visage, une autre y détecte le moindre changement, une autre encore les émotions, tandis qu’une dernière se consacre à la lecture sur les lèvres. »

Oui tout cela est vrai et chacun l’expérimente dans la rue et les transports, à l’école ou au travail, lors des visites des nôtres à l’hôpital ou en EHPAD. Et c’est parfois déchirant.
Mais peut-être pouvons-nous aussi prendre le masque comme une opportunité. Un rappel douloureusement indispensable. Nos sociétés se sont construites avec un attachement viscéral - et heureux au regard du reste du monde !- à la liberté individuelle, au projet.

Et voilà qu’un bout de tissu nous renvoie tout autre chose : nous sommes vulnérables. Or la vulnérabilité c’est la passivité, le signe visible que nous pouvons ni savons tout maîtriser. Il nous oblige à nous rappeler cent fois par jour, autant que de croisements et de rencontres, que nous sommes des êtres de relation. Nous ne sommes jamais seuls au monde, y compris quand « gagnants et premiers de cordée », nous avons cru que nous devions cette réussite à nous seuls.
Le masque devient alors un lieu éthique : ce qui fait lien, pont, entre ma vulnérabilité et ma responsabilité. Éviter de faire le mal à autrui, acte civique élémentaire. « Le masque est un effort minimal qui ne nous fait pas renoncer à notre liberté, mais nous permet de prendre conscience de notre appartenance à un destin collectif », écrivait la philosophe Corine Pelluchon dans l’Hebdo Le 1 il y a quelques semaines.

Paradoxalement, le masque convoque à la responsabilité pour le visage de l’autre homme, selon la définition donnée au visage par Emmanuel Lévinas, puisqu’il m’engage à la responsabilité pour autrui autant que pour moi-même, dans notre commune fragilité.

Véronique Margron op

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