Il n’y aura finalement pas de projet de résolution faite à l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). Les Européens abandonnent cette idée qui avait pour but de mettre la pression sur l’Iran. Face aux sanctions des États-Unis, le pays maintient son programme nucléaire et restreint l’inspection de certains sites d'enrichissement d'uranium, en dépit de l’accord de 2015.
L’accord de Vienne, aussi appelé le Joint Comprehensive Plan of Action (JCPOA), a été signé en 2015 par l’Union européenne, les pays du P5+1 (Allemagne, Chine, États-Unis, France, Royaume-Uni, Russie) et l’Iran. Il vise à lever les sanctions économiques contre l'Iran et en contrepartie, l’Iran lui s’engage à restreindre son programme nucléaire à long terme, la crainte étant que le pays se dote de l'arme atomique.
Mais en 2018, le président américain de l'époque Donald Trump est sorti de l’accord de Vienne. Les sanctions économiques ont été rétablies, ravivant les tensions entre les deux pays. Depuis son élection, Joe Biden a affirmé son ambition de revenir dans l’accord. Mais les relations restent très compliquées. La levée des sanctions attendue par l’Iran n’est pas encore effective. Et le 23 février dernier, le parlement du pays a voté une loi pour ne plus se soumettre à certaines inspections de l’AIEA.
La France, l’Allemagne et le Royaume-Uni ont projeté de faire une résolution qu’ils ont finalement abandonnée jeudi. Un signe d’assouplissement dans une situation extrêmement tendue. "C’est une question de protocole et de susceptibilité très très forte. Tout le monde sait très bien que l’Iran est en train d’enrichir l’uranium. La décision européenne est extrêmement bonne si on veut trouver une solution", analyse Bernard Hourcade, géographe spécialiste de l’Iran et directeur de recherche émérite au CNRS.
Dans ce dossier, l’Europe tente donc de jouer l’intermédiaire entre les Etats-Unis et l’Iran. "Londres, Paris et Berlin s’étaient proposés de jouer les intermédiaires entre Washington et Téhéran. Pour l’instant la situation est bloquée et les Européens maintiennent une position qui se veut constructive", explique David Rigoulet-Roze, enseignant chercheur rattaché à l'Institut français d'analyse stratégique (IFAS). De son côté, Téhéran a salué cette décision de ne pas faire de résolution, dans un communiqué du porte-parole des Affaires étrangères.
Toutefois, le bras de fer continue entre l’Iran et les États-Unis, malgré que les pays sont d'accord sur l’issue : ce JCPOA, l’accord de Vienne. Mais l’Iran, pour qui les sanctions ont provoqué une grave crise économique, attend que les Etats-Unis fassent le premier pas. "L’accord sur le nucléaire a été pour l’Iran une victoire exceptionnelle. Avec la levée des sanctions, l’Iran est devenue un eldorado, un immense marché. Cet optimisme-là a été arrêté immédiatement par la décision de Trump de se retirer de l’accord. L’humiliation iranienne est exceptionnelle", détaille Bernard Hourcade.
Si le blocage persiste, la situation pourrait s’envenimer. "Au niveau régional, il y a une montée de la tension qui est très perceptible. On sent bien qu’on fait monter les enchères de part et d’autre. Il y a une pression des deux côtés mais il y a beaucoup de points d’interrogation sur les risques que ça peut comporter", constate David Rigoulet-Roze.
Et surtout, la situation pourrait être préjudiciable pour l’Iran. Les sanctions fixées par les États-Unis provoquent une très importante crise économique dans le pays. "Il y en a plein en Iran qui veulent quitter le traité de non-prolifération. Il y a un gros problème de confiance vis-à-vis des États-Unis. Il y a une grave crise économique", assure Thierry Coville, spécialiste de l’Iran et chercheur à l'Institut des relations internationales et stratégiques (IRIS).
Après cette décision de l’Europe de ne pas condamner l’Iran, les Etats-Unis espèrent pouvoir dialoguer avec ses dirigeants. Une première invitation avait été déclinée. Cette fois-ci, c’est peut-être la bonne.
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