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RCF "1525 La Guerre des paysans", une histoire peu connue de l’Église
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"1525 La Guerre des paysans", une histoire peu connue de l’Église

Un article rédigé par Stéphanie Gallet - RCF, le 14 octobre 2022  -  Modifié le 17 juillet 2023
La BD de la semaine BD : 1525 La Guerre des paysans : Les origines sanglantes de la Réforme

“1525 La Guerre des paysans” de Gérard Mordillat et Éric Liberge revient sur une période méconnue, sanglante de l’histoire de l’Église. Comment au début du 16ᵉ siècle, des affrontements théologiques à l’origine de la Réforme entrainèrent des soulèvements de paysans pour protester contre la corruption et la tyrannie des pouvoirs religieux et politiques en place. Un album au graphisme soigné, extrêmement précis, très inspiré par les illustrations de cette époque. Un livre publié chez Futuropolis.


 

1525 La Guerre des paysans (éd. Futuropolis) 1525 La Guerre des paysans (éd. Futuropolis)

La “Guerre des paysans”, un épisode peu connu de l’histoire de l’Église

 

C'est un très bel album qui vient de sortir aux éditions Futuropolis.  Il retrace plusieurs affrontements qui eurent lieu de 1524 à 1526 : d’une part entre la papauté et les tenants de ce qui deviendra plus tard la réforme, Luther en tête. D’autre part, entre ce même Luther et ce qu’on pourrait appeler, avec les mots d’aujourd’hui, un authentique révolutionnaire, Thomas Muntzer. 

Au cœur de ces “disputatio” théologiques :  la Guerre des paysans. Un peu partout dans le centre de l’Europe, dans ce qui est aujourd’hui l’Allemagne, la Suisse et l’Est de la France, cette Guerre des paysans verra de pauvres gens se soulever pour protester contre la corruption et la tyrannie des pouvoirs religieux et politiques en place.

On estime généralement qu’environ 300 000 paysans se révoltèrent, et que 100 000 d’entre eux furent tués.

 

Comment la BD raconte cette histoire complexe ?

 

La première image de l’album qui occupe toute une page est une vue de Rome en 1514 … la basilique Saint Pierre est en chantier et le pape Léon X, 2ᵉ fils de Laurent de Médicis, est à court d’argent pour financer la suite des travaux. Heureusement, le commerce des indulgences est là… vous le savez petit à petit, les papes et les puissants de l'Église se sont arrogés le pouvoir de monnayer la rémission des péchés… pour les vivants, mais aussi, et c’est encore plus intéressant financièrement, pour les morts. 

Et on voit dans ses pages le dominicain Johann Tetzel, chargé de vendre les indulgences au nom de l’archevêque de Mayence, qui a négocié avec la Curie un certain nombre d’arrangements pécuniaires.  Il faut voir les cases consacrées à Tetzel décrivant les supplices dans lesquels se démènent au purgatoire les âmes qui ont péché.  “Aussitôt que l'argent tinte dans la caisse, l'âme s'envole du Purgatoire”, lui fait-on, dire… bref délire mystiques, endoctrinement, racket comme on dirait aujourd'hui… mais ça marche…  Enfin presque, car certains ne sont pas dupes de la corruption de cette élite.

 

C’est le cas de Martin Luther ?

 

C’est une des figures centrale de cet album, mais une figure complexe, nous y reviendrons. Et effectivement Luther s'insurge contre la prétention du pape à vendre des indulgences. Il dénonce la décadence de l’élite romaine et s'engage dans de subtiles joutes théologiques. Cette protestation marque le départ de ce qu’on appellera la Réforme. Très vite, Luther est suivi par un jeune prêtre, Thomas Muntzer, qui reçoit les paroles de Luther comme un appel à la désobéissance. Muntzer, c’est un pur, un millénariste qui pense que la fin des temps est proche et qu’il faut appliquer l’évangile à la lettre. Pour lui, il faut se révolter, contre cette Église décadente qui rançonne les pauvres et contre les seigneurs qui les exploitent… 

La région va s’embraser, des monastères vont être pillés, des châteaux incendiés… Bienvenue dans cette terrible Guerre des paysans…

 

Martin Luther, une figure complexe de cette BD ?

 

Oui, s’il a tenu l’allumette, Luther ne comprend pas l’incendie… Très vite, il est dépassé par les événements. Il se placera du côté des princes pour réprimer la révolte dans le sang et faire respecter l’ordre établi. À l’inverse de Muntzer qui prend au nom du Christ la tête des révoltés et le paiera de son sang… 

 

Le dessin Eric Liberge au service de cette histoire

 

Le dessin d’Eric Liberge est vraiment tout à fait fascinant. Extrêmement fin, précis, tout de noir et blanc. Chaque case est comme un petit tableau fortement inspiré des images de cette époque, et on s’amuse à repérer les références à Bruegel ou à Jérôme Bosch. Alors attention aux âmes sensibles, c'est précis et très cru :  la papauté est complètement décadente, les tortures qui attendent les pêcheurs dans l'au-delà sont terrifiantes et ces paysans et ces paysannes ne font pas dans le détail quand ils s’attaquent à un notable. 

 

“1525 La Guerre des paysans” est signé Jérôme Mordillat, journaliste, écrivain, cinéaste et documentariste bien connu, aux dessins Eric Liberge. Un album publié chez Futuropolis.

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©RCF
Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
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