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Présomption d'innocence et présomption de vérité

RCF,  - Modifié le 12 mars 2020
Après l'affaire Polanski, c'est maintenant l'affaire Woody Allen qui nous pousse à repenser le statut de la présomption d'innocence : vers un tribunal populaire ?
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On a appris ce week-end que le groupe Hachette refusait de publier les mémoires de Woody Allen qui devaient paraître chez Stock. Rappelons les faits : Woody Allen a épousé Soon-Yi, la fille adoptive de son ex-compagne, Mia Farrow, ce qui n’est certes pas très reluisant, mais toutes les accusations d’agression sexuelles sur son autre fille Dylan, au demeurant contestées par son fils Moses, ont été rejetées par la justice américaine.

Soyons clairs : nous ne savons pas la vérité dans cette histoire éclaboussant une famille à tout le moins dysfonctionnelle. Et celui qui aurait la prétention d’en savoir plus que la justice américaine et de juger Woody Allen irait gravement à l’encontre d’un des principes de notre état de droit, la présomption d’innocence. En attendant, le cinéaste a de plus en plus de difficultés à produire ses films ...

Dans Le Monde de lundi, un collectif d’une centaine d’avocates pénalistes, réagissant aux réactions critiques sur la césarisation de Polanski, défendait la présomption d’innocence et pointait le danger d’un tribunal populaire. Il y a danger d’une « présomption de culpabilité » avertissaient-elles, sans prendre garde au demeurant que Polanski a bel et bien été jugé pour viol sur mineures aux États-Unis et s’est largement vanté de son attirance pour les jeunes filles dans les médias. Ce qui, au passage, est très différent du cas de Woody Allen.

Hier dans le même journal, un collectif, principalement de femmes, dont la psychiatre Muriel Salmona ou la cinéaste Andrea Bescond rappelait tranquillement que notre système judiciaire ne croit pas les victimes : mise en doute, plaintes classées sans suite, viols jugés comme des agressions sexuelles en tribunal correctionnel et non aux assises. C’est une « présomption permanente de mensonge » qui pèse sur les victimes, principalement les femmes et les enfants.

Alors qui croire ? Ceux qui mettent en garde contre le risque de tribunaux populaires ou ceux qui dénoncent le refus d'entendre les victimes ? Sans doute les deux. Mais la situation n’est pas parallèle. La présomption d’innocence existe dans notre droit et il faut la rappeler. Mais la présomption de vérité de la parole des victimes demeure non reconnue. A défaut de l’inscrire juridiquement dans nos lois, il faut en faire un préalable moral sans lequel la présomption d’innocence, qui est une présomption de vérité de l’accusé, ne tiendra plus longtemps. La sauvegarde de notre droit passe par une meilleure reconnaissance de la parole des victimes.

 

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