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Jean-Marc Landry: "le loup a toujours vécu à proximité de l'homme"
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Jean-Marc Landry: "le loup a toujours vécu à proximité de l'homme"

RCF,  -  Modifié le 26 février 2018
Le gouvernement vient de dévoiler son plan loup, en faveur de la réintroduction de cet animal en France. Un plan qui ne séduit ni les éleveurs, ni les défenseurs de la faune sauvage.
Clément Grandjean Clément Grandjean

Jean-Marc Landry, est un spécialiste du loup, biologiste, et éthologue. Il étudie le loup depuis plus de 20 ans, que ce soit aux États-Unis et en Europe. Il revient ce matin sur le plan loup présenté par le gouvernement, et l'évolution de l'espèce, en France.
 

Le loup, un animal qui évolue depuis 40 millions d'années

"Le loup est un carnivore qui a évolué depuis près de 40 millions d’années. C’est un animal qui mange de la viande, et qui vit en société animale, en groupe, comparable à une cellule familiale. Toute cette famille vit sur un territoire qu’ils vont défendre, et qui peut faire entre 200 et 400 km2 dans les Alpes" rappelle Jean-Marc Landry.

"Tous les chiens que nous connaissons aujourd’hui descendent du loup. La domestication a eu lieu au paléolithique supérieur, entre 15 et 20 000 ans. Le chien serait en fait une sous-espèce de loup. Il y a un effet de mode aujourd’hui qui veut que certaines personnes veulent posséder le sauvage chez eux, et ont tendance à avoir des gros chiens" ajoute ce spécialiste.
 

Un régulateur de l'écosystème

Aujourd’hui, beaucoup se posent la question de savoir si le loup est un nuisible. "C’est une question intéressante, puisque le mot nuisible est typiquement humain. C’est notre vision d’homo sapiens de voir ce qui est utile ou pas à l’homme. Pour le loup, ce n’est pas un nuisible car il a un rôle à jouer dans l’écosystème. Nous avons modifié cet écosystème depuis le néolithique et nous devons réapprendre à vivre avec toutes les espèces" plaide ce spécialiste du loup.

En tant que régulateur de l’écosystème, le loup chasse toute l’année "les populations d’ongulés sauvages. Le loup va prendre ce qui peut prendre. Mais les animaux les plus faibles ont moins de chance de survivre. Et on commence à voir que dans certaines régions d’Europe, le loup a une très bonne action sur les populations de cerfs, qui peuvent faire pas mal de dégâts au niveau des forêts" précise Jean-Marc Landry.
 

Le loup, des zones montagneuses aux plaines

On annonce aujourd’hui que le loup est de retour en France, avec près de 360 bêtes observées sur une trentaine de départements. C’est un retour naturel depuis l’Italie. "Les Italiens comme les Suédois ont été les premiers à protéger le loup. Il y a eu une prise de conscience, d’où la convention de Berne. Le loup a besoin d’un territoire pour se nourrir. Il doit être tranquille une partie de l’année. Mais ce qu’il faut bien comprendre, c’est que le loup a toujours vécu à proximité de l’homme. On peut voir des loups à proximité des villages, ce sont des comportements tout à fait normaux" explique-t-il.

Pour l’instant, le loup est observé dans les zones montagneuses. Reste à savoir si cet animal peut encore s’avancer dans les terres, voire descendre en plaine. "Le loup peut occuper toutes les zones européennes. Il se développe dans les grandes plaines d’Europe centrale, dans les plaines agricoles espagnoles. Tant qu’il y a de la nourriture et tant qu’il peut se déplacer discrètement, il peut se développer partout" rappelle Jean-Marc Landry.

Une réconciliation entre loups et éleveurs est possible

En France, les principales victimes du loup, ce sont les brebis. Les éleveurs tirent aujourd’hui la sonnette d’alarme face à cette menace pour leur cheptel, et pour leur gagne-pain. "Je pense que la réconciliation entre le loup et les éleveurs est possible, mais il faut mettre