Depuis quand offre-t-on des cadeaux à Noël ? Qui donnait les jouets avant qu’on ne crée le Père Noël ? Pourquoi et comment celui-ci est-il devenu le principal distributeur de cadeaux ? On en parle avec Michel Manson, historien, professeur émérite en sciences de l'éducation, à l'université Sorbonne Paris Nord.
C'est un moment tant attendu par les enfants à Noël : l'ouverture des cadeaux ! D'où est issue la tradition des présents déposés au pied du sapin ?
Pourquoi est-ce la figure du Père Noël qui s'est imposée ? Des personnages imaginaires qui distribuent des cadeaux aux enfants, il y en a de nombreux, comme la Befana, une sorcière liée à l’Épiphanie ou les Rois Mages, en Sardaigne et en Espagne, mais aussi le Père Janvier. Jusqu'au XVIe siècle, "on offrait des jouets surtout aux étrennes", explique Michel Manson, auteur de l'article "Depuis quand offre-t-on des jouets aux enfants à Noël ?" sur le site The Conservation. On voit apparaître à cette époque "des donateurs divins, et en particulier saint Nicolas".
L'image du Père Noël s’est imposée à la fin du XIXe siècle en Angleterre, au début du XXe siècle en France. Si elle l’a emporté d'autres, c'est qu'elle permettrait "un syncrétisme efficace", d'après l'historien. C’est ainsi qu'on retrouve chaque année cet homme grassouillet, doté d’une houppelande rouge à revers de fourrure blanche, dont on dit qu'il habite le pôle Nord, qu'il est rassurant, joyeux, porteur de valeurs positives, familières, universelles. Une figure qui invite à la fête toutes les couches sociales.
Avec l’évolution de la place de l’enfant dans la famille et dans la société, et la croissance de l’industrie du jouet au XIXe siècle, Noël est devenu vers 1880, 1885, la fête où l’on offre des jouets aux enfants. Des affiches aux catalogues de Grands Magasins, diffusés à des centaines de milliers d’exemplaires, jusqu'aux mises dans les vitrines : c'est un certain esprit de Noël qui pénètre la culture enfantine. Il y a là une démocratisation du modèle bourgeois de consommation, proposé comme un nouvel art de vivre, une "shopping culture".
La consommation de jouets s’intègre dans la mise en scène de la fête religieuse, parfois transformée en mythe. Mais au lieu de diluer la fête familiale, la dimension commerciale la renforce, puisqu'elle encourage les dons. D'ailleurs, les romantiques allemands puis français n'ont fait que renforcer l'importance du cadeau de Noël fait aux enfants. Charles Baudelaire ou Victor Hugo ont largement façonné notre imaginaire. Ainsi, dans "Les Misérables", quand Jean Valjean offre à Cosette la plus belle poupée de la baraque de jouets, c’est le plaisir de l’enfant qui est au centre de ce Noël.
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