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RCF Jérôme de Stridon : La Vulgate

Jérôme de Stridon : La Vulgate

Un article rédigé par Jean Charmois - Dialogue RCF (Aix-Marseille),  -  Modifié le 10 novembre 2021
À l'écoute des Pères Jérôme de Stridon (2ème partie)

Nous allons écouter aujourd’hui un Père latin qui a marqué tout l’Occident par son intelligence et ses recherches sur l’Ecriture, mais un Père parfois rebutant par son caractère fougueux, irascible, excessivement sensible, capable d’encenser ses amis avant de se brouiller avec eux. 

(Pixabay) (Pixabay)

La Vulgate

Jérôme de Stridon, avec l’appui du pape Damase de Rome, s’est lancé dans une entreprise gigantesque de traduction de la Bible en latin.

Compte tenu de ses études des manuscrits, il décide, sans que personne ne le lui dicte, de ne se référer qu’à la version hébraïque de la Bible : « la vérité hébraïque » dira-t-il.

Jérôme traduit le livre des Psaumes trois fois : une fois en révisant une ancienne version latine, une fois depuis le grec et une autre depuis l'hébreu. 

Aux traductions de Jérôme s'ajoutent par la suite, indépendamment de Jérôme, certaines versions latines anciennes de livres bibliques qu'il n'a pas traduits, pour former ce qui est appelé la Vulgate.

La Vulgate ainsi formée ne sera vraiment reçue comme texte de référence en Occident que progressivement ; elle est modifiée par les clercs de Charlemagne, puis par Erasme, avant d’être le premier texte imprimé par Gutenberg, puis canonisé par le concile de Trente et le pape Clément VII en 1592. 

 

La Septante 

La Septante ou Bible des 70 anciens est la version grecque de la Bible du judaïsme hellénistique. Ce texte a donné lieu à un récit de la fin du IIème siècle avant JC qui est mis en avant par les juifs de l’époque pour confirmer la vénération, voire l’inspiration, de cette traduction. Il s’agit de la lettre d’Aristée à Philocrate.

Aux termes de la lettre, Démétrios de Phalère propose au roi d'Égypte Ptolémée II Philadelphe de faire traduire les textes religieux juifs. Il suggère de s'adresser au grand prêtre juif, Éléazar II, et de lui demander six hommes par tribu, afin de réaliser la traduction. Ptolémée accepte. 

Eléazar sélectionne 72 habitants de Jérusalem « maîtres dans les lettres judaïques, mais aussi adonnés à la culture hellénique ». Ceux-ci voyagent jusqu'à Alexandrie où le roi les reçoit. S'ensuit un banquet qui dure sept jours, au cours duquel le roi interroge chacun des 72 traducteurs.

Enfin, les traducteurs se retirent dans l'îlot de Pharos où ils travaillent durant 72 jours. Il est convenu que le texte ne devra pas être modifié, Démétrios s'exclamant même que la traduction « vient de Dieu ».

La Septante devient un texte de référence pour toutes les synagogues du bassin méditerranéen, puis les premières communautés chrétiennes. 

Après la chute  du Temple et l’essor du christianisme, la Septante est de moins en moins utilisée par les juifs rabbiniques, et plusieurs traductions alternatives en grec sont faites pour la remplacer.

 

La Vetus latina (Vieille latine)

Plusieurs traductions en latin très anciennes, attestées notamment par Tertullien, Cyprien, Hilaire et Augustin. Ce sont des traductions de la Septante, dans certains cas de véritables décalques mot à mot du grec, parfois difficiles à comprendre même en latin. Tel est un des arguments qu’utilise Jérôme pour justifier sa nouvelle traduction.

Mais la traduction de Jérôme est largement rejetée par ses contemporains. Sa façon de recourir au texte hébreu pour établir le texte de la Bible chrétienne est ainsi désapprouvée. Cette version suscite également la méfiance et la suspicion des prêtres romains contemporains de Jérôme, qui voient là une dangereuse falsification des Écritures par un étranger. 

 

Texte massorétique

Le texte massorétique est le texte biblique hébreu produit par les érudits juifs de l'Antiquité et du haut Moyen  ge appelés massorètes. On estime que le texte massorétique a été fixé vers le IIème ou IIIème siècle en Palestine, sur la base d’un texte proto-massorétique qui serait celui dont Jérôme a disposé pour la Vulgate.

 

Vérité hébraïque vraiment ?

En général, les auteurs du Nouveau Testament citent l’Ancien Testament d’après le texte de la Septante (LXX).

Curieusement Jérôme a corrigé la version hébraïque, et donne en latin la version de la Septante ! Sur la base d’une version hébraïque non massorétique ? La question récurrente des chercheurs actuels est celle de savoir quelle était la connaissance réelle de l’hébreu de Jérôme.  

Aujourd’hui, la position des églises chrétiennes est la suivante, au sujet du texte de base pour l’Ancien Testament :

  • Les protestants se sont ralliés très tôt au texte hébreu massorétique, mais avec des aménagements pour suivre la Vulgate ou la Septante
  • Les catholiques ont abandonné la Vulgate et se sont ralliés au texte massorétique mais avec des aménagements pour suivre la Vulgate ou la Septante
  • Les orthodoxes ont conservé intégralement la Septante.

En ce qui concerne le Nouveau Testament, les églises sont globalement sur le même texte grec, avec toutefois quelques variantes, qui sont souvent dues aux scientifiques. 

 

Le canon des Ecritures

La composition du canon des Ecritures, pour ce qui est de l’Ancien Testament est également variable :

  • Les protestants ne retiennent comme canonique que les livres de la Bible hébraïque. Les autres livres de la Vulgate, qui dépendent d’un original grec et non hébreu, relèvent d’une canonicité secondaire. Luther les a placés à la fin de la Bible en y ajoutant même la Prière de Manassé.
  • Les catholiques admettent les deutérocanoniques comme livres canoniques, suivant en cela la Tradition des Pères, dont Jérôme (Vulgate comme Septante)
  • Les orthodoxes, suivant certaines versions de la Septante, ajoutent six livres, qu’on trouve dans les manuscrits grecs les plus anciens, et qui ont été commentés par les Pères. Ces livres sont considérés comme apocryphes par les catholiques et protestants.
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À l'écoute des Pères sur Dialogue RCF
Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
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