Richard Leroy, le vigneron devenu personnage de bande dessinée
Connu pour la qualité de ses vins bio, le vigneron Richard Leroy est aussi un célèbre personnage de bande dessinée. Dans "Les ignorants", il transmet son savoir à un dessinateur, et inversement. 10 ans après sa parution, les éditions Futuropolis publient une édition spéciale. L’occasion de rencontrer cet ancien banquier qui a fait de sa passion pour la viticulture un métier. Installé à Rablay-sur-Layon, non loin d’Angers, il produit des coteaux-du-layon à sa façon. En bio, sans pesticide ni herbicide, animé par une vision du métier où il est plus question d’émotion que de rentabilité.
"Il faut qu’un sol soit vivant"
Véritable succès de librairie, la bande dessinée "Les ignorants" ressort cette année en édition spéciale. C’est le récit d’une initiation croisée entre deux "ignorants" du métier de l'autre, deux passionnés surtout et d’insatiables curieux. L'idée est venue du dessinateur Étienne Davodeau, qui "a cette capacité de mettre les véritables choses de la vie en dessin". Pour le vigneron, c'était une occasion inouïe de partager et de communiquer sur son métier. "Connaissant Étienne, j’avais une totale confiance !"
Pour connaître le travail et la vie de Richard Leroy, il faut d’abord marcher dans ses vignes de Montbenault. Il est de ceux pour qui le vin est une passion mais pas seulement : "Le vin c’est l’objet final, difficile de le présenter à une personne qui le boit sans lui faire comprendre qu’elle est en train de boire et goûter un lieu, une couleur, une colline, un ensoleillement… c’est tout un ensemble."
En premier lieu, c'est le sol qu'il faut fouler - "Il faut qu'il soit vivant", dit le vigneron. Sur le domaine de Richard Leroy, le sol est très meuble. La souplesse du sol est liée à la façon dont on le travail, explique-t-il, et le sien ne contient ni herbicide ni insecticide. "Un sol qui vit se renouvelle, prend plus de couleurs, ça crée naturellement une couche de terre qui n’est pas durcie ni tassée." Le temps qu’il passe à travailler ses vignes à la main, en complément du tracteur, est "proportionnel" à sa passion et à ce qu’il cherche à produire. "Finir une journée de travail et avoir l’impression de faire une juste tache c’est emballant, ça me plaît."
Richard Leroy et Étienne Davodeau ©éditions Futuropolis
Un Parisien devenu vigneron
Depuis 25 ans qu’il exerce ce métier, Richard Leroy ne se lasse pas du travail pourtant difficile de la vigne. Qu’il considère comme "le fait de vivre un très beau moment sur la terre et de rendre ça à travers un produit, une boisson, qui peut procurer des émotions..." En devenant vigneron, il a fait de sa passion un métier. Avant, Richard Leroy vivait à Paris où il était banquier. Le jour, il était assis à son bureau, devant un écran d’ordinateur. Le soir, il se passionnait pour le vin, il apprenait à déguster. "On développe ses goûts et ses connaissances de la géographie viticole… et puis c’est sans fin."
S’il a grandi dans les Vosges, il lui a fallu attendre ses 18, 19 ans pour entrer en contact avec des vignerons "par hasard". Il a eu "l’impression de rencontrer des personnes qui faisaient un métier", alors que lui suivait "sans passion" des études d’économie. Le sentiment s’est installé ensuite de vivre une vie dénuée de sens alors que d’autres, des vignerons, lui parlaient "de goût", de terroir et de "lien à la terre". À leur contact il n’a pas seulement appris à déguster, il a découvert des "codes" et approché des "mystères". Il s’est laissé fasciné par le monde du vin et de ceux qui le font. "Boire un vin sans connaître les hommes pour moi ça manque de sens. Très vite on vit dans un monde qui a une sincérité." Un jour, un ami vigneron lui a dit : "Mais arrête donc ta vie à Paris, viens donc tenir des vignes !"
Richard Leroy dans ses vignes ©éditions Futuropolis
Fruit de la vigne et du travail des hommes
Richard Leroy l'admet, tout quitter, y compris la sécurité de l’emploi, pour faire vivre sur trois hectares, une appellation qui était tombée en désuétude, "c’était une folie effectivement !" "Mon idée était simple, c’était de pouvoir vivre cette vie et si j’arrivais à avoir un salaire minimum, le pari serait gagné." Parrainé par son ami vigneron Joël Ménard, il a vite appris. "Quand la passion suit vous apprenez vite, ça devient un plaisir." Il tout de même pas mal "d’abnégation", un mot qu'il emploie souvent. Passer des heures à tailler des rangs de vigne, dans le froid et la boue, ça peut être long et rébarbatif. Mais vous pouvez voir les choses autrement, vous dire que vous allez donner "une architecture" à chaque pied, que chacun est différent de l’autre. "Si on vit cette chose-là, on prend alors du plaisir. Oui il arrive que, quelques fois, on peut parler à ses pieds de vigne…"
Certains ne se passionnent que pour le liquide que l’on tient dans son verre, à tenter de deviner un cépage, une association, un millésime. Chez Richard Leroy, il y a un lien étroit entre le vin et le travail des hommes. Pour lui, il faut connaître le vigneron, l’espace dans lequel il travaille, pour comprendre son vin. Le sol, que recouvrent les herbes après les vendanges, foulé par les vignerons qui travaillent et modèlent un territoire, en lien avec tous les êtres vivants le peuplent : c’est un peu de tout cela qu’il faut mettre dans le mot "émotion" quand Richard Leroy le prononce. "La majorité des vins sont des vins technologiques, de grand volumes : si j’étais extrémiste, je dirais qu’ils ne méritent pas d’être bus ! Après, il y a des vins d’émotions, ce n’est pas du tout pareil !"
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- 10 août 2020
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