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Jean de la Croix

Un article rédigé par Jean-Luc Moens - 1RCF Belgique, le 27 décembre 2022  -  Modifié le 27 décembre 2022

Docteur mystique, Jean de la Croix a aidé par ses écrits de milliers de chrétiens à vivre une vie d'union à Dieu.

Jean de la Croix Jean de la Croix

Juan de Yepes Álvarez est le deuxième fils de Gonzalo de Yepes, un noble espagnol qui a fait un mariage d’amour avec Catalina Álvarez, une jeune femme de basse condition sociale. Gonzalo est rejeté et déshérité par sa famille à cause de son mariage. Il perd son statut de noble. Ruiné, il s’installe avec sa famille à Fontiveros, à environ 120 kilomètres à l’ouest de Madrid. Il vit du tissage, d’autant plus pauvrement que sévit une famine. C’est à Fontiveros que Jean naît le 24 juin 1542. En 1545, Gonzalo meurt. Jean a à peine 3 ans. Avec la mort du père, la famille plonge encore davantage dans la misère. En difficulté, Catalina envoie Jean âgé de 5 ans dans une école d’orphelins. C’est là que se passe un bel épisode de la vie de notre saint.

 


Un jour, le jeune Jean manque de se noyer dans un marais. Il voit alors une belle dame que tous les commentateurs ont identifié comme étant la Vierge Marie qui lui tend la main pour le tirer de ce mauvais pas. Mais, l’enfant refuse de prendre la main tendue pour ne pas la salir. À ce moment, arrive un laboureur qui lui tend une perche pour le sortir de sa situation critique. Le petit Jean a préféré risquer la mort plutôt que de salir la Vierge Marie !
Finalement, la famille déménage à Medina del Campo où la maman travaille comme tisserande. Jean est admis au collège de la Doctrine chrétienne où il apprend à lire, écrire, compter et étudie la foi chrétienne. Dans ce collège réservé aux pauvres, on apprend aussi un métier pour être capable plus tard de subvenir aux besoins de sa famille. Jean tente d’exercer différents métiers comme charpentier, tailleur, sculpteur sur bois et même peintre, mais il n’est pas très habile de ses mains. Par contre, on remarque son intelligence et sa piété. Jean travaille aussi comme infirmier à l’hôpital. C’est là qu’il est remarqué par un gentilhomme qui lui obtient une place au collège des Jésuites de Medina del Campo où il étudie la philosophie, la rhétorique, la grammaire et le latin. Il termine ses études à 21 ans en 1563. 

 

L'entrée dans l'ordre des Carmes

 

Sa maman et son frère le verraient bien chapelain de l’hôpital de Medina, mais Jean préfère entrer chez les Carmes qui ont une maison dans la ville et où il prononce ses vœux perpétuels l’année suivante. Il prend le nom de Jean de saint Matthias. Il est ensuite envoyé à l’université de Salamanque, une des grandes universités de son temps. Il fait de brillantes études et est ordonné prêtre en octobre 1567. Au cours de sa première messe qu’il célèbre en présence de sa mère et de sa famille, il reçoit une grande consolation : la certitude de ne jamais offenser Dieu, ce qu’on appelle la « confirmation en grâce ». Cette consolation est d’autant plus importante que Jean est très anxieux de toujours faire la volonté de Dieu. Il se demande d’ailleurs s’il ne devrait pas entrer dans un ordre plus contemplatif et hésite à postuler chez les Chartreux.

 


À Medina del Campo, frère Jean de saint Matthias se fait remarquer par sa vie d’ascèse et de pénitence. Quand Thérèse d’Avila vient dans la ville pour fonder son deuxième monastère de carmélites réformées, elle a déjà reçu l’autorisation de fonder aussi une branche masculine. Elle a même déjà un candidat en attente. Elle entend parler de ce frère carme très contemplatif et elle le rencontre. C’est le début d’une grande amitié spirituelle qui va porter beaucoup de fruits pour l’Église toute entière. Thérèse partage son désir de réforme, son besoin de trouver des hommes pour la branche masculine. Elle dissuade Jean de se faire Chartreux et l’engage à fonder avec elle les Carmes déchaux, c’est-à-dire les Carmes réformés qu’on appelle déchaux ou déchaussés parce qu’ils portent des sandales et non des chaussures. Elle lui demande d’achever d’abord ses études, avec la permission de ses supérieurs.

