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"L'adieu à la nuit", par André Téchiné

RCF,  - Modifié le 24 avril 2019
Cette semaine, la chronique cinéma de Valérie de Marnhac est consacrée à "L'adieu à la nuit", le nouveau film d'André Téchiné consacré à la radicalisation islamiste chez les jeunes.
Image extraite du film "L'adieu à la nuit"Image extraite du film "L'adieu à la nuit"

A 75 ans, Téchiné tourne encore ! Il continue dans ses films à radiographier la jeunesse française. Dans « Les Roseaux sauvages » en 1995, il la filmait au temps de la guerre d’Algérie. Plus récemment, il est revenu aux émois amoureux de l’adolescence dans "Quand on a 17 ans". Ici, il s’intéresse aux jeunes d’aujourd’hui, tentés par l’islamisme et la radicalisation.

Dans le film, Alex, avant de partir pour le Canada, vient rendre visite à sa grand-mère qui tient un centre équestre au pied des Pyrénées. Elle est toute heureuse de le retrouver, jusqu’à ce qu’elle découvre qu’il projette en réalité de partir pour la Syrie avec sa copine Lila. Elle va alors tout faire pour l’en empêcher.

Le thème de la radicalisation a déjà été beaucoup abordé au cinéma ces dernières années. On se souvient du très beau film "Le Ciel attendra" de Marie-Castille Mention-Schaar en 2011. Et puis on attend surtout avec impatience celui des frères Dardenne, "Le Jeune Ahmed", qui est sélectionné au prochain Festival de Cannes et qui sortira en mai ! Donc oui, c’est un sujet risqué pour Téchiné, qui en plus est davantage un cinéaste romanesque que politique ou social.

Mais il s’est bien documenté en amont, l’histoire est sobre et factuelle, elle aborde toutes les étapes par lesquelles passent ces jeunes. Et il se l’approprie tout à fait par ses choix de réalisation originaux. D’abord l’intrigue se passe dans un cadre rural et terrien. On est donc loin du cliché des banlieues associé à ce thème.

Ensuite, même si les deux jeunes sont clairement en manque de repères parentaux, la relation d’Alex avec sa grand-mère est empreinte de beaucoup d’amour. Ce qui élargit la problématique et lui apporte une part d’humanité inattendue.

Ce rôle de la grand-mère est la huitième collaboration d'André Téchiné avec Catherine Deneuve, depuis « Hôtel des Amériques », leur premier film en 1981, avec Patrick Dewaere. Ils sont un peu comme un vieux couple d’amis, heureux de se retrouver à chaque fois. Elle, évoque leur chemin, parcouru ensemble, comme "une conversation qui reprendrait à chaque film". Et lui, aime lui écrire des rôles sur-mesure, de femmes émancipées.

Pour ce qui est du titre du film, cette "nuit" peut être à la fois la France ou la Syrie selon le point de vue d’Alex ou de Muriel. Le réalisateur lui, se défend de faire ce qu’il appelle des « films-tracts ». Il privilégie la fiction et la mise en scène, notamment, dans un prologue très métaphorique, avec une éclipse de soleil sur un champ d’arbres fruitiers en fleurs.

Le sujet est donc grave et sombre ; mais ce qui est sûr, c’est qu’à 75 ans, le cinéaste qui se dit athée, tourne encore des films porteurs d’espérance.
 
 

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