Le jésuite et paléontologue Pierre Teilhard de Chardin est mort il y a 70 ans, le 10 avril 1955. Anticonformiste et iconoclaste, il a été interdit d'enseignement par l'Église catholique, à laquelle il est pourtant resté fidèle. Ses travaux nous aident aujourd'hui encore à articuler foi et raisonnement scientifique.
Pierre Teilhard de Chardin (1881-1955) est mort il y a 70 ans. Ce prêtre jésuite, qui était à la fois théologien, géologue, paléontologue et philosophe, reste une figure éminemment moderne. Dans "Par des terres qui te sont inconnues" (éd. Cerf, 2017), l'historien Jacques Arnould, spécialiste des questions éthiques au Centre national d’études spatiales (CNES), le décrit comme un aventurier. Certes, Teilhard de Chardin a beaucoup voyagé, mais il était aussi "un aventurier dans l'âme", iconoclaste, anticonformiste, spirituel, théologique.
Aventurier, Teilhard de Chardin l'était à plus d'un titre. Pas seulement pour tous les voyages qu'il a effectués - en Éthiopie, aux États-Unis, en Birmanie ou encore en Afrique du Sud. Et surtout en Chine, où il a passé plusieurs années.
Le théologien, qui était aussi géologue et paléontologue, a pu être associé à l'étude et l'identification de l'homme de Pékin. Des expéditions hors de France et surtout loin du Vatican, où il n'était pas en odeur de sainteté, loin s'en faut.
Il n'y a qu'à voir la façon surprenante qu'il avait de parler de la Grande Guerre. Teilhard de Chardin a combattu dans les tranchées et a connu la souffrance extrême de la vie au front. Pourtant, il ne s'est pas interdit d'éprouver de façon singulière une "nostalgie du front" comme il le disait lui-même. Cette sensation de liberté, d'expérience profondément humaine qui le laissait inquiet de l'avenir. Qu'allait-il pouvoir vivre après cela ?
Autre aspect étonnant de sa vie, Pierre Teilhard de Chardin s'était épris d'amitié pour Henry de Monfreid. Un aventurier lui aussi mais qui n'avait rien d'un enfant de chœur ! Tour à tour trafiquant d'armes, d'esclaves, de haschich, il était surnommé "le pirate de la mer Rouge". "C'est le propre des aventuriers de faire des rencontres avec d'autres aventuriers", commente Jacques Arnould.
Certains de ses collègues scientifiques lui ont reproché son attachement à l'Église
Si Teilhard de Chardin était anticonformiste, ce n'était pas pour le plaisir mais par honnêteté intellectuelle. Ses travaux de scientifique l'obligeaient à questionner l'interprétation littérale que l'on faisait de la Bible, et notamment de la Genèse. Mais interdit d'enseignement en théologie, il est resté fidèle à l'Église catholique. "Certains de ses collègues scientifiques lui ont reproché son attachement à l'Église."
Interdit d'enseignement par l'Église, le jésuite a fait preuve d'une "très grande fidélité" à Rome - une fidélité "profondément spirituelle". "Pour lui, explique Jacques Arnould, d'un point de vue théologique, l'avenir de l'humanité ne peut être que christo-centré, son appartenance à l'Église relève de sa fidélité au Christ même."
D'ailleurs, Teilhard de Chardin disait vouloir mourir le jour de Pâques, jour de la Résurrection du Christ. Il est mort le 10 avril 1955, Dimanche de Pâques. Pierre Teilhard de Chardin est l'exemple même de celui qui a voulu "incarner jusqu'au bout une pensée théologique", avec la conviction d'un "message à transmettre". Par ses travaux, il nous aide encore aujourd'hui à penser l'Homme au temps de la science.
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