Les premières concertations ont débuté lundi 16 avril dernier entre les partenaires sociaux et le haut commissaire aux retraites Jean-Paul Delevoye. Depuis 2000 les mandatures successives ont enchaîné les réformes dont la plus importante en 2010 a fait passer l’âge légal du départ à 62 ans pour 41 annuités et demi de cotisation.
Rappelons que le système français agit par répartition. Il est basé sur la solidarité intergénérationnelle. Les actifs financent les pensions des retraités. C’est un système dit aussi "contributif" : cela veut dire que les retraités touchent une pension proportionnelle au montant des cotisations qu'ils ont versées au cours de leur carrière.
Aujourd’hui notre système n’est pas en danger sur le plan financier. Mais Emmanuel Macron souhaite le rendre plus lisible en harmonisant notamment une quarantaine de régimes différents avec ce slogan: "un euro cotisé doit offrir les même droits pour tous".
Le chef de l'Etat ambitionne de créer un régime de retraite unique dans lequel tous les actifs seraient soumis aux mêmes règles quel que soit leur statut. Ce qui conduirait à la fin des régimes spéciaux comme ceux de la SNCF ou de la RATP. Dans ce régime unique, les droits seraient comptabilisés non plus en annuités mais en points via un système notionnel comme c'est le cas en Suède par exemple.
Chaque salarié dispose d'un compte virtuel sur lequel sont versées les cotisations. Les activités professionnelles permettent de remplir le compte, comme les années d'étude ou les congés parentaux. Une fois l'âge de la retraite atteint, le capital virtuel devient une retraite grâce à un coefficient de conversion. Jacques Bichot, économiste spécialiste des retraites voit un net avantage à un tel système.
Frédéric Sève est secrétaire national de la CFDT, le premier syndicat à avoir été reçu lundi. Pour lui l’enjeu c’est un système plus juste mais aussi plus innovant en matière de retraite. Tous les partenaires sociaux n’ont cependant pas la même vision de cette réforme et de cette concertation.
L’ensemble des autres syndicats sont opposés à un système par points. Du côté des économistes, la nécessité d’une telle réforme n’est pas non plus partagée. C'est le cas notamment d'Henri Sterdyniak, économiste à I’OFCE. Il redoute un détricotage d’un des système généreux qui a fait ses preuves. Il redoute également à terme une baisse du montant des pensions.
Autre crainte de l'économiste, un allongement de la durée du travail. Pour le collectif des économistes atterrés, il faudrait travailler jusqu’à 75 ans pour avoir le même montant de pension qu’aujourd’hui. Ce qui pousserait à des retraites complémentaire par capitalisation via des fonds de pension à l’américaine. Pour la CFDT, il y au moins trois lignes rouges à ne pas franchir pour le gouvernement.
Si une telle réforme aboutit, il y aurait aussi une période de transition délicate à gérer. Comment ajuster deux systèmes pour ceux qui ont cotisés depuis déjà la moitié de leur carrière ? Pour Henri Sterdyniak il y aura forcément des perdants. La concertation va s’étaler dans le temps pour une réforme.
Si elle aboutit, une loi pourrait intervenir à l’horizon 2019. Il y a encore de nombreuses zones d’ombre. Quelle serait le fameux taux de conversion de ces points ? Le gouvernement ne l’a pas encore dit. Quoi qu'il en soit, il faut s’attendre à de sérieuses oppositions pour les salariés qui bénéficient d’un régime spécial.
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