Nouvelle étape dans la réflexion sur l’avenir du Mont Saint-Odile. Le 12 avril, un cabinet de géologues a remis à l’archevêché de Strasbourg une étude portant sur la qualité des roches et des principes de sécurisation prenant en compte la valorisation patrimoniale du site et l'insertion paysagère.
Le diocèse de Strasbourg, propriétaire du sanctuaire et des 30 hectares de forêt alentour, réalise une série d’études tant sur les bâtiments que sur les éléments naturels du site. Une petite équipe de géologues s’est donc rendue sur le terrain à la mi-mars pour collecter des données leur permettant de poser des diagnostics de sécurisation du site. L’étude a ensuite été remise le 12 avril à l’archevêché. Comment s’y ont-ils pris ?
En 2020, une première étude montrait déjà la fragilité de la roche et la nécessité de la consolider. Quatre ans plus tard, le cabinet Géolithe dont le siège se situe à côté de Grenoble, a assumé une nouvelle mission : évaluer les risques d’éboulement, recenser les autres instabilités rocheuses, et faire des recommandations de travaux pour sécuriser le site.
Le verdict ? “Globalement, à l'échelle du site, on a un grand nombre d'instabilités rocheuses potentielles, mais la majorité de ces instabilités présentent des aléas d'écroulement qui sont plutôt faibles voire très faibles. Les phénomènes d'éboulement sont donc assez peu courants, au contraire d'autres sites”, explique Elena Metz, ingénieure géologue, qui a mené l’étude. Rien de grave, selon la chef de projet en risques naturels et gravitaires, même si “certains méritent des travaux de sécurisation”.
L’étude a pris en compte la particularité majeure du site : un sanctuaire fondé directement sur le rocher. “On a donc des ouvrages et même des bâtiments entiers qui sont fondés sur des éperons rocheux. C’est le cas pour la Chapelle des Anges, qui se situe sur un petit éperon rocheux très découpé en extrémité du site.”
Avant de se rendre sur le terrain, Elena Metz a donc d’abord dû se plonger dans une bibliographie abondante : “Je me suis intéressée à la carte géologique du site, à sa topographie, ainsi qu’au contexte hydrogéologique. Par exemple, j’ai pris en compte les éboulements passés sur le mont Sainte-Odile, probablement au XIXᵉ siècle au niveau de la Chapelle des Anges.”
Vient ensuite la phase d’analyse sur place. L’équipe avait donc besoin d’aller voir chaque discontinuité rocheuse ou chaque instabilité potentielle. “On a combiné plusieurs approches pour avoir les meilleurs visuels possibles. Avec des accès à pied depuis le pied des parois ou depuis les terrasses en contrebas. Il y a aussi eu des accès en technique cordiste, c'est-à-dire en descendant sur cordes depuis depuis les terrasses du sanctuaire, en nous accrochant aux arbres” raconte avec enthousiasme l’ingénieure qui a bien aimé cette partie suspendue sous l’œil amusé des touristes de passage sur le site à ce moment-là.
Un drone a également été nécessaire pour réaliser des photographies générales et des vues de détail de certaines instabilités rocheuses sur lesquelles “les accès n'étaient pas possibles, ni à pied, ni à l'aide des cordes.”
Avec toutes ces données, il ne restait plus qu'à établir une liste de travaux, Ces “parades de protection efficaces, durables et qui s'intègrent dans la paroi rocheuse” pourraient constituer des boulons d'ancrage dont la tête est encastrée dans le rocher, cachetées par un mortier coloré, ou des ouvrages dont la finition serait maçonnée avec les pierres du site. En somme, “des choses assez discrètes", souffle Elena Metz. On ne va pas partir sur des filets métalliques ou des écrans sur le sanctuaire du Sainte-Odile !”
Son cabinet a donc établi une priorisation d'éventuels chantiers. Charge ensuite aux commanditaires, en l'occurrence l’archevêché de Strasbourg et les bureaux d'architectes du Patrimoine, Bertrand Fleck et Aedificio, de prioriser les frais liés aux travaux, à coupler avec les prérogatives des deux autres études réalisées en parallèle sur le site, l’une sur tout ce qui concerne les constructions en béton, l’autre sur les bâtiments classés. La décision finale reviendra à Mgr Pascal Delannoy récemment installé 107e archevêque de Strasbourg, lorsqu’il prendra connaissance du dossier.
Si les experts ont travaillé en toute discrétion, la pression n’en était pas moins forte pour l’ingénieure aux origines alsacienne qui a compté sur le “très fort intérêt patrimonial étant donné qu'une partie du sanctuaire est classée monument historique, avec des enjeux touristiques”. Une prise de conscience doublée d’un attachement personnel au Mont. En effet, la géologue travaillant pour le cabinet grenoblois a grandi à Goxwiller, au pied du Sainte-Odile. “C'est donc un lieu auquel je suis évidemment particulièrement attachée. Pour moi, c'est un grand plaisir et un honneur de pouvoir travailler sur ce site et d’en réaliser le diagnostic. En tant qu’Alsacienne, cela représente aussi une certaine responsabilité, de proposer des solutions qui seront efficaces, durables et intégrées dans le site.”
Une collecte de dons lancée par la Fondation du Patrimoine et le diocèse de Strasbourg est en place depuis décembre 2023 pour soutenir la restauration de la chapelle des Anges en travaux depuis 1 an.
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