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Doctrine sociale de l'Église : comment votent les catholiques

Doctrine sociale de l'Église : comment votent les catholiques

Un article rédigé par Etienne Pépin - RCF, le 4 avril 2022  -  Modifié le 5 avril 2022
L'Invité de la Matinale Découvrez la doctrine sociale de l'Eglise avant d'aller voter Rauscher

A quelques jours du premier tour de l’élection présidentielle, l’heure est au discernement. Pour qui voter en conscience ? Pour les chrétiens, comment voter en cohérence avec la doctrine sociale de l’Eglise ? La DSE donne quelques pistes à travers quatre grands principes : la dignité de l’Homme, le bien commun, la solidarité, la subsidiarité… Tous ces concepts sont traversés par une autre dimension : l’écologie. Dans son ouvrage, "Découvrez la doctrine sociale de l’Eglise avant d’aller voter" publié aux éditions du Cerf le frère Jacques-Benoit Rauscher donne à réfléchir aux enjeux essentiels pour les chrétiens en partant des textes majeurs de Rerum novarum à Fratelli tutti… Entretien.

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Y a-t-il un vote catholique ?

"Si on regarde la sociologie religieuse, le profil des votants catholiques est plus à droite que l’électorat français mais moins à l’extrême-droite. Sur le fond les catholiques sont invités à rejeter les positions extrêmes. Mais ce qui est intéressant, c’est qu’il peut y avoir une diversité parce que l’Eglise ne donne pas de consigne de vote, elle donne des principes et elle s’en remet au discernement des fidèles, elle les invite à débattre à discuter à réfléchir entre eux à partir de ces principes et des grands textes de l’Eglise. Donc non, il n’y a pas de vote catholique ou de candidat qui correspond à la pensée chrétienne, c’est plutôt heureux, parce que la diversité est toujours signe de richesse".

 

Comment voter en chrétien sans caricaturer la pensée sociale de l’Eglise ?

"La doctrine sociale de l’Eglise n’est pas forcément classable droite-gauche. Je crois que le catholique est appelé à tenir les quatre principes (la dignité de l’Homme, le bien commun, la solidarité, la subsidiarité) qui se déclinent dans un engagement concret. Mais aucun candidat ne correspond à l’ensemble de ces principes ensemble. Alors le chrétien doit trouver un équilibre entre fermeté, il y a des valeurs sur lesquelles on ne transige pas, et prudence. La prudence, ce n’est pas être frileux ou faire des compromissions. Lorsqu’une opinion est trop marquée même si elle est très catholiquement correcte, il faut savoir y renoncer. Ce n’est pas forcément satisfaisant et certains catholiques aimeraient bien des consignes extrêmement claires mais je crois qu’il est toujours intéressant d’être amené au discernement en fonction de la situation dans laquelle se trouve aujourd’hui notre pays".

 

L’écologie, un sujet de discernement transversal ?

"L’écologie n’est pas un principe de la doctrine sociale de l’Eglise parce que c’est un principe qui les relie tous. Si je ne me comporte pas correctement vis-à-vis de la nature, je vais finir par bafouer la dignité de l’Homme, c’est évidemment notre bien commun et elle implique notre solidarité avec les hommes qui vivent une crise écologique grave ou avec les générations futures et elle doit être traité à l’échelon qui est le plus approprié, c’est le principe de subsidiarité. L’écologie est vraiment transversale à toutes les questions politiques et sociales aujourd’hui. Ce n’est pas une question parmi d’autres, c’est une question à la fois centrale et transversale, c’est ce que dit le Pape François dans l’encyclique Laudato Si. Là-dessus on peut être assez fier de la doctrine sociale de l’Eglise, les chrétiens ont été précurseurs dans la manière de tirer la sonnette d’alarme sur la crise écologique. Le Pape Paul VI avait eu en 1970 cette très belle expression : « l’homme a dominé la nature, mais il faut aujourd’hui dominer la domination"

 

L’Eglise doit-elle vraiment s’impliquer dans le débat politique ?

"L’Eglise ne donne pas sa bénédiction à l’un ou à l’autre des candidats. En revanche, avoir des positions qui relèvent de la vie économique, sociale et politique : Oui. Les chrétiens doivent s’engager parce que notre vie chrétienne ne concerne pas qu’un domaine de notre existence. Notre vie chrétienne ce n’est pas que la messe du dimanche, ce n’est pas que notre vie spirituelle. Notre vie chrétienne c’est tous les éléments de notre existence, y compris la façon dont on vote, dont on consomme, y compris la manière dont on va se mobiliser dans un syndicat ou dans notre monde professionnel. Notre vie chrétienne imprègne toute notre vie et c’est pour ça qu’il est absolument capital que l’Eglise puisse s’exprimer là-dessus. Quand on dit que le Pape n’est pas dans son rôle quand il prend la parole sur la crise migratoire, sur l’écologie, sur la dignité au travail, c’est qu’on a pas compris ce que c’est que le christianisme et ce que c’est que l’incarnation, la présence de Dieu qui vient dans toute notre vie dans toutes les dimensions de notre existence".

 

N’y a-t-il pas un risque d’instrumentalisation de la pensée sociale de l’Eglise par les candidats qui s’approprient certains principes ?  

"L’identité chrétienne n’est pas une marque déposée. Cependant, l’identité chrétienne et la doctrine sociale de l’Eglise ce n’est pas un supermarché dans lequel on vient prendre une opinion qui nous intéresse en laissant radicalement de côté les autres. On ne peut pas d’un côté défendre la dignité de la vie humaine d’un point de vue bioéthique de son origine à sa fin naturelle, s’opposer à l’avortement ou l’euthanasie et ne pas considérer le fait que le traitement des migrants pose de sérieuses questions sur le respect de la vie humaine. Et lorsqu’un parti dit s’inspirer de la doctrine sociale de l’Eglise, c’est à chacun de vérifier si c’est effectivement le cas en prenant en compte le fait que c’est un tout, que ce n’est pas un lieu où l’on fait son marché en choisissant ce qui nous arrange".

 

 Quel est la place de la prière dans le discernement pour voter ?

"La doctrine sociale de l’Eglise ce n’est pas seulement des textes de papes, c’est aussi des références bibliques et de la tradition spirituelle de l’Eglise. Notre vote rejailli sur notre vie spirituelle et on a aussi besoin d’être éclairé par l’Esprit pour faire notre choix. Il faut aussi prier pour notre pays, pour les prochaines échéances électorales et pour celui qui sera appelé à devenir le prochain président de la République".

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©RCF
Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
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