Agatha Christie au cinéma, c’est tout un roman. L’œuvre de la plus grande romancière anglaise, disparue il y a déjà plus de 45 ans en 1976, a fait l’objet de nombreuses adaptations depuis Alibi, de Leslie S. Hiscott en 1930. C’est encore le cas avec la sortie, cette semaine, de Mort sur le Nil, de et avec Kenneth Branagh, flanqué de son fidèle compositeur l'Écossais Patrick Doyle. Un événement qui intervient cinq ans après le remake du Crime de l’Orient Express.
Retour sur une œuvre au charme délicieusement suranné qui, au cinéma, a été accompagnée par quelques grands noms tels que Nino Rota ou encore Cole Porter.
Dans Mort sur le Nil, Kenneth Branagh endosse le costume d’Hercule Poirot, le héros belge inventé par Agatha Christie en 1920. La sortie est sans conteste, le film de ce début d’année 2022, plusieurs fois repoussé en raison de la crise sanitaire dont la bande annonce en français comporte Policy of truth, titre de 1990 du groupe anglais Dépêche Mode, réarrangé pour l’occasion. On doit la musique originale par ailleurs à l’inamovible Patrick Doyle, fidèle compositeur des films de Kenneth Branagh depuis le tout premier Henry V en 1989.
Il y a 43 ans, une première version de Mort sur le Nil, l’une des œuvres les plus célèbres de la reine du polar, sortait sur les écrans et c’est Nino Rota qui en signait la partition. Dans le film du Britannique John Guillermin en 1978, Peter Ustinov partage la vedette avec une pléthore d’acteurs et actrices de premier plan au rang desquels David Niven, Mia Farrow, Bette Davis, Maggie Smith ou encore Jane Birkin. Une superproduction tournée en Egypte dans les décors naturels somptueux d’Abu Simbel et Karnak qui reste, à ce jour, un grand succès. Agatha Christie, décédée deux ans auparavant, n’aura pas vu le film, elle qui s’estimait très déçue des adaptations de ses oeuvres au cinéma jusque-là avait en revanche succomber à l’adaptation du Crime de l’Orient Express par Sidney Lumet en 1974, le film de tous les superlatifs.
Alibi est le tout premier film à adapter un roman d’Agatha Christie en l’occurrence Le Meurtre de Roger Ackroyd (publié en 1926). Le premier, aussi, d’une série de trois films tournés par l’Anglais Leslie S. Hiscott aux début des années 1930 dans lesquels Austin Trevor apparaît dans le rôle d'Hercule Poirot. Après Alibi, il jouera dans Black Coffee (Le Coffret de laque) la même année, puis dans Lord Edgware Dies en 1934. Austin Trevor aurait été choisi par les producteurs uniquement pour sa capacité de parler anglais avec un fort accent français. John Greenwood compose la musique.
Overture and kidnapping est un des morceaux de la bande originale du Crime de l’Orient Express dans sa version de 1974 que l’on doit à Sidney Lumet. Le cinéaste américain confiait la partition musicale au grand compositeur et arrangeur anglais Richard Rodney Bennett qui sera nommé l’année suivante aux Oscars dans la catégorie meilleure musique de film. Le morceau est ici interprété par le Royal Opera House Orchestra, dirigé par Marcus Dods. Encore un mot sur le film, aux six nominations aux Oscars, qui réunit, outre, Albert Finney dans le rôle de Poirot, un casting incroyable pour l’époque, jugez plutôt : Ingrid Bergman, Lauren Bacall, Sean Connery, Jacqueline Bisset, Vanessa Redgrave, Anthony Perkins ou encore Richard Widmark auquel on peut rajouter le Français Jean-Pierre Cassel.
Le titre The Wailing wall est composé par Patrick Doyle. L’ambiance y est toute orientale et suggère l’effervescence d’un bazar stambouliote, recréé, ici, par le psaltérion, un instrument de musique à cordes ancien, le ney ou flûte persane, des percussions exotiques, et le duduk, le hautbois arménien. Le morceau figurait en 2017 sur la BO du Crime de l’Orient Express, version Kenneth Branagh, première incursion avant Mort sur le Nil du réalisateur et acteur anglais qui reprend par ailleurs, après Albert Finney et Peter Ustinov avant lui, le rôle d’Hercule Poirot, le fin limier belge et personnage récurrent des romans d’Agatha Christie. Un héros ou plutôt un antihéros célèbre pour ses moustaches en forme de guidon de vélo et son sens infaillible pour résoudre les enquêtes les plus complexes. L’Écossais Patrick Doyle est considéré en Grande-Bretagne comme l’un des plus grands compositeurs actuels et a aussi travaillé à plusieurs reprises pour le cinéma français et plus particulièrement pour Régis Wargnier, notamment sur Indochine.
On doit le thème principal du film Le Miroir se brisa au réalisateur britannique Guy Hamilton en 1980. Cette fois-ci, l’histoire met en scène Miss Marple, enquêtrice et fine psychologue que joue Angela Lansbury qui se révèlera par la suite pour son rôle dans la série Arabesque. Célèbre pour ses collaborations avec Donovan ou encore le groupe Hot Chocolate, John Cameron signe la musique du film réalisé ni plus ni moins par Guy Hamilton, resté célèbre pour avoir dirigé quatre épisodes de la saga James Bond entre 1964 et 1974 dont Goldfinger et Les Diamant sont éternels.
On retrouve Guy Hamilton deux ans plus tard, en 1982, pour une seconde adaptation d’Agatha Christie, Meurtre au soleil avec une nouvelle fois Peter Ustinov mais aussi Jane Birkin et Maggie Smith. On doit ici le morceau Gardeners suite à Cole Porter dont la musique parsème tout au long des images le film. C’est le compositeur John Lanchbery qui en signe les arrangements et dirige les musiciens pour les nombreux morceaux de la BO où l’on peut entendre aussi un extrait joué au piano d’Anything goes, célèbre comédie musicale de 1934 de Cole Porter lorsque Maggie Smith accueille les vacanciers sur son île.
By the pricking of my thumbs signifie en français Mon petit doigt m'a dit. C’est tout simplement le nom de l’œuvre d’Agatha Christie, publiée en 1968 au Royaume Uni et en 1970 en France. Dans cette comédie policière, réalisée par Pascal Thomas en 2005, André Dussolier et Catherine Frot composent un couple de détectives que l’on retrouve en 2008 dans Le crime est notre affaire et en 2012 dans Associés contre le crime, toujours du même Pascal Thomas qui voue une passion de jeunesse pour la romancière anglaise au point d’avoir tourné même un 4e film tiré d’une de ses œuvres, L’Heure Zéro en 2007 avec cette fois-ci François Morel, Danielle Darrieux, Melvil Poupaud, Laura Smet et Chiara Mastroianni. La musique est signée de Reinhardt Wagner comme presque toujours chez Pascal Thomas depuis 1999 et La Dilettante. Quant au morceau By the pricking of my thumbs, il est lui décliné sous différentes formes et à différents moments du film, notamment lors d’une kermesse où une chorale d’enfants chante cet air.
Le compositeur italien Bruno Nicolai compose la musique du film Les Dix Petits Nègres (And then they were none), en 1974. Film que l’on doit à Peter Collinson. Un coproduction européenne haut de gamme avec notamment Oliver Reed, Richard Attenborough, Gert Fröbe mais aussi les Français Stéphane Audran et Charles Aznavour. Au passage le film, tiré de l’œuvre du même nom, demeure, avec plus de cent millions d'exemplaires, le livre le plus vendu d'Agatha Christie, et le roman policier tout confondu le plus vendu de tous les temps.
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