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Latifa Ibn Ziaten

RCF,  -  Modifié le 11 juin 2019
Latifa Ibn Ziaten, mère d’Imad, assassiné le 11 mars 2012, par Mohamed Merah, est la Grande Invitée de la matinale de RCF.
Latifa Ibn Ziaten EREZ LICHTFELD SIPA Latifa Ibn Ziaten EREZ LICHTFELD SIPA

"Une souffrance qui grandit dans mon coeur"

Six ans après la mort de son fils, "c’est toujours très difficile à expliquer" précise Latifa Ibn Ziaten. "Ma vie a changé. Il y a toujours cette souffrance qui grandit dans mon cœur, cette absence de mon enfant. Je vis avec. Il faut que la vie continue. Mais ma vie a complètement changé. Je n’ai plus la même vie qu’avant" explique-t-elle.

Ce week-end, un nouvel attentat a fait de nombreuses victimes, dont des enfants, en Afghanistan. "Chaque nouvel attentat, que ce soit ici en Europe, en France ou ailleurs, me touche énormément. Cela réveille cette douleur. C’est très dur à vivre. À chaque attentat, je plonge dans ma souffrance. C’est horrible" confie la mère de la première victime de Merah.
 

"Aucun jeune ne naît terroriste"

Elle ajoute cependant qu’aucun "jeune ne naît terroriste. Ce sont des jeunes qu’on a tellement laissé livrés à eux-mêmes, sur l’éducation, sur l’aide, sur l’accompagnement. Certains sont malheureusement récupérés. Cela devient des gens dangereux, qui peuvent passer à l’acte sans réfléchir. C’est pour cela qu’aujourd’hui il y a un travail énorme à faire sur cette jeunesse" rappelle celle qui multiplie les témoignages et les conférences dans toute la France, pour prévenir la radicalisation chez les jeunes.

Elle s’en explique. "Un enfant a besoin d’un cadre. Il a besoin d’être éduqué, aimé, accompagné. Mais quand on laisse un enfant grandir seul, sans amour, sans aide, sans éducation, sans cadre, il n’a aucune chance de s’en sortir. Il se sent seul, il se sent vide, et c’est là qu’il est poussé à devenir délinquant, ou à entrer dans cette idéologie. Car il faut qu’il trouve sa place" lance encore Latifa Ibn Ziaten.

Cette dernière croit donc fermement en la responsabilité de l’école. Moins en celle de l’islam. "C’est une religion comme une autre. Il n’y a aucun problème dans l’islam. L’islam est une religion de tolérance, d’amour, de partage et aujourd’hui on l’utilise comme un islam de terreur. Cela fait mal, pour tous les musulmans du monde" estime-t-elle.
 

"Un spectacle, plus qu'un jugement"

Le 2 novembre dernier, le frère de Merah a été condamné à 20 ans de prison pour association de malfaiteurs. "J’ai très mal vécu ce procès. C’est un procès qu’on a attendu cinq ans avec la pression, l’angoisse. L’enquête n’est pas allée jusqu’au bout. Cet homme est très dangereux. Je ne suis pas satisfait du jugement. Ce n’est pas la question du nombre d’années, c’est la question de ce qu’on fera de lui en prison. Le jeune qu’il va croiser, il va le contaminer. C’est comme un virus. Ce jugement était pour moi plus un spectacle qu’un jugement" déplore-t-elle.

Latifa Ibn Ziaten garde une certaine rancœur contre les autorités. Elle raconte l’humiliation, après la mort de son fils, quand elle s’est rendue dans un commissariat à Toulouse. "L’État était trop occupé par les élections. Je suis allé au commissariat, et je n’oublierai jamais ce commissaire qui après m’avoir soupçonné, m’a utilisé comme paillasson. Mais nous avons attendu. Je suis allé dans les cités pour trouver celui qui avait tué mon fils. Et j’ai vu des jeunes qui voyaient en Merah un martyr de l’islam. Je leur ai dit : "vous êtes l’origine de ma souffrance, mais je vous tendrai la main". Je me suis dit que mon travail était ici" témoigne-t-elle, au sujet de ce qui l’a poussé à créer l’association "Imad pour la jeunesse et la paix".
 

"Jusqu'au bout je défendrai cette jeunesse"

En parallèle de ses conférences dans les écoles, Latifa Ibn Ziaten appelle aujourd’hui l’Education nationale à se réveiller. "Il y a un travail énorme à faire. Si on peut suivre un jeune depuis la maternelle, on lui donnera sa chance de réussir. Il ne faut pas attendre le collège. On doit suivre le jeune dès le plus jeune âge. L’éducation est importante. C’est la base. Et ce sont aux parents d’être la première école pour leurs enfants. C’est un travail à deux" confie-t-elle.

Au cours de ces conférences, la mère d’Ihmad a pu vivre de très beaux moments, comme des moments très difficiles. "Quand vous sortez de certaines écoles, dans les cités, qu’il n’y a pas de mixité, on voit qu’il n’y a pas de chance de réussir. On peut le voir. On y voit des jeunes déchainés, ils n’écoutent pas. Ils sont indisciplinés, ils ne sont pas respectueux. Ils montrent leur souffrance. On dit qu’ils sont mal élevés, mais ils montrent qu’il n’est pas content, car on ne lui donne pas sa chance" explique Latifa Ibn Ziaten.

Elle conclut en affirmant avoir "toujours aimé la France. Si je n’aimais pas la France, je serai rentré dans mon pays d’origine. J’aime ce pays. Ce pays m’a construit. Je suis arrivé à 17 ans. La grande partie de ma vie est en France. Jusqu’au bout je défendrai ce pays, je défendrai cette jeunesse. La paix est importante, le vivre-ensemble c’est important. L’amour et la paix sont plus forts que la haine".
 

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