 

La fondation à Duruelo

 

Jean retourne donc à Salamanque et en 1568, une fois ses études terminées, poussé et protégé par Thérèse d’Avila, il ouvre le premier couvent de carmes déchaussés avec deux autres frères dans un petit village perdu appelé Duruelo. Là Jean change de nom : il s’appelle désormais frère Jean de la Croix et c’est sous ce nom qu’il va devenir universellement connu. À cette époque, Jean de la Croix s’impose de terribles pénitences : jeûnes, cilice, etc. Cet excès de mortification ne plaît pas à Thérèse d’Avila qui cherche à modérer son jeune disciple et à lui faire simplement observer la règle du Carmel, déjà assez exigeante en elle-même. Plus tard, Jean de la Croix reconnaîtra que ces excès d’austérité n’étaient pas souhaitables. Il écrira même dans la Nuit obscure : « Ce sont des pénitences de bêtes, vers lesquelles comme des bêtes on se laisse attirer, trompé par le désir et la satisfaction qui en résultent. »

 

Un ordre qui essaime 

 


De nouvelles fondations naissent à Pastrana et Alcala. Le petit couvent de Duruelo déménage pour sa part à Mancera de Abajo. Les vocations viennent en nombre. Sur ces entrefaites, en 1671, Thérèse d’Avila est nommée supérieure du couvent de l’Incarnation à Avila avec charge de le réformer. C’est le couvent où elle a commencé sa vie religieuse. Convaincue qu’une réforme réussie nécessite la présence de bons directeurs spirituels, Thérèse obtient que le père Jean de la Croix et un confrère viennent l’aider à Avila en 1672. Pendant 3 ans, Jean de la Croix demeurera à Avila comme directeur spirituel des sœurs. Thérèse et Jean mettent aussi cette période à profit pour peaufiner la règle. Comme directeur spirituel, Jean de la Croix fait merveille. Thérèse s’appuie sur Jean de la Croix pour la fondation du carmel de Ségovie en 1574. Elle écrit aussi à cette époque son fameux Château intérieur alors qu’il est son directeur.

 


Mais bientôt la situation bascule. Les Carmes chaussés (c’est-à-dire les Carmes d’ancienne observance) sont jaloux du succès de la brache réformée. C’est ainsi qu’un coup de force est organisé : Jean de la Croix est enlevé par une troupe armée le 2 décembre 1577. Il est conduit secrètement dans un couvent de Tolède où il est mis au cachot. On veut l’obliger à renoncer à la réforme – sans succès. Il reçoit des coups de fouet chaque semaine, il est coupé de toute nouvelle de l’extérieur, il voit à peine la lumière du jour. Mais ce passage en prison et toutes ces souffrances font faire à Jean de la Croix une nouvelle étape spirituelle. Il finit par obtenir du papier et écrit ses poèmes et le fameux Cantique spirituel. Après 8 mois d’incarcération, il arrive à s’échapper le 17 août 1578. Il se réfugie dans le couvent des carmélites déchaussées de Tolède. À partir de ce moment, il va exercer différentes responsabilités et fonder divers monastères. Il écrit aussi ses chefs d’œuvre La Montée du Carmel, La Nuit obscure, et La Vive Flamme d’amour qui font de lui un grand théologien mystique et aussi le prince des poètes de langue espagnole. À la fin de sa vie, il doit faire face aux critiques, aux calomnies et aux jalousies de ses confrères carmes déchaussés. Quelle tristesse, n’est-ce pas, de voir de telles choses dans notre Église où nous serions tous sensés cheminer vers la sainteté ! On lui conseille de se méfier de certaines personnes, mais il répond qu’il vaut mieux se laisser tromper que de perdre sa pureté de cœur. À ce moment, il entend la voix de Jésus sur la croix qui lui demande : « Jean, que désires-tu pour tous les travaux que tu as endurés pour moi ? » Et Jean de répondre : « souffrir et être méprisé pour toi. »

 

Mort 

 


Il meurt dans la nuit du 13 au 14 décembre 1591 après avoir demandé qu’on lui lise une dernière fois le Cantique des cantiques qui a été au cœur de sa spiritualité. Jean de la Croix est béatifié par le pape Clément X en 1675 et canonisé par Benoît XIII en 1726. Il est docteur de l’Église en 1926 avec le titre de docteur de la théologie spirituelle ou encore docteur mystique. Il a exercé une grande influence sur nombre de saints, parmi lesquels on citer au premier rang sainte Thérèse de Lisieux qui le considère comme « le saint de l'Amour par excellence » et saint Jean-Paul II.
 

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©RCF
Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
A l'école des Saints

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