Depuis plus d’une semaine, pas un jour ne passe sans qu’un ministre n’évoque dans un journal ou devant un micro le recul nécessaire de l’âge minimum légal pour partir en retraite. Certains le justifient par "l’allongement de l’espérance de vie". D’autre part la nécessité de "financer la dépendance". D’autres encore par le besoin de financement de "notre modèle social"…
Ces déclarations sont en contradiction avec la promesse de campagne d’Emmanuel Macron d’opérer une réforme systémique des retraites, sans augmenter l’âge légal, 62 ans. Le haut-commissaire à la réforme des retraites, Jean-Paul Delevoye, qui mène depuis plus d’un an la concertation avec les partenaires sociaux, n’a cessé de réitérer cet engagement. Il menace de démissionner si cette cacophonie persiste. Et les syndicats sont furieux.
Comme l’explique aujourd’hui dans La Croix notre spécialiste, Emmanuelle Réju, elle consiste à mettre sur pied un système universel des retraites à la place des 42 régimes existants (régimes de base et régimes complémentaires). Ce sera comme aujourd’hui un système public par répartition, c’est-à-dire que les actifs continueront à payer les pensions des retraités.
Mais à la différence de la situation actuelle, les règles de calcul des droits et les mécanismes de solidarité seront les mêmes pour tous. Cela passera par un système de point, comme actuellement pour les régimes complémentaires Agirc-Arcco. Les points accumulés tout au long de la vie seront enregistrés dans un compte unique. 1 euro cotisé donnera les mêmes droits à chacun.
Le montant de la pension sera strictement proportionnel à la durée de cotisation. Les assurés pourront donc arbitrer entre leur envie de partir en retraite ou d’avoir une pension plus élevée. Les notions de « taux plein », de « durée d’assurance », si compliqués aujourd’hui disparaîtront.
Il veut s’inspirer du système dit "à rendement défini" en vigueur en Suède. Ce dernier prévoit que la totalité des pensions versées à une classe d’âge est égale à la totalité des cotisations de cette génération. Pour cela, on ajuste la valeur du point de pension à l’espérance de vie de chaque classe d’âge. Si l’espérance de vie continue à augmenter, il faudra travailler plus longtemps pour avoir le même niveau de retraite que la classe d’âge précédente.
Tout simplement, parce que d’autres préoccupations sont venues se mêler à la réforme des retraites. Et notamment des questions budgétaires. Pour calmer la crise des gilets jaunes, le gouvernement a dû lâcher 10 milliards d’euros. Une dépense inattendue, qui vient contrarier son effort de réduction des déficits publics, gage de la crédibilité économique de France, qui n’est pas très bonne. Augmenter l’âge de la retraite, c’est engranger plus de cotisations sociales en dépensant moins.
Par ailleurs, le gouvernement doit trouver 9 milliards par an pour financer la dépendance, qui va exploser dans les prochaines années : en 2050, la France comptera près de 5 millions de personnes dépendantes, contre 1,5 million aujourd’hui. Comme l’équipe Macron s’est engagée à ne pas augmenter les impôts, faire financer la dépendance en repoussant l’âge de la retraite peut être une tentation.
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