Auvergne-Rhône-Alpes : la montagne face au dérèglement climatique
RCF poursuit sa semaine spéciale "La voix des régions" à l'occasion de l'élection présidentielle en région Auvergne Rhône Alpes. Une région où, comme son nom l'indique, la montagne est particulièrement présente. Un élément naturel menacé aujourd'hui par le dérèglement climatique.
L’or blanc risque de se faire rare au rythme ou la planète se réchauffe. C’est tout un secteur qui va devoir s’adapter. La montagne en hiver, c’est pourtant près 100.000 postes de saisonniers en région Auvergne Rhône Alpes. Evidemment, ce sont les stations de moyenne altitude qui sont les plus menacées. Illustration dans le massif de la Chartreuse. Un massif où l’on trouve plusieurs petites stations mais aussi un lieu de recherche situé au col de Porte à 1.326 mètres. Il s'agit d'un laboratoire de Météo France et du CNRS qui mesure et étudie la neige depuis 1959.
Une station d'étude de la neige en massif de Chartreuse
"On est sur le site mythique du col de Porte. Avec une zone délimitée dans laquelle nous avons des instruments, ceux de Météo France mais aussi des instruments d'autres laboratoires qui sont testés. Toutes les semaines, un sondage est effectué pour mesurer la verticalité de la neige" explique Carlo Carmagnola, chercheur au centre d’étude de la neige de Grenoble.
On y mesure l’épaisseur de neige, on analyse sa texture, sa température ou encore son humidité. Il y a des dizaines d'appareils automatiques mais il faut aussi l’huile de coude. "L'idée, c'est de pouvoir modéliser la neige des Alpes, mais aussi ce qu'il se passe au Groenland ou en Antarctique, qui sont des neiges différentes de celles que l'on voit dans les Alpes françaises ou dans les Pyrénées" ajoute Mathieu, ingénieur de recherche. Un travail qui permet donc de comprendre la nature de la neige et d’accumuler des données depuis maintenant plus de 60 ans.
Climat : différents scénarios à l'étude
Ce laboratoire permet également de regarder dans le rétroviseur. "On a comparé 1960 et 1990, et 1990 et 2020. On a constaté une baisse de l'enneigement sur le col de Porte d'un peu moins de 40 centimètres. C'est assez significatif avec une augmentation de la température d'un degré. C'est quand même beaucoup. Perdre 40 centimètres sur les dernières décennies, c'est très significatif" précise Carlo Carmagnola.
En 30 ans, on a perdu un peu plus d’un mois d'enneigement sur la saison. Tout cela pourrait encore s’accentuer selon les différents scénarios de réchauffement envisagés du plus optimiste au plus pessimiste. "On a fait des études de projection climatique avec les modèles les plus récents appliqués au manteau neigeux. Dans le premier cas, le plus optimiste, on voit qu'il y a une baisse de l'enneigement et cela s'atténue dans le temps. Alors que, à la même période, avec le scénario le plus pessimiste, on se retrouve avec moins de dix centimètres de neige" lance Carlo Carmagnola.
Comment les stations tentent de se réinventer
Quoi qu'il arrive, la neige va se raréfier à cette altitude. Ce qui menace les activités des stations en particulier le ski. A quelques kilomètres de là, la station de Saint Hugues les Egaux est en première ligne. Aujourd'hui, sur place, la saison est finie. La neige est encore là, mais pas la rentabilité. Les Egaux, c’est une station de quatre pistes avec une dizaine de saisonniers. Elle a bien failli disparaître il y a 10 ans mais elle a été reprise par une association fondée par Guy Becle-Berland.
"La particularité, c'est qu'il y a toutes les forces. On est débutant. On n'a jamais mis une paire de ski aux pieds. Et quand on descend des Egaux, on arrive à Val Thorens. C'est une station école. On est content d'avoir repris cette station en association il y a dix ans. C'est une grande victoire sur tout. Pas sur la nature, car elle est très sympa, elle nous avertit qu'il n'y aura bientôt plus de neige, mais cela nous laisse le temps de nous retourner" explique-t-il sur RCF.
Malgré un bon enneigement et une bonne saison cette année, les Egaux s'interroge sur son avenir. Il va falloir se réinventer, explique Jean-Marc Calandre, président de l'association. "La station est menacée. Personne n'est capable d'avoir de la visibilité sur plus de cinq ans pour des stations de moyenne montagne. On sait qu'on va avoir des saisons courtes. On se demande sur ce qu'on va pouvoir proposer aux gens. On a un partenariat avec des chiens de traineaux. On a déjà eu des saisons avec 15-20 jours d'ouverture minimum" précise-t-il.
Et contrairement aux grandes stations à plus haute altitude difficile d’envisager une activité quatre saisons, car au sein de l’association il y a beaucoup de bénévoles. Et pour les saisonniers et la plupart ont une autre activités en dehors de l’hiver.
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