Y a-t-il vraiment une "médiation" entre l'enseignant et l'élève à l'école ?, par Joseph Thouvenel
LA CHRONIQUE DE JOSEPH THOUVENEL - "La médiation du maître entre les savoirs et l’élève". Je n’aurais pas prêté plus d’attention que cela à cette étrange phraséologie, si celle-ci n’émanait d’un ancien directeur adjoint de Cabinet au Ministère de l’Éducation Nationale. Cet homme doit savoir de quoi il cause me suis-je dit in petto.
Joseph Thouvenel ©RCFToujours impressionné par les gaziers qui se sont coltinés des études supérieures, je fonçais illico sur mon dico pour réviser la définition de "médiation". Robert le petit, répondit à mes sollicitations avec sa précision habituelle.
"Médiation : nom féminin du bas latin médiatio, entremise destinée à mettre d’accord, à concilier ou à réconcilier des personnes, des parties".
Professeur, un intermédiaire pour l'élève ?
Me revint à l’esprit l’image de Monsieur Mater, dans sa blouse grise, dévisageant du haut de son estrade la quarantaine de potaches dont il avait la charge. J’eus le plus grand mal à le voir comme un entremetteur, dont l’objectif serait de mettre d’accord les tables de multiplication et la classe. Pour cet homme dévoué, équipé d’un aide pédagogique appelé règle, les tables on les savait ou on ne les savait pas, point final ! Nul soupçon de conciliation ou d’arbitrage entre le savoir exigé et les desiderata des élèves.
Fausse route, me dis-je, il doit s’agir d’une autre acceptation du mot "médiation". Vraisemblablement pas la pause au milieu d’un verset de plain-chant, terme technique de musique, mais plutôt la forme didactique : "le fait de servir d’intermédiaire". La lumière jaillit, tout s’éclaira ! Intermédiaire, du latin intermedius : "qui est au milieu, moyen". Bon Dieu, mais c’est bien sûr !
Finies les vieilles lunes du maître possédant un savoir qu’il transmet à des élèves plus ou moins attentifs. Il est venu le temps de la médiation.
Une démarche qui ne répond pas aux besoins scolaires
Entre l’antédiluvienne table de multiplication, poussiéreuse et réactionnaire, où deux fois deux font quatre, et le collégien créatif pour qui deux fois deux sont plus sympathiques s’ils flirtent poétiquement avec huit, car huit c’est tellement chouette et quatre carrément rébarbatif. Le médiateur intervient, habile entremetteur, communicant hors pair, sachant concilier la bête logique arithmétique et l’allégorique imagination du Petit Prince de banlieue. C’est ainsi que deux fois deux feront environ six ou cinq et demi, voire six trois quarts, en fonction du talent du maître médiateur.
Après que furent banni de nos classes, corbeaux, renards et laboureurs, de brillants esprits introduisent le romanesque au sein de l’arithmétique. Charmante démarche, qui je le crains, ne répond pas vraiment aux besoins des élèves.


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