Législatives 2022 : petits partis et gros sous.
Les législatives sont un enjeu politique pour les grands partis français. Mais aussi pour les petits qui peinent à exister sur le devant de la scène. S’ils n’ont quasiment aucune chance d’avoir des députés, le vote du 12 juin est aussi pour eux un enjeu financier déterminant pour les cinq ans à venir.
Depuis une trentaine d’année, le financement de la vie politique française, dépend très largement des résultats obtenus pas les partis politiques au 1er tour des législatives. Pour moraliser la vie publique, le système a été mis en place après d’importants scandales, politico-financiers dans les années 80. Les financements privés des entreprises ont été interdits. Les cotisations et les dons ont été maintenus, une dotation publique permet de compenser. Avec ce système, même sans remporter de siège, pour les partis en lice chaque voix gagnée par un candidat peut rapporter des fonds publics durant cinq ans.
Mais sous certaines conditions explique René Dosière, ancien député PS et désormais président de l’observatoire de l’éthique publique : "Environ 68 millions d’aide par an se répartissent en deux parts égales. La première fraction est attribuée aux partis qui ont obtenu au moins 1% des suffrages exprimés dans au moins 50 circonscriptions. Chaque électeur rapporte alors entre 1,50 et 1,70 euro par an au parti concerné. La seconde fraction correspond à l’appartenance des parlementaires élus, députés ou sénateurs qui peuvent se rattacher à un parti politique qui bénéficie à la première partie des aides."
Chaque élu au Parlement permet aux partis de gagner 37400 euros par an. Le fameux seuil des 50 circonscriptions explique aussi pourquoi ce chiffre a été aprement négocié dans les accords entre partis comme avec la Nupes ou Renaissance.
Tout ça fait qu’évidemment il y a un intérêt à être présent sous une étiquette.
31 partis ont bénéficié de fonds publics ces 5 dernières années dont 16 en métropole. C’est le cas par exemple du parti animaliste qui défend la cause animale. Sa coprésidente Helène Thouy avait échoué de peu à obtenir les 500 parrainages pour se présenter à la présidentielle. Mais son parti présente 421 candidats cette année en forte progression par rapport à 2017. "Nous avions déjà passé la barre des 1 %, nous avons 67 000 euros par an. Ça aide, mais ça n’est pas décisif, par exemple, nous n’avons toujours pas les moyens d’avoir des professions de foi. Nous espérons lors de cette élection obtenir ces moyens pour nous développer ".
Schéma à peu près similaire au Parti Pirate qui possède déjà des élus locaux en France à Besançon et Marseille notamment. Un parti qui défends les droit et libertés individuelles et la transparence de la vie publique. 95 candidats seront en lice cette année, quasiment aucune chance d’avoir d’élu à l’Assemblée, mais l’objectif financier est assumé. "C’est très conséquent pour nous, nous pourrions doubler notre budget voir plus en fonction du résultat" explique Florie Marie porte-parole du parti pirate et candidate dans la 7e circonscription de l’Essonne.
Ce système, est-il juste ? Et n’y a-t-il pas d’abus ?
"Il y a peu d’abus" estime René Dosière, mais certains partis n’apparaissent que pour ces législatives citant par exemple le cas du Trèfle, les nouveaux écologistes. Toutefois, il n’y a aucun moyen de contrôler l’utilisation de cet argent public rappelle l’ancien député : "Personne ne contrôle, car la constitution prévoit que les partis politiques exercent leur activité librement." Pour éviter l’écueil de partis fantômes, René Dosière propose de remonter le seuil à 3% au lieu de 1% sur d’avantage de circonscription jusqu’à une centaine. Mais pour arriver à d’avantage d’équité, il faudrait selon lui "élargir ce système à d’autres scrutins comme les européennes ou les régionales".
Dans les petits partis émergeants on estime aussi qu’il faut changer ce système. Mais le parti pirate propose un tout autre modèle de financement sur des bases différentes. Chaque électeur pourrait ainsi flécher son financement vers le parti qu’il souhaite soutenir à partir de sa déclaration d’impôt par exemple. Mais au-delà, pour ces petits partis, c’est aussi le système électoral qui faut revoir dans son ensemble. Pour la coprésidente du parti animaliste, Hélène Thouy : "il y a beaucoup d’injustice en France pour un parti émergeant. Notamment sur les règles de représentativité en l’absence de la proportionnelle. S’il y a autant de blocage sur de nombreux sujets, c’est parce qu’il y a un décalage entre les attentes des gens et la représentation nationale". L'abstention qui est un danger pour les finances des partis. Chaque voix non exprimée est un manque à gagner pour les partis politiques.
Pour aller plus loin
Suivez l’actualité nationale et régionale chaque jour
RCF vit grâce à vos dons
RCF est une radio associative et professionnelle.
Pour préserver la qualité de ses programmes et son indépendance, RCF compte sur la mobilisation de tous ses auditeurs. Vous aussi participez à son financement !