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Sauver le dialecte alsacien, la mission de la Fédération Alsace bilingue

Un article rédigé par Adrien Beaujean - RCF Alsace, le 11 mai 2022 - Modifié le 12 mai 2022
Les Trois Questions · RCF AlsaceSauver le dialecte alsacien, la mission de la Fédération Alsace bilingue

Sauver le bilinguisme et le dialecte alsacien: c’est la mission de la Fédération Alsace bilingue, qui a réuni 24 associations locales autour de la table le 7 mai à Strasbourg. Son président, Pierre Klein, est notre invité.

Pierre Klein, président de la Fédération Alsace bilingue - DRPierre Klein, président de la Fédération Alsace bilingue - DR

Adrien Beaujean: Pierre Klein, vous avez employé des mots assez forts lors de ce colloque. “On n'est pas loin d'un champ de ruines linguistiques en Alsace”. Est ce que vous pouvez détailler, et peut être un peu pourquoi, ces mots aussi forts?

Pierre Klein: Je suis un vieux militant du bilinguisme, j'ai commencé au début des années 70. À l'époque, l'emploi de l'alsacien était encore très répandu. 70 à 80% de la population utilisait encore couramment ce dialecte, à côté évidemment de la langue française et aussi de langue allemande, c'est à dire du standard allemand dans les médias publics et la radio, etc. Aujourd'hui, dans les petites sections des écoles maternelles d'Alsace, c'est à dire les enfants qui ont trois ans, même pas un de ces enfants ont été familiarisés au dialecte. Donc il y a un véritable déclin. L'abandon du dialecte est programmé si il n'y a pas une forte politique de redressement de la situation, nous sommes en bout de course parce que la transmission est rompue. On ne peut pas transmettre évidemment ce que l'on ne connaît pas. La France a un problème avec sa propre diversité linguistique. Reconnaître les langues régionales, ce serait évidemment leur permettre de survivre et de vivre. Or, on constate que l'ensemble des langues régionales de France sont en très forte régression en Bretagne. Il reste quelque 200 000 locuteurs et en Alsace, on n'en est pas loin. Si en Alsace, on en a encore en valeur relative le plus fort nombre de locuteurs, ce n'est pas parce qu'on est plus vertueux que d'autres ou parce qu'on aurait un statut particulier. Non, c'est parce que l'Alsace, elle, a été détachée de la République de 1870 à 1918 et pendant cette période là, on regagné en emplois. En pratique, quelque chose qui survit encore.

 

A.B.: Et alors, qu'est ce que vous proposez concrètement pour sauver le dialecte alsacien? Vous, Pierre Klein, en tant que président de la Fédération Alsace bilingue ?

 

P.K.: Les Alsaciens ont subi un fort traumatisme de 40 à 44. L'annexion nazie a conduit les Alsaciens à rejeter les parts entières de leur identité allemande ou alsacienne. Et la période post-traumatique a consisté à se retourner contre cela. Il faut sortir de cela et faire résilience. Il faut que nos institutions tiennent déjà un discours de réconciliation, utilise la langue aussi, soit le standard, soit les dialectes. Et enfin, qu'on mette en place des politiques scolaires, mais aussi dans les médias, etc. Nous parlons de 30 ans. Évidemment, on ne fera pas tout tout de suite. Mais si déjà on pouvait arriver à 30% d'enseignement dans les écoles, à 30% d'emplois dans les médias, etc. : ce serait la base nécessaire pour la survie. Si on atteignait ces 30 %, on pourrait par la suite envisager un déploiement plus important. Mais ces 30 %, ce serait les fondations nécessaires pour assurer la survie du dialecte alsacien.

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