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Rosbeef ou rosbif ?

RCF,  -  Modifié le 1 octobre 2018
Chaque jour Jean Pruvost décrypte un mot en lien avec l'actualité.
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Rosbif, en voilà un mot surprenant, qu’on croit récent, mais qui, on va le constater, est en fait assez ancien, même s’il s’agit d’un mot qu’on croit avoir emprunté aux Anglais. Bon. Eh bien on va essayer de dépasser le stade des croyances en matière de mots, pour aborder la « véritable histoire du rosbif », « la véritable histoire du rosbif », voilà qui pourrait être le titre d’un roman !

Imaginez qu’au lieu d’évoquer un rôti, on dise un rôt, r ô t, comme autrefois, et imaginez qu’au lieu de parler de bif, on dise du bœuf, nous pourrions alors dire un « rôt de bœuf ». Eh bien c’est ce mot-là que les Anglais nous ont emprunté en le déformant pour en faire le « rost beef »,, signifiant donc rôti de bœuf. Et au reste, encore attaché à notre ancien français lorsqu’en 1691, le mot est attesté dans un ouvrage intitulé Le Cuisinier roial et bourgeois.  on l’écrit alors ros de bif.

De fait, le mot « bœuf », du latin bos, bovis, a au fil de son histoire connu bien des variantes orthographiques et phonétiques, tantôt écrit boef tantôt buef. C’est au XVIIIe siècle, peut-être à cause de notre anglomanie qui fut forte au Siècle des lumières, que s’est imposé rosbif, en six lettres, mais Voltaire l’écrit encore tantôt rostbeef, tantôt rosbif. Par ailleurs, aux XVIIIe et XIXe siècles, on pouvait appliquer le mot à une autre viande que celle du bœuf, et on rencontrait un rosbif de mouton. Littré précise encore en 1873 que « les cuisiniers donnent aussi ce nom à la partie de derrière d’un mouton , d’un agneau, d’un chevreuil…» Mais dans l’Encyclopédie du bon français parue en1972, il est clairement rappelé que cet usage « n’existe plus communément dans la langue contemporaine, sauf pour le cheval : un rosbif de cheval ». Et d’ajouter que des graphies telles que rosbeef « sont inadmissibles ».

Le mot rostbif veut aussi dire en langue familière "anglais", c’est un sens attesté en 1774, « en raison des habitudes culinaires du peuple anglais » signale le Trésor de la langue française. Il s’agit d’une abréviation de mangeur de rosbif. En 1953 Dans Du rififi chez les hommes, Le Bretonévoque un de ses personnages s’enfilant dans un taxi anglais en s’excalamant : « Sacrés Rosbifs ! [avec un r majuscule !] On pourrait presque se tenir debout dans ces guimbardes. » Pour ma part, je ne le dis pas, je n’aimerai pas être en effet appelé grenouille, même si les Anglais nous appellent des mangeurs de grenouilles.

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