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Hélène Legrais "Le bal des poupées"

Un article rédigé par Anne-Marie VERGNON - RCF Saint-Étienne, le 16 février 2019 - Modifié le 28 février 2024

Fin des années soixante, dans l'usine de poupées Bella, il existe une fosse où l'on jette les poupées ratées, mises au rebut avant d'être recyclées. L'endroit attire des maraudeurs. Il y a Sylvie, une gamine défigurée après un accident, Michel, un garçon que l'on traite de fille manquée, Patrick qui se prend pour un guerrier inca, Eliane, une vieille fille esseulée, sœur Eulalie qui collecte des jouets pour l'Afrique... tout un petit monde pour qui les poupées bonnes à jeter sont un trésor.

 

Chronique de Jacques PLAINE publiée dans L’Essor

HÉLÈNE LEGRAIS Le bal des poupées Calmann-Lévy Hélène Legrais, née à Perpignan en pleine gloire des Poupées Bella, se consacre aujourd’hui à l’écriture tout en animant des chroniques sur France Bleu Roussillon. Elle fait revivre ici ses souvenirs d’enfance. C’était le temps des poupées françaises, Bella à Perpignan mais aussi Gégé à Montbrison. Au bout du terrain vague, derrière l’usine, José est le grand maître de «la fosse». Avec sa brouette il verse dans le trou tout ce que l’entreprise a de bras, de jambes, de bustes et de têtes estropiées. Car chez Bella les contrôleurs sont impitoyables, aucune imperfection n’est tolérée. Dans le hangar voisin quelques ouvriers viennent – pendant la pause - «en griller une» avec l’espoir d’agréables rencontres. Clark Gable - comme l’ont baptisé ses collègues - est un habitué des lieux et y fait preuve d’excellence. Au bord de la fosse rôde aussi une belle brochette de cabossés de la vie qui n’ont pas eu la chance d’une jeunesse dorée sur tranche. Deux interdits de poupée tout d’abord : Sylvie dix ans, défigurée par un accident et à qui les parents redoutaient de montrer la tête d’enfants heureux et Michel, même âge, chez qui le père croit avoir décelé des déviances sataniques. Il y a aussi leur copain Patrick «l’indien au bandeau rouge». Un gamin qui comme d’autre sont un petit vélo dans la tête a lui un Peau Rouge - Sioux, Comanche ou Iroquois - dans le ciboulot. Tourne aussi autour de ce lieu mythique - et plus encore autour de José – Éliane une catherinette sur le retour en manque d’enfants et de tendresse. Enfin, Eulalie, une bonne sœur en cornettes qui ne rêve que de poupées noires à envoyer aux enfants du Congo. Et puis un beau matin tout ce petit monde, auquel se sont joints José et une vieille dame qui semble «glisser doucement vers la démence sénile» se retrouve au commissariat. Au poste de police, alignés devant le brigadier-chef Roig. Ils sont tous là sauf Michel. Oui sauf Michel car Michel a disparu. Et c’est pour lui qu’ils sont tous là. Tous, que dans un mauvais jour le brigadier-chef aurait volontiers envoyés «voir ailleurs si j’y suis». Mais qu’il va écouter avec attention car ce jour-là il est de bonne humeur. Et c’est heureux, pour Michel et pour quelques autres aussi.

 

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