Le déconfinement est prévu pour le 11 mai : y aura-t-il alors suffisamment de personnes immunisées dans la population française pour stopper la propagation du virus ? L'immunité collective permettra-t-elle d'éviter une deuxième vague de contamination ? On en saura plus dans les prochains mois. En attendant, les tests sur les anticorps et autres essais cliniques sont encore incertains mais encourageants.
"L'immunité collective est le reflet des personnes qui ont déjà été infectées par le virus et qui, de fait, ne devraient pas être réinfectées, explique le Pr Bruno Lina, professeur de virologie au CHU de Lyon, ces personnes-là vont participer à la défense collective en bloquant la transmission."
Quand le virus est apparu nous étions tous "immunologiquement naïfs", c'est-à-dire sans défenses immunitaires, et donc en capacité de le transmettre facilement. Mais "une fois qu'on est infecté, on développe une réponse immunitaire : et ce que l'on pense aujourd'hui, c'est que cette réponse nous empêche d'être de nouveau infectés".
"Plus il y a de personnes immunisées dans la population, moins ce virus aura de faciliter à diffuser." Pour bloquer la transmission, faudrait que 65 à 70 % de la population soit immunisée : or, les enquêtes réalisées jusqu’à présent montrent que seulement 6 à 7 % de la population française est immunisée. Mais les disparités régionales sont importantes, cela va de 15 à 16% dans les régions les plus touchées à moins de 3 % dans les zones où le virus n’a pas circulé.
Pourquoi ce taux de personnes immunisées est-il si bas ? "On n'a pas eu suffisamment d'infections, selon le Pr Bruno Lina, même si le ressenti est qu'il y a eu beaucoup de cas, il n'y en a pas eu suffisamment pour que l'immunité de groupe soit suffisamment importante." En déconfinant progressivement la population, la France va augmenter son immunité collective.
Qui dit immunité dit anticorps et il reste encore des zones d’ombre. Dans le Grand Est, l’une des régions les plus touchées, le CHU de Strasbourg a lancé une phase de dépistage du personnel soignant. 1.800 personnes seront dépistées grâce à des tests sérologiques. Ces tests vont permettre de déterminer qui a été en contact avec le virus, mais ils ne permettront pas de dire dans quelle mesure les anticorps détectés sont immunisants.
"On ne sait pas si ces tests détectent bien des anticorps protecteurs, précise le Pr Jean Sibilia, doyen de la faculté de médecine de Strasbourg, et on en sait pas si l'immunité anticorps est réellement protectrice." Des tests réalisés très récemment sur des primates se sont révélés encourageants - reste à le démontrer chez l'homme. "On répondra vraiment à la question dans trois mois, dans six mois... En particulier s'il y avait malheureusement une nouvelle vague."
Coviplasm est un essai clinique promu par l'AP-HP avec le soutien de l'Inserm et de l'Établissement français du sang (EFS). Il consiste à prélever du plasma chez des patients guéris dans le but de transférer leurs anticorps chez des patients malades et leur permettre de développer eux-mêmes leur propre immunité - et peut-être devenir à leur tour des "donneurs de plasma" et entrer "dans cette chaîne de solidarité", souligne le Dr Pascal Morel, de l’EFS. Démarré début avril, cet essai clinique semble prometteur, on en saura plus au moment du déconfinement.
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