Comme le note Jérôme Fourquet, directeur de l’IFOP, en commentant ces chiffres, le premier enseignement, c’est en effet que les musulmans pratiquent de plus en plus : on avait pu croire, notamment après 1989, lors de l’affaire des foulards de Creil, que comme pour la religion catholique, et sous l’effet du «â¯climat⯻ français, on allait vers une douce extinction de la pratique pour l’islam. Et que cette affaire n’était qu’un épiphénomène voué à disparaître. Pas de raison que l’islam, après tout, échappe plus à la sécularisation que les autres religions. Il n’en est rien : ceux qui déclarent aller à la prière étaient à l’époque de Creil, en 1989, 16â¯%. Ils sont aujourd’hui 38â¯%. De même pour le jeûne lors du Ramadan, ou bien le respect de l’interdiction de boire de l’alcool, tous les indicateurs de pratique sont à la hausse, même si l’enquête montre une certaine hétérogénéité de la pratique des musulmans.
Alors, ce constat doit-il nous faire peur ? Si l’on disait la même chose pour les catholiques, que l’on notait par exemple une participation à la messe plus importante chaque année, un respect du Carême, avec une augmentation des dons, et une assiduité aux fêtes de Pâques plus massive, nous serions sans doute un certain nombre à nous en réjouir… En soi, le fait que des gens croient, et croient plus, n’est pas un sujet.
En revanche, et oui cela doit nous préoccuper, l’enquête montre que, dans cet ensemble des musulmans de France, il existe un groupe non négligeable qui est dans une opposition frontale avec la République laïque. Et ce groupe a tendance à augmenter. Il n’est pas inquiétant que les musulmans pratiquent de plus en plus. En revanche, il est inquiétant de voir que pour 37â¯% (et même 49â¯% pour le plus jeunes) c’est la laïcité qui doit s’adapter à leur religion, et non l’inverse. Plus préoccupant encore, 27â¯% estiment que la charia doit s’imposer sur la loi française.
Quel enseignement tirer de cette enquête ? D’abord, et contrairement à ce que prévoyaient nombre de sociologues, la trajectoire de sécularisation, qui a été suivie par la majorité des Français, n’est pas celle de la majorité des musulmans. Cette pratique musulmane plus forte se déroule dans une sorte d’océan d’indifférence à l’encontre de la religion. De ce fait, elle interpelle d’autant plus notre société, qui ne la comprend absolument pas.
Ensuite, le problème n’est pas la pratique religieuse, mais bien le respect des principes républicains, sur lequel on doit être intransigeant. La solution se trouve des deux côtés : du côté de la religion et du côté de la République. Du côté de la religion, avec un travail à faire sur l’enseignement de l’islam, qui dépend en grande partie des responsables religieux musulmans. La tâche est considérable car trop de jeunes musulmans reçoivent un enseignement de l’islam antinomique avec nos valeurs démocratiques, que ce soit l’égalité homme-femme, ou la liberté de conscience.
Du côté de la République, il faut se poser la question de l’état de l’enseignement civique des Français. Là, c’est notre système éducatif qui est en jeu : que 20â¯% des musulmans ayant un diplôme bac plus 5 estiment qu’il vaudrait mieux appliquer la charia que les lois républicaines signe tout de même un grave constat d’échec pour l’école républicaine.
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