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L'ultradroite, une nébuleuse violente qui inquiète les autorités
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L'ultradroite, une nébuleuse violente qui inquiète les autorités

Un article rédigé par Clara Gabillet - RCF, le 17 décembre 2021  -  Modifié le 17 décembre 2021
Le dossier de la rédaction L'ultradroite, une nébuleuse violente qui inquiète les autorités

10 jours après les violences qui ont eu lieu au meeting d’Eric Zemmour à Villepinte en Seine-Saint-Denis, deux membres des Zouaves ont été interpellés. Un groupe d'ultradroite que Gérald Darmanin, le ministre de l'Intérieur veut désormais dissoudre. L'ultradroite, cette mouvance connue pour ses actions violentes, inquiète les autorités.

Policiers intervenant à Lyon, lors de la manifestation du 1er mai 2020. ©Unsplash Policiers intervenant à Lyon, lors de la manifestation du 1er mai 2020. ©Unsplash

C'est un courant qui semble de plus en plus visible. Dernière illustration en date : le meeting d'Éric Zemmour où des violences ont éclaté entre des militants de SOS racisme venus s’opposer au candidat à l’élection présidentielle et des militants d’extrême droite. Grâce aux images, certains ont été identifiés. Ils appartiennent donc aux Zouaves, un petit groupe d’environ 30 personnes, issu du Groupe union défense (GUD). Des militants violents, avec un culte de la force et parfois des armes. Leur objectif est en somme de faire régner l’ordre dans la rue. D’autres groupes d’ultradroite existent, comme “Recolonisation France” dont des membres ont été arrêtés en novembre dernier. 

 

Par ultradroite, le politologue Jean-Yves Camus entend "ce qui se trouve à droite du Rassemblement national". Ce sont des activistes qui utilisent la violence. C’est assez nébuleux et difficile à quantifier. Les services de renseignement estiment que cela concerne environ 3000 militants actifs en France. 

 

Pas de profil type de ces militants

 

Il est impossible de faire un portrait robot d’un militant. Les courants sont variés, autant que les profils, très loin du cliché du skinhead. Désormais, on trouve dans cette mouvance des ingénieurs, des entrepreneurs, parfaitement insérés dans la société.

 

Plusieurs tendances se dégagent mais une a pris le dessus ces dernières années : les identitaires. Ils s’appuient sur "l’idée tout à fait raciste de défendre les nôtres avant les autres", explique Stéphane François. "Ces discours partent du constat de leur point de vue que nous sommes entrés dans une guerre de civilisation. Il y a l’idée de prendre les armes, parce qu’il y a, selon ces militants, une guerre civile soit en cours soit imminente, pour forcer les immigrés à partir. Ce sont les accélérationnistes. Une autre attitude est plutôt défensive, de se préparer en vue de la guerre civile", poursuit l’historien des idées, spécialiste de l’extrême-droite et enseignant-chercheur à l’université de Mons en Belgique.

 

"C’est une forme de rejet épidermique de tout ce qui ne correspond pas au modèle du citoyen français, enraciné ici, à la peau blanche, de culture chrétienne. Les cibles seront les étrangers en général, les personnes musulmanes, les juifs, les francs-maçons et l’ensemble de ceux qu’ils qualifient comme gauchiste", ajoute Jean-Yves Camus, politologue spécialiste de l’extrême-droite, et directeur de l’Observatoire des radicalités politiques. 

 

La religion comme fonds culturel

 

Dans le discours des identitaires, beaucoup de références à la race mais aussi à la religion. Certains graffitis appellent à de nouvelles. Toutefois, on ne peut pas établir de lien direct entre la pratique de la religion et les actions violentes. "Les gens qui à l’ultradroite parlent de la religion ne sont pas pratiquants. Ce sont des gens pour qui la religion est un fonds culturel qu’ils sentent menacé par la population musulmane et l’islamisme mais il n’y a pas de lien direct entre la pratique religieuse et le passage à l’action", souligne Jean-Yves Camus.

 

Le politologue estime que le phénomène n’est pas en augmentation mais que le confinement a pu le renforcer, avec le temps passé sur les réseaux sociaux, où ces théories circulent activement.

 

Le succès du survivalisme à l’extrême-droite

 

Dans la posture défensive, de se préparer en vue d’une potentielle guerre civile, selon leur idéologie, le survivalisme trouve un certain écho. Cela concerne toutes les activités qui visent à se préparer à un futur effondrement et apprendre des techniques de survie, en se rapprochant de la nature. "Ils ont repris aux survivalistes l’idée de créer des communautés éloignées de la ville, loin de la promiscuité ethnique et religieuse, pour créer des bases autarciques, loin du monde moderne", analyse Stéphane François.

 

La menace terroriste de l’ultradroite est-elle réelle ?

 

Le risque terroriste est encore relativement difficile à évaluer. Il est bien plus faible que le danger islamiste, mais les services de renseignement sont vigilants. Car ce qui caractérise l’ultradroite c’est le recours systématique à la violence, jusqu’à la possession d’armes. "On a eu des cas où on a découvert un arsenal d’armes chez les personnes impliquées. Mais aussi la mise en cause dans des dossiers de militaires soit de la réserve, soit d’active. On a des gens qui ont envisagé des actions. On n’a pour l’instant pas de terroriste d’ultradroite qu’on ait arrêté quelques jours avant qu’il s'apprête véritablement à commettre une attaque dont on connaissait à peu près l’heure et l'endroit", retrace Jean-Yves Camus.

 

Pour lutter contre ces groupuscules, une commission d’enquête avait vu le jour en 2019. Elle préconisait notamment de donner plus de moyens et de renforcer la loi sur ces questions.  Pour son ancienne présidente, la députée insoumise de l’Hérault Muriel Ressiguier, le chemin est encore long. "On part de loin. C’était un sujet qui était tabou. Il y a eu une prise de conscience mais il faut se donner les moyens concrètement. Ça veut dire mettre de l’argent et former des gens. Si vous voulez dissoudre des groupes, c’est bien, mais c’est pas suffisant", estime-t-elle.

 

S’il fallait le rappeler, le racisme et l’antisémitisme ne sont pas des opinions mais des délits. Le fait de participer à un groupe de combat est puni de trois ans d'emprisonnement et 45.000 euros d'amende selon le Code pénal.

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Le dossier de la rédaction © RCF
Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
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