L’Art Nouveau fait son retour à Bruxelles : découvrir ou redécouvrir la mythique Maison Hannon
La sublime et mythique Maison Hannon construite en 1902, un hôtel de maître au style Art Nouveau situé à Saint-Gilles à Bruxelles, rouvre ses portes pour le plus grand bonheur du public. Ouverte depuis le 1er juin et jusqu’au 5 juin 2024, c’est l’occasion pour les amateurs et amatrices d’aller admirer le style de l’un des pères de l’Art Nouveau en Belgique, l’architecte Victor Horta.
Cette ouverture marque la fin d’une première phase de restauration, qui comprend le salon, la salle de réception et la cage d’escalier. Cette campagne “work in progress”, ou restauration douce laissant le bâtiment ouvert au public, est prévue jusqu’en 2030, année du bicentenaire de la Belgique. Une partie du prix du billet servira à financer cette restauration, l’occasion d’apporter sa pierre à l’édifice à l’architecture locale bruxelloise.
Selon le conservateur de la Maison, Grégory Van Aelbrouck, “il y a un double discours qui est tenu dans cette maison, à la fois celui du rez-de-chaussée qui va ressembler à une maison-musée, avec une construction-rénovation progressive. Et puis au premier étage, pour faire revenir le public, et pour le temps que ces espaces reçoivent ou bénéficient d’une belle restauration, on y tient des expositions.”
L’histoire de la Maison Hannon
Monsieur Édouard et Madame Marie Hannon, propriétaires de la Maison, avaient belle demeure, mais c'était sans compter sur le savoir-faire de l’architecte belge Jules Brunfaut. C’est lors de l’Exposition de Paris de 1900 que le couple, aux goûts antinomiques mais complémentaires, rencontre Émile Gallé, un céramiste et industriel français, qui fonde en 1901 l’école de Nancy, véritable fer de lance de l’Art Nouveau en France.
Le couple tombe amoureux du nouveau style à la mode à l’époque et demande à leur ami, Jules Brunfaut, de s’inspirer de maisons dessinées par Victor Horta, comme les hôtels Tessel et Wessinger, respectivement à Saint-Gilles et Ixelles.
Brunfaut, l’architecte de la maison et peu familier avec ce nouveau style, va également s’inspirer des maisons des architectes Octave Van Rysselberghe et Henry Van de Velde. Brunfaut va finalement réussir un coup de maître, avec une œuvre mélangeant les beaux-arts et la modernité.
Une “maison-portrait”, comme une synthèse des goûts de Marie Hannon, la maîtresse de maison, et son appétence pour la botanique et la littérature, et ceux d’Édouard son mari, et son affection pour la poésie, l’Antiquité et la photographie.
Une maison-portrait
Fruit d’un partenariat privé-public, entre acteurs locaux, comme la Commune de Saint-Gilles, Région de Bruxelles-Capital (Urban et Image de Bruxelles) et dons privés, l’asbl Maison Hannon, créée spécialement pour l’occasion, jouit d’une autonomie complète. Un partenariat également belgo-français, avec le musée de l’École de Nancy, la Villa Majorelle, située à Nancy, le musée des Arts Décoratifs de Paris, et le musée des Beaux-Arts de Reims.
“Il y a une volonté de coopération entre la Belgique et la France parce que tous les marbres viennent de France. Et la chance qu’on a eu c’est qu’on a pu travailler avec toutes les références et les factures de l’époque, donc la Maison a été rénovée au plus proche, si ce n’est à l’identique”, explique le conservateur de la Maison Hannon.
La Maison est construite sur l’angle des avenues Brugmann et de la Jonction à Saint-Gilles. Jules Brunfaut, l’architecte de la maison décide jouer avec le style beaux-arts et la modernité, et accoutumé à l’exercice, il place sur l’angle des deux avenues un bas-relief du sculpteur belge Victor Rousseau, allégorie du temps suspendu au coucher du soleil, l’Heure dorée.
Cette œuvre est la clé symboliste qui permet de comprendre la philosophie de l’intérieur, meublé entièrement par les établissements du français Émile Gallé (lustres et mobilier), décoré d’œuvres contemporaines réalisées par James Ensor, Victor Rousseau ou Émile Claus. Les vastes fresques de la main de Paul Baudouin, disciple du français Puvis de Chavannes, se déploient telles des tapisseries dans la cage d’escalier et la salle de réception. Y sont représentées des allégories de la maturité du couple, dans un décor antique, tandis que marbres et mosaïques d’une grande variété y répondent. En somme, nous avons présents ici les goûts belges et français réunis, les goûts d’Édouard et de Marie.
Les enjeux de cette restauration
“On a beaucoup d’écrits sur Victor Horta, mais la volonté enfin c’est la nouveauté, et c’est aussi de parler de Marie, la femme d’Édouard Hannon, parce que c’était elle qui faisait tourner la maison, avec les domestiques. Et c’était l’occasion de montrer le grand salon, le petit salon, et le salon des dames, presqu’en exclusivité”, explique le conservateur Grégory Van Aelbrouck. La philosophie de la restauration est synonyme de réversibilité, autrement dit, c’est la base de toute restauration afin de ne pas altérer le bâtiment et de pouvoir le transmettre dans les meilleures conditions aux générations futures.
Mais désormais, la restauration, même d’un bâtiment aussi emblématique, ne peut échapper aux enjeux contemporains tel que la question énergétique. L’intégrer à la restauration lui offre une durabilité.
Et pour financer le renouveau de la Maison, la startup belge ARTTS est à l’initiative d’une collection d’art digital (NFTs Art Nouveau), dont la vente doit soutenir le financement de la serre. Il s’agit d’une collection d'œuvres digitales uniques, certifiées par le recours à la blockchain, une technologie de stockage et de transmission d’informations, grâce au partenariat entre l’asbl ARTTS et le certificateur belge sur la blockchain LOGION. Chacune des quatre collections est déclinée en une série limitée de 26 tokens non fongibles (NFTs).
C’est donc une offre novatrice qui souhaite promouvoir l’Art Nouveau bruxellois à un public international, en ouvrant l’accès aux voies de financement alternatif, tout en redécouvrant certains éléments visuels et en impliquant des artistes contemporains.
Découvrir ou redécouvrir la Maison Hannon, c’est tous les lundi et vendredi de 11h à 18h, et les samedi et dimanche, dès 10h et jusqu’à 18h.
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