L’impossibilité de retourner à la messe à partir du 11 mai a provoqué une protestation des évêques de France qui avaient pourtant proposé un plan très précis avec toutes les précautions sanitaires possibles. Or, voici que depuis une semaine, un débat faire rage entre catholiques : entre ceux qui reprochent aux évêques de France leur attitude et ceux qui les soutiennent.
Des deux côtés, certains arguments sont recevables. Il est évident que les religions, dans cette affaire, sont largement discriminées et pâtissent du fait que, pour nos gouvernants, les considérations spirituelles sont reléguées au dernier plan. D’un autre côté, il apparaît que ce jeûne communautaire et eucharistique peut permettre à chacun d’entre-nous de désirer plus ardemment l’essentiel et de retrouver d’autres manière de prier.
Il y a différentes sensibilités dans l’Église et l’on devrait pouvoir discuter posément des choses. Pour ma part, je me reconnais nettement dans la première position : l’eucharistie est la source et le sommet de la vie chrétienne, la prière communautaire est irremplaçable et le refus de nos politiques de prendre en compte la foi des personnes m’attriste.
Mais dans ce débat, les dérapages ne sont plus contrôlés. À gauche comme à droite, on pense avoir le monopole du bon christianisme. Du coup, on excommunie à coup de post Facebook ou de tweet assassin, redonnant vie au vieux clivage progressistes contre réactionnaires. Du côté progressiste, on a entendu que les évêques survaloriseraient l’eucharistie au détriment de la Parole de Dieu (comme s’il fallait choisir entre l’un et l’autre) et que ceux qui réclament la messe manqueraient de charité en risquant de contaminer leur prochain ! Et du côté réactionnaire, on s’est engouffré dans la brèche pour déclarer que les progressistes étaient décidément de faux chrétiens ne croyant pas vraiment à l’eucharistie, et pour crier à la persécution avec des saillies typiques d’un christianisme de forteresse assiégée.
En 1968, l’immense théologien Louis Bouyer, dans un essai décapant, au titre choc, "La décomposition du catholicisme", avait montré que progressistes et intégristes, comme il les nommait, étaient des frères siamois. Si nous voulons que, dans l’Église, demain ne soit pas comme hier, il nous faudra en finir avec ces postures mortifères par leur agressivité et leur prétention à posséder la vérité que nous ne pouvons qu’inlassablement chercher.
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