Santé mentale : « le Covid a révélé le manque de prise en charge »

La France à bout de nerfs. Le 9 octobre dernier, deux députés socialistes, Chantal Jourdan (Orne) et Joël Aviragnet, et un psychiatre, Antoine Pelissolo, présentaient dix mesures pour la santé mentale. Leur rapport, publié par la fondation Jean Jaurès, constate que la Normandie est particulièrement sous-dotée en médecine de santé mentale. Par exemple, la Manche, l’Orne et l’Eure ont entre trois et treize psychiatres pour 100 000 habitants, tandis que la moyenne européenne se situe autours de 23 psychiatres pour 100 000 habitants.

La psychiatrie est considérée comme le parent pauvre de la médecine en France. Pourtant, la santé mentale est un des trois piliers de la bonne santé. « On ne peut pas être en bonne santé physique et sociale si on est en mauvaise santé mentale », rappelle le Youtubeur Julien Ménielle. « La santé mentale est un champ très large, souligne Chantal Jourdan. Il s’agit du ressenti des individus, de leur bien-être et mal-être qui vont des névroses jusqu’à la dépression en passant par l’autisme. »

Les confinements ont atteint le moral des Français

La pandémie de Covid-19 a provoqué une recrudescence des pathologies mentales. Selon Santé Publique France, en décembre 2022, 24 % de la population française présentait un état anxieux (11 points de plus en un an). Et 17 % des Français étaient atteints de dépression (7 points de plus en un an). Enfin, une personne sur dix avait des pensées suicidaires.

Les troubles mentaux ont explosé parce que la crise a duré. 

« La crise sanitaire a révélé le manque de prise en charge », analyse Chantal Jourdan. Elle ne l’a pas constaté au moment du premier confinement brutal de mars 2020. Mais plutôt dans la suite de la gestion sanitaire où les règles changeaient très régulièrement. Elle le résume ainsi : « les troubles mentaux ont explosé parce que la crise a duré. »

La demande de soins en santé mentale sont en pleine expansion

« La demande de soins est en pleine expansion et la Normandie n’échappe pas à ce constat, détaille l’ARS de Normandie. Avec un nombre de passages pour troubles psychiques aux urgences adultes plus élevé sur les deux années 2022 et 2023 (environ 8 500 passages entre janvier et mars) en comparaison à la moyenne des années 2019 à 2021 (6 600 passages entre janvier et mars). »

Il faut déstigmatiser les troubles mentaux 

Pour mieux prendre en charge la psychiatrie, les socialistes estiment qu’il est nécessaire d’investir quatre milliards d’euros sur cinq ans. Une grande partie serait consacrée aux hôpitaux psychiatriques, mais Chantal Jourdan insiste sur le développement de la médecine ambulatoire. L’Ornaise pense nécessaire un changement de regard sur la santé mentale : « il faut déstigmatiser les troubles mentaux ».
 

L’éco-anxiété, est-elle un vrai trouble mental ?

Chantal Jourdan est également attachée à la prise en compte de l’éco-anxiété. Un trouble mental « bien présent dans la nouvelle génération qu’il faut mettre en relation avec les problématiques environnementales ». « Beaucoup de jeunes et de militants ne voient pas de perspective quant à leur avenir compte tenu de la dégradation de leur environnement. »

Bien que l’éco-anxiété renvoie aux questions climatiques dans son intitulé, Chantal Jourdan n’oublie pas de mentionner l’environnement social et professionnel dans la prise en compte d’une bonne santé mentale. « Il faut s’interroger sur les nouvelles organisations du travail qui peuvent mener à des burn-outs ou à des troubles dépressifs. »

Bien que déposée, la proposition de loi doit être inscrite à l’ordre du jour pour être discutée. Les socialiste compte profiter des discussions sur le projet de loi sur le financement de la sécurité sociale pour faire avancer leur proposition.