Entre la Bretagne et la France, une histoire croisée
La Bretagne, bout de la terre ou centre du monde maritime ? Ces temps-ci elle est surtout au centre de l'actualité culturelle. Mercredi 20 juin est sorti en salles une adaptation au cinéma des aventures de Bécassine - la plus célèbre des Bretonnes qui suscite une opposition tenace de la part de certains Bretons. Le 3 mai dernier, Joël Cornette publiait "La Bretagne - une aventure mondiale" (éd. Tallandier) et un mois plus tard paraissait l'ouvrage de Philippe Tourault, "La Bretagne et la France du XVè siècle à nos jours" (éd. Perrin). Au micro de Frédéric Mounier, les deux historiens retracent les relations entre la France et la Bretagne, entre un "esprit local" et "esprit central", pour reprendre les mots de Victor Hugo.
"La Bretagne d'une certaine manière c'est un pays extraverti, tourné par définition vers la mer"
La Bretagne vue par les autres
"Les Bretons sont têtus, ils sont obstinés, ils sont révoltés, ils sont différents, ils sont archaïques..." Pendant des siècles c'est à peu près ainsi que l'on a parlé ainsi des Bretons : sous l'angle de la caricature, comme l'explique Joël Cornette. Quand il parle de la Bretagne dans la préface de son roman "Quatrevingt-treize" (1874), Victor Hugo résume selon l'historien "tout le problème de la Bretagne" : cette façon que l'on a eu spécialement au XIXè siècle d'"idéaliser" les Bretons. "Aller en Bretagne c'est un peu retrouver les racines de notre propre civilisation. Comme s'il y avait là un conservatoire de valeurs, d'identités et de révoltes."
Victor Hugo, "Quatrevingt-treize"
État central, État local
"Entre la Bretagne et la France une longue histoire plus de conflits que de complémentarité." Notre Armorique n'est française que depuis 1532, autant dire une petite poignée de siècles. Mais même encore aujourd'hui, si l'on regarde du côté de Paris et de "certains médias parisiens", comme le constate Philippe Tourault "chaque été en juillet ou en août", paraissent des articles "plus ou moins bienveillants envers les Bretons". Articles qui accusent volontiers les Bretons "d'être un petit peu en retard, agressifs, distants, lointains de Paris..."
Sans doute y a-t-il comme un fond de vérité quant au caractère révolté des Bretons. Philippe Tourault rappelle les révoltes sous les Mérovingiens puis sous les Carolingiens : "La Bretagne n'a cessé de se révolter même contre Charlemagne." Même chose au XIIè siècle contre Henri II Plantagenêt (1133-1189), en 1675, contre la fiscalité et la centralisation se soulève la révolte des Bonnets rouges, sans parler des rébellions suscitées par les réformes de la seconde moitié du XIXè siècle sur la langue et la laïcité.
Le regard tourné vers la mer
Si les relations ont toujours été tendues entre cette extrémité de la terre et le pouvoir central, les Bretons ont aussi le regard tourné vers l'extérieur. Ce qu'avait remarqué Jules César lui-même à propos des Venètes. "La Bretagne d'une certaine manière c'est un pays extraverti, tourné par définition vers la mer", pour Joël Cornette. D'un autre côté, "la France est une puissance par définition terrienne".
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