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La fête des populistes

RCF,  - Modifié le 22 mai 2019
La mobilisation des électeurs n'est pas exceptionnelles à l'approche des européennes. François Ernenwein s'en inquiète dans son édito.
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La mobilisation n’est pas exceptionnelle à l’approche des élections européennes. Ces élections européennes déchainent en général de faibles passions. Les électeurs se mobilisent peu. Quatre Français sur 10 en moyenne sont allés voter aux derniers scrutins. Il en sera sans doute de même le 26 mai.

Pourtant cette année, le vote a pris de l’importance si l’on tient compte des rapports de force qui se sont installés sur l’ensemble du continent. Les partis nationalistes, xénophobes ont le vent pour eux  et dans de nombreux pays, ils seront ou pourraient être en tête au soir des élections. Situation quasi -inédite depuis que le Parlement de Strasbourg  est élu au suffrage universel direct. Sans qu’elle provoque de sursaut particulier.
 

D’où vient alors cette relative apathie des Européens que cette nouvelle donne pourrait inquiéter?

De la banalisation du phénomène, sans doute. Dans différents pays, ces forces occupent le devant de la scène depuis de nombreuses années. Malgré des crises à répétition, la pression populiste s’est donc largement installée sur le continent, en Italie, en Autriche, en Pologne, en Hongrie….

De son impact jusqu’ici limité aussi.  Ces forces qui montent en puissance ne seront pas, une fois encore, dominantes au Parlement européen (170 sièges environ en 2019 selon les projections, 154 en 2O14, sur un total de 751 sièges). Mais l’arbre masque une forêt. Malgré leurs profondes divisions en particulier quand elles gouvernent, elles tentent, beaucoup plus qu’auparavant, de s’organiser, de préparer des collaborations pour faire avancer leur point de vue là où elles le peuvent et affaiblir ainsi la construction européenne. Même quand elles n’exercent pas un pouvoir central, leur pouvoir de nuisance connaît une hausse constante.
 

La menace devrait donc être prise au sérieux. 

C’est cette alerte face aux risques  de « dislocation » que lance Emmanuel Macron dans un entretien publié mardi 21 mai dans une quarantaine de quotidiens régionaux. L’horizon est celui de ces élections évidemment, mais aussi au-delà. Le scepticisme face à l’Europe n’est pas seulement le fruit amer de la montée des passions identitaires nationales mais tout autant l’enfant naturel des insuffisances européennes qui les ont encouragées.

Il est ainsi frappant de constater que les listes en compétition en France sont, à un tel point, conscientes de l’ampleur de la crise qu’aucune ne proclame spontanément sa foi en l’aventure européenne. Mais toutes ne cessent de l’assortir de codicilles promettant soit une renaissance (LREM) ou une autre Europe (les listes de gauche).
 

Pourquoi cet enthousiasme prudent ?

Cette timidité ou ces nuances s’expliquent bien sûr par le contexte évoqué plus haut et la nécessité d’entendre les plaintes. Mais aussi par l’impératif de refonder l’idée européenne qui a été beaucoup administrée par ses défenseurs comme un acquis, voire une rente.

Mais la sagesse commanderait de ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain. L’Europe, avec ses nombreuses imperfections, a  beaucoup apporté à tous ses membres collectivement. Et à chacun individuellement.  Son  bilan contrasté reste évidemment positif. Le voyage en Europe proposé pendant quatre semaines par La Croix à ses lecteurs en a été l’un des inépuisables témoignages.

Le populisme prospère sur les défauts de la cuirasse européenne. Mais fait au moins autant son lit de l’absence de mémoire, des informations tronquées  ou des mensonges éhontés. Plutôt que de s’abandonner à ses sirènes, il n’est pas absurde de prendre le temps de réfléchir. Après, il sera un peu tard.

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