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RCF Levothyrox: pour Claude Pigement, les autorités "ont attendu que l’affaire se tasse"
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Levothyrox: pour Claude Pigement, les autorités "ont attendu que l’affaire se tasse"

RCF,  -  Modifié le 11 décembre 2019
Le scandale du Levothyrox débute en 2017, quand le laboratoire Merck change la formule du médicament. Un médicament utilisé par trois millions de patients en France.
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Claude Pigement est un médecin engagé, attentif à l’actualité. Un homme de gauche, qui tente de comprendre dans son dernier livre, "Levothyrox : une scandaleuse négligence" (éd. de l’Archipel), le scandale du Levothyrox, dont il a été bien malgré lui témoin impuissant. Tout débute en 2017 quand le laboratoire Merck change la formule de ce médicament. À l’époque, on estime à trois millions le nombre de patients traités pour leur thyroïde avec un tel produit.
 

Un fossé entre les autorités et les patients

La suite ? Plusieurs milliers de victimes dans tout le pays, qui seront méprisés par l’élite politique et médicale, avant que les études ne leur donnent raison. Même si la justice ne les suivra pas lorsqu’ils demanderont au laboratoire Merck de les dédommager pour défaut d’information. "J’ai été vice-président de l’ANSEM, de 2013 à 2018. J’ai vécu beaucoup de crises sanitaires, comme les prothèses mammaires, la Dépakine ou les pilules de troisième et quatrième génération. J’ai été très sensibilisé à ces crises. Est arrivée la crise du Levothyrox. Au début, je ne me suis rendu compte de rien" explique-t-il au micro de RCF.

"Le nouveau médicament arrive en mars 2017. Progressivement, une pétition se met en place. Elle va recueillir plus de 100.000 signatures. Jusqu’à l’été 2017. Le 16 août 2017, Le Parisien sort l’affaire avec des témoignages multiples de personnes qui perdent des cheveux, qui font des malaises, des vertiges. Et je découvre cette affaire. La ministre ne prend pas la mesure de ce qu’il se passe. Il y a un décalage des autorités par rapport aux patients. Un fossé se crée" ajoute le médecin.
 

"Cela va leur pourrir la vie"

Ce qui a choqué dans cette affaire, c’est le mépris pour les patients. Pour Claude Pigement, il s’agit d’un phénomène classique en cas de crise sanitaire. "Il faut un lanceur d’alerte. Et à partir de là, il faut un média classique qui donne une dimension nationale. Arrive après une judiciarisation de l’affaire puisque les tribunaux sont saisis très vite" lance encore le praticien.

Jusqu’à présent, on ne dénombre aucun mort suite au Levothyrox. Mais les effets de ce médicament auront été bien néfastes pour les patients. "Cela va pourrir leur vie. Une partie des patients vont extrêmement bien. Et d’autres vont très mal. C’est un mystère" précise Claude Pigement, qui rappelle la raison officielle du changement de formule de ce médicament: "l’Agence du médicament demandait à Merck de stabiliser le Levothyrox".
 

"Un manque d'écoute"

Vice-président de l’Agence du médicament, Claude Pigement se met alors à douter. Il pose des questions au conseil d’administration. "Plus j’avançais, plus je me retrouvais face à un mur. Ma demande permanente, entre 2017 et 2018, aura été de demander une étude scientifique. Et on ne me l’a jamais accordée. Ils ont fait le dos rond, ils ont attendu que les choses se tassent. Il y a eu un déni par rapport à la parole des patients, et par rapport à un comportement scientifique. Les médecins ne supportent pas de ne pas savoir. Pourtant il n’y a pas de honte" dénonce-t-il.

Dans cette affaire, la responsabilité est double, puisque le laboratoire Merck est aussi en cause. "Sa responsabilité est compliquée. Officiellement, Merck dit que c’est l’Ansem qui a demandé de changer la formule. Par contre ce qui est prouvé maintenant c’est que l’étude d’efficacité menée par Merck n’a pas été fiable" lance le médecin.

Pour Claude Pigement, cette crise du Levothyrox est grave pour le nombre de personnes touchées. Et elle est grave pour le mépris de ces patients, qui ne souffraient pas de pathologie dangereuse, mais dont la vie quotidienne a été pourrie par de la fatigue, par des pertes de cheveux, par des vertiges etc. "Il y a eu un manque d’écoute" conclut le praticien.

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