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Augustin d'Hippone : Aimes et fais ce que tu veux

Augustin d'Hippone : Aimes et fais ce que tu veux

Un article rédigé par Jean Charmois - Dialogue RCF (Aix-Marseille),  -  Modifié le 8 novembre 2021
À l'écoute des Pères Saint Augustin d'Hippone, l'apôtre de l'amour (2ème partie)

Au-delà des controverses que sa philosophie à générées, il y a un autre Augustin, commentateur profond de l’Ecriture et pasteur spirituel, qui nous a  laissé des homélies, traités et correspondance extrêmement brûlants de foi et de désir de Dieu, et qui font d’Augustin un chantre incomparable de l’amour de Dieu et de l’amour pour Dieu.
Pour Augustin, l’amour est l'unique objet de l'Écriture sainte.

(Pixabay) (Pixabay)

L’amour est le bien recherché par tous

L'amour (sous le nom de la charité – caritas) est au centre de l’œuvre d'Augustin. Il désigne ce qui met l'âme en mouvement, ce qui lui donne force et vie. Les corps ont leur poids, l’âme a son amour :
« Mon poids à moi, c'est mon amour » (Confessions,13, 9).
La racine de la volonté humaine est le désir de la béatitude. Ce désir de bonheur est infini: aucun bien particulier, fini, ne peut l’épuiser. L’âme recherche dans le monde ce qu’elle n’y trouvera jamais.
Seul un bien infini, parfait, qui soit l’Amour lui-même, peut nous donner le repos. Ce bien, c’est Dieu.
Tous, nous désirons Dieu, mais nous l’ignorons souvent. Celui qui déclare détester Dieu l’aime quand même, car son opposition à Dieu ne peut pas effacer qu’il désire pour lui le bonheur maximum, qui est le nom de Dieu.

 

L’amour s’exprime dans la charité fraternelle

L’amour/charité s'exprime dans le commandement du Christ: « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés » (Jean, 13, 34) et, bien sûr, dans l'Incarnation. Si Dieu est amour, pécher contre la charité fraternelle, c’est pécher contre Dieu. Vivre de l’amour fraternel, c’est connaître Dieu et demeurer en lui. L’amour du frère implique donc l’amour de Dieu.
L’amour fraternel est une triade : en aimant son frère, on aime l’amour, qui est Dieu lui-même. En aimant Dieu on aime l’amour que Dieu porte à son frère.

 

La subversion de l’amour

Il y a quatre directions de l’amour : Dieu, moi, mon prochain et les corps mais attention à la subversion de l’amour: le véritable amour de soi consiste à aimer Dieu, ce soi plus intime que soi, qui est le Bien suprême et non un bien parmi d'autres. L'amour de soi devient source d'iniquité quand il est cultivé pour lui-même.
Le subversion s’installe quand on use de ce dont on devrait jouir, et quand on jouit de ce dont on devrait seulement user ; traiter les moyens comme des fins, et les fins comme des moyens. Exemple : l’amour de l’argent, au lieu d’en user uniquement pour la charité. Autre exemple : le tartuffe qui utilise le nom de Dieu à son profit au lieu de ne jouir de la Divinité que comme de la fin suprême de son désir.

 

L’Esprit saint est le don de l’amour

L’Esprit Saint est notre Maître intérieur. Le fait d’interroger notre conscience prouve que l’Esprit est présent en nous. C’est aussi lui qui suscite notre recherche de conscience. En interrogeant son cœur, l’homme peut voir quelle est l’intention qui l’anime à faire les bonnes œuvres.

 

La charité est le couronnement de la foi

La charité fraternelle est un commandement « ancien et nouveau » à observer (2, 3-11); elle est aussi une imitation du Christ qui « a donné sa vie pour ses frères » (3, 11-24); enfin, elle est ramenée à sa source, le Dieu-Amour (4, 7-21).
Foi et amour s'impliquent mutuellement : l'amour vient de Dieu et est reçu dans la foi (4, 16); la foi est source de l'amour (5, 1 3). la charité fraternelle découle de la foi en Jésus-Christ (3, 16 et 23).
La vie chrétienne est d'être en communion avec Dieu. Celle-ci n'est possible que par la foi en la révélation qu'apporte Jésus-Christ. Comme celle-ci est révélation de l'amour divin, cette foi s'exprime, si elle est authentique, dans l’amour mutuel entre les frères. L'unique péché, c'est le refus de la révélation du Christ, l'incroyance, car, sans la foi en la révélation divine, l'amour fraternel est impossible.

 

Aime et fais ce que tu veux

« Il ne faut pas considérer ce que fait un homme, mais l’esprit, l’intention dans lesquels il agit […] Telle est la force de la charité ! [...]  Soyez attentifs : les actions humaines ne se distinguent les unes des autres qu’en les rapportant à la racine de la charité. Car on peut accomplir beaucoup d’actions qui ont bonne apparence, tout en ne provenant pas de la racine de la charité. Les épines ont des fleurs elles aussi. [...] Voilà une fois pour toutes le court précepte qu’on te dicte : «Aime et fais ce que tu veux ! » Si tu te tais, tu te tais par amour [...] De cette racine rien ne peut sortir que de bon ». (Homélies sur la première épître de saint Jean VII, 7-8)
Dans le contexte de la théologie de saint Augustin, le sens de ce précepte est : « Si tu aimes vraiment comme Dieu aime, alors fais ce que tu veux, car tu ne pourras vouloir que le bien. Celui des autres et le tien. »
On a souvent entendu ce texte dans un sens laxiste, comme si les parfaits étaient libérés de toute loi. La pensée d'Augustin est différente : toute la loi est accomplie dans la charité ? Celui qui aime vraiment en Dieu est affranchi de l’indécision du libre-arbitre, il accomplit par la grâce tous les commandements dans une pleine liberté. 

 

La prière

Augustin dit inlassablement comment le Dieu transcendant ne cesse de chercher l’homme, et comment celui-ci, avec sa fragilité et ses incohérences, répond à cet appel. Nous n’existons que parce que nous avons été aimés. Et parce que Dieu nous a aimés, nous sommes à notre tour capables aimer.
Prier avec saint Augustin, c’est entrer progressivement dans le mystère trinitaire, dans un double mouvement d’intériorisation et d’ouverture, d’accueil et de don, de silence et de rencontre. L’amour est Dieu : celui qui aime sans plus s’appartenir demeure à jamais avec Dieu.
Le désir de Dieu est par lui-même une prière et il est la condition de la prière :
« Dieu n’a pas besoin que nous lui fassions connaître notre volonté car il ne peut l’ignorer, mais il veut par la prière exciter et enflammer nos désirs, pour nous rendre capables de recevoir ce qu’il nous prépare. [...] ». (Lettre 130 à Proba)
 

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À l'écoute des Pères sur Dialogue RCF
Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
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