Joyeux anniversaire, Spinoza ! Avec un peu de retard, toutes nos excuses – Spinoza est né le 24 novembre 1632. Mais « joyeux » est bien le mot, car Spinoza est considéré comme le grand spécialiste de la joie. Les choses sont cependant plus compliquées, et plus nuancées.
Ne me dites pas que Spinoza ne recommande pas de cultiver la joie…
Spinoza préconise bel et bien de cultiver les passions joyeuses, comme la grandeur d’âme ou la satisfaction de soi, et de fuir les passions tristes, comme la pitié ou comme l’espoir, qui est toujours mêlé de crainte. Mais Spinoza nous demande aussi de nous méfier de nos joies trop faciles, de nos emballements trop trépidants. La joie ne doit être ni fuite ni aveuglement. Et Spinoza insiste : la joie, comme la tristesse d’ailleurs, n’est jamais que « passage », transition : on quitte un état, une manière d’être, pour une autre, pour un mieux-être. La joie n’est donc pas un absolu, un état de grâce, un paroxysme. C’est un mieux être, ni plus ni moins.
Et Spinoza nous souhaite mieux que cela…
Oui, Spinoza nous souhaite une joie qui ne passe pas, qui ni n’augmente ni ne diminue. Une joie qui ne soit pas simplement passagère, une joie qui ne connaisse ni aléas ni fin. Cette joie-là, c’est la connaissance seule qui peut nous l’offrir. Oui, je le conçois, c’est moins drôle, mais tellement plus… spinoziste ! Penser vraiment, penser les choses telles qu’elles sont, sans préjugé ni peur, cela nous rend heureux. D’un bonheur durable, d’une joie que l’on peut dire parfaite. En faisant l’effort de penser les choses telles qu’elles sont, sans nous illusionner ou nous mentir, en faisant cet effort, nous ne subissons plus rien, nous comprenons tout.
Nous ne sommes plus ballotés entre tristesse et joie, mais, déclare Spinoza, « nous sentons et expérimentons que nous sommes éternels ». Oui, ici et maintenant, quand nous comprenons ce qui nous arrive, nous sentons et nous expérimentons que nous sommes éternels. Spinoza est un penseur non pas de la joie, mais de l’éternité.
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