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Paléontologie
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Paléontologie

Un article rédigé par Claude Boussard - RCF Loiret,  -  Modifié le 3 janvier 2022

Ce matin 3 janvier, alors que je goûtais cette heure bénie qui suit le petit déjeuner un jour de vacances, un chœur martial aux accents révolutionnaires vint heurter mes carreaux. Il n’en fallut pas plus pour réveiller mon âme de badaud. Au pied du Muséum d'histoire naturelle d’Orléans, rebaptisé de la biodiversité et de l’évolution (MOB) une camionnette dotée d’un haut-parleur, diffusait les couplets révolutionnaires de L’Internationale.

© Pixabay / Wikimages © Pixabay / Wikimages

Tiens serait-ce un hommage à Eugène Pottier, goguettier, caché à Paris pendant la Commune ? Il est l’auteur de ce chant révolutionnaire, que plus tard, le belge Pierre Degeyter mit en musique. Devant un musée, cela pouvait s’entendre. Mais savez-vous ce qu’est une goguette ? Non ? Eh bien c’est un petit groupe plutôt masculin de moins de vingt personnes, qui se réunissaient pour passer un bon moment ensemble pour chanter. Il y avait fort peu de femmes. Ce matin il y en avait une, et pour la rendre audible dans ce concert de mâles poitrine, on l’avait doté d’un mégaphone. Elle répondait ainsi, telle un chœur antique, aux imprécations du maître de la chorale..

Vingt personnes, c’est à peu près le nombre de ces choristes matinaux, qui nous régalaient ce matin.

Il est amusant de se rappeler que ce chant, qui fut connu grâce à l’association « la lice chansonnière » a conquis les anarchistes, révolutionnaires, socialistes et communistes, pour finir en apothéose hymne de l’Union Soviétique jusqu’en mille neuf-cent quarante-quatre. Les soviétiques, prudents avaient supprimé le cinquième couplet où il était question d’appliquer la grève aux armées, de mettre la crosse en l’air et de destiner les balles aux généraux.

La révolution, oui, mais dans l’ordre.

Le parti socialiste français, qui le chanta, jugea bon de le remplacer par son propre hymne en mille neuf-cent quatre-vingt-un, qui proposait de ne plus croire aux matins qui chantent, mais de changer la vie ici est maintenant. (Programme commun, oui, mais chacun chez soi). Voyant sans doute qu’ils n’y arrivaient pas, ils sont revenus à l’authentique et ont repris l’International  au congrès de Lille en mille neuf-cent-quatre-vingt-sept.

Je ne veux pas me moquer. Ces gens qui manifestaient ce matin, étaient respectables. Ils demandaient de meilleures conditions de vie. Non, j’avais peine pour eux. Un petit groupe, dans l’indifférence générale, un peu comme une voix dans le désert (Tout rapprochement d’idées serait mal venu).

Mais c’était triste. On avait l’impression qu’ils sortaient du musée, département paléontologie. Ils auraient pu prendre comme enseigne le bel animal, que les jardiniers municipaux ont sculpté, transformant un arbuste en diplodocus.

Leurs gilets n’étaient pas jaunes, ils étaient aux couleurs de leur syndicat.

Il n’est pas exclu que le jaune revienne à la mode et ce, bien avant le Tour de France. La France a été anesthésiée par la crise sanitaire, les confinements et autres interdictions. Il n’est pas de mon propos de juger l’action de nos dirigeants. Je n’ai d’ailleurs aucun doute sur le nombre d’experts qui viendront après coup expliquer ce qu’il aurait fallu faire.

Non je me demande comment notre société va se réveiller de cette longue période de gel. Sera-t-elle comme la nature, qui dès le printemps revenu, reprend son cycle normal ? Ou bien sera-t-elle transformée ? Poussée par une technologie et des pratiques commerciales, toujours plus inventives. D’autant que cette évolution est mondiale et qu’à part quelques sanctuaires, le mode de vie se répand partout, ou tout au moins semble être un modèle aimable à adopter toutes affaires cessantes.

Ces syndicalistes qui semblaient défiler devant leur monde perdu, symbolisé par un diplodocus végétal, m’ont, je l’avoue, attristé. Je sais que la flèche du temps va toujours dans le même sens, mais il ne m’est pas interdit de penser qu’elle va un peu vite. Je revois mon cahier de classe de l’école communale (on ne dit plus comme cela maintenant) où j’avais recopié le poème de Du Bellay :

« Quand reverrai-je, hélas, de mon petit village fumer la cheminée, et en quelle saison reverrai-je le clos de ma pauvre maison, qui m'est une province, hélas, et beaucoup davantage ? »

« Dis Grand-Père, c’est quoi un village et une province ? »

« Ferme les yeux, je vais te raconter. Il était une fois… » 

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