Parole à notre évêque. - 22 octobre 2016 à 08:40 Mgr Gosselin en Corée fin célébrations des 150 ans martyrs
Du 13 au 24 octobre, la délégation interdiocésaine venue de France en Corée sur les pas des saints et martyrs a vécu un rythme soutenu de visites et de déplacements. « Les événements se sont succédé. Nos passages ne passent pas inaperçus. Ce qui est étonnant d'abord, c'est la rencontre avec l'Eglise de Corée d'aujourd'hui qui est très dynamique. Partout dans les paroisses, les communautés sont là pour nous accueillir et nous applaudir, les 60 pélerins que nous sommes repartons systématiquement avec des cadeaux. Il y a vraiment une dimension fraternelle ».
« Hier (jeudi 20 octobre), nous avons rencontré toute la conférence épiscopale de Corée. Ici, il y a 17 diocèses, mais une trentaine d'évêques. Cette journée était l'occasion de partager et d'entendre tout ce qu'ils nous disent sur la reconnaissance qui est la leur. Je pense que les 150 ans des martyrs de Corée était l'occasion d'exprimer cette reconnaissance à travers notre présence. Ils s'enracinent a priori vraiment dans ces missionnaires qui sont partis de Charente, de Sarthe et d'ailleurs, reconnaissant bien que c'est à partir de ce passage des prêtres français que l'Eglise de Corée a commencé vraiment à se structurer. Ce qui est intéressant, c'est de voir que ce sont les laïcs coréens qui ont demandé des prêtres venant d'ailleurs. Il y a une place des laïcs qui est du coup assez intéressante », raconte l'évêque.
« Ne pas être chrétien à moitié »
« Nous vivons une très belle expérience de rencontre entre deux Eglises, l'Eglise de France parce que nous sommes là au nom de l'Eglise de France et l'Eglise de Corée. Les réalités ne sont pas du tout les mêmes. Ici, il y a pléthore de vocations, plus de 100 000 baptêmes d'adultes célébrés en un an, les séminaires sont pleins, les diocèses comptent 300 à 400 prêtres. Pour nous, c'est un peu un monde à part mais nous échangeons joyeusement aussi sur la vie de nos Eglises. Et puis partout sont présents les martyrs, c'est très surprenant et très édifiant. »
Ce pélerinage en Corée intervient en fin d'Année de la Miséricorde. « C'est très intéressant et il est question aussi des difficultés que nous pouvons avoir dans nos diocèses. Vraiment, l'identité même de l'Eglise est missionnaire. Il faut d'abord savoir accueillir les missionnaires quand ils viennent d'ailleurs, il faut savoir aussi partir ailleurs quand c'est un appel de Dieu. Je crois qu'il y a cette dimension missionnaire qui me paraît très importante et puis les Coréens insistent beaucoup sur cette spiritualité du martyr, c'est-à-dire ne pas être chrétien à moitié : il faut être radical dans la vie évangélique, dans la vie communautaire, dans l'expression de sa foi. Si vraiment ils ont été martyrisés, c'est que c'était très subversif à l'époque de l'Evangile, mais je pense que, aujourd'hui, c'est également le cas. Il ne faut pas que nous ayons peur d'affirmer ce que nous sommes si vraiment nous sommes persuadés que c'est une bonne nouvelle. Je crois qu'il y a des enseignements très intéressants donnés par cette Eglise de Corée. Je pense qu'il y a vraiment un don réciproque et une belle rencontre dans l'Esprit saint », se réjouit Mgr Gosselin.
Pendant ce pèlerinage en Corée du Sud, il a été question évidemment des relations avec la Corée du Nord. « On en a parlé hier (jeudi 20 octobre) avec la conférence des évêques de Corée. Evêques et cardinal, nous avons échangé aussi sur cette dimension avec l'Ambassadeur. C'est un contexte un peu particulier. La séparation de la Corée remonte aux années 50 et ce sont deux pays qui ne se ressemblent plus en rien, si ce n'est que c'est le même peuple quand même. On rencontre aussi des prêtres des Missions Etrangères de Paris qui parlent de cet accueil possible de réfugiés venant de Corée du Nord. Il y a toujours cette menace d'un conflit toujours envisagé. Cette réalité se ressent mais, en même temps, les gens vivent. Ce qui est étonnant aussi c'est l'explosion économique en trente ans, le bond que ce pays a pu faire. La Corée est maintenant dans les pays en tête au niveau économique, financier, technologique. Comment ce pays a pu avancer et comment maintenant il se posent de grandes questions, on ne peut pas continuer à vouloir toujours plus, avec quel sens ? »
« Une occasion de rencontre avec nos racines et Pierre Aumaître"
« L'Ambassadeur nous disait : la Corée du Sud est un peu un laboratoire de la mondialisation parce qu'elle se trouve confrontée à des questions sur son avenir. Le progrès ne peut pas être exponentiel sans qu'on ne puisse prendre le temps de réfléchir sur la planète et sur la façon de vivre avec les autres. Pour la Corée du Sud, le contexte est quand même un peu difficile au niveau international, mais, au niveau intérieur, c'est une belle prospérité. L'Eglise manifeste aussi une certaine prospérité et également avec des indicateurs montrant que la natalité baisse, qu'en est-il de l'avenir de l'Eglise dans ces conditions ? Les vocations baissent également parce qu'il y a plus de matérialisme. Ces faits montrent que nous avons les mêmes questions partout, mais les contextes étant extrêmement différents, les solutions ne peuvent pas être les mêmes. En tout cas, ils ont un esprit missionnaire qui est tout à fait exemplaire et qui représente un beau témoignage », souligne l'évêque.
« Il n'y aucun échange entre les deux pays, c'est vraiment une situation de blocage. La Corée du Nord n'a aucune relation diplomatique avec les pays européens et avec un certain nombre de pays d'Asie. La Corée du Nord s'est fermée sur elle-même, entretient quelques liens avec la Chine qui les soutient, parfois la Russie. Là, il y vraiment une cristallisation de deux manières de vivre. On sait très bien que c'est un pays sous contraintes à tous les niveaux. Je pense que les témoignages de ceux qui en sortent montrent bien la gravité de ce qui se passe. En tout cas, les missionnaires nous parlent bien de cette importance de pouvoir penser, prier pour ceux qui veulent sortir de Corée et qui le font de plus en plus difficilement en passant souvent par la Chine. Et, pour eux, c'est là où c'est difficile de pouvoir émigrer ailleurs. La question de l'immigration n'est pas présente qu'en Europe, on la voit aussi vraiment de manière importante ici, même si ce n'est pas en terme de chiffres. Mais il y a vraiment un enjeu de protection de la population, de gens faibles qui veulent simplement sauver leur peau et on les comprend.
« Ce genre de voyage est une occasion de rencontre avec une Eglise, avec ses racines et nos racines à nous puisque Pierre Aumaître a été bien présent plusieurs fois. Nous avons pu échanger sur lui, amener un peu de terre de Charente pour faire pousser un arbre. Je souhaite que Pierre Aumaître puisse nous aider à trouver d'abord la radicalité de la vie évangélique et un sens missionnaire. C'est ce que je voudrais pouvoir communiquer au diocèse : la joie de pouvoir être lié ainsi à l'Eglise de Corée par Pierre Aumaitre », conclut Mgr Gosselin.
Erica Walter
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