Ce mot date de 1872, à une époque où l'on a fait d'immenses progrès dans la connaissance du passé. Sa construction est transparente, avec le préfixe « pré », avant, et histoire, pour dire ce qui s’est passé avant l’apparition de l’histoire que conventionnellement on assimile à l’apparition de l’écriture, de la première métallurgie. Et il y eut un livre dès 1874, intitulé De l’ancienneté de l’homme, résumé populaire de la préhistoire, livre de Zaborowski-Moindron, qui permit de populariser le mot. Mais il semblerait que le mot de préhistoire aurait été construit à partir de préhistorique, l’adjectif, pour une fois antérieur au nom. Et là aussi l’adjectif fut lancé par le titre d’un ouvrage de 1864, par Lartet et Christy, ouvrage intitulé Objets gravés et sculptés des temps pré-historiques.
En fait, auparavant, le mot à la mode était antédiluvien, du latin ante, avant, et diluvium, déluge. Et sans sourire, on évoqua longtemps en sciences l’histoire antédiluvienne. Puis le mot antédiluvien s’est totalement démodé, et du fossile antédiluvien on est passé à l’usage amusé du mot. On doit par exemple à Théophile Gautier cité par Larousse cette description plaisante : « Figurez-vous une voiture antédiluvienne, dont le modèle aboli ne peut se retrouver que dans l’Espagne fossile. » Il n’était plus possible de garder ce mot en restant sérieux, pré-historique, d’abord avec un trait d’union, prit la suite, puis naquit la préhistoire.
Dans les années 1950, André Leroi-Gourhan donnerait à la préhistoire de vraies lettres de noblesse, la décrivant comme « ni réellement une science littéraire, ni totalement une science expérimentale », mais dit-il « née au confluent de l’histoire naturelle et de l’humanisme ». Jolie formule, qui garde encore comme spécialistes des représentants de chacune de ses disciplines. Quelques citations rappellent d’ailleurs cette double appartenance avec humour. Dans le Livre du thé, par exemple, cette citation : « Le premier homme de la préhistoire qui composa un bouquet de fleurs fut le premier à quitter l’état animal, il comprit l’utilité de l’inutile. » Enfin, j’aime assez ce clin d’œil de Marc Escayrol, qui fait dire à Dieu : « Ah, la préhistoire, toute mon enfance ! »
RCF est une radio associative et professionnelle.
Pour préserver la qualité de ses programmes et son indépendance, RCF compte sur la mobilisation de tous ses auditeurs. Vous aussi participez à son financement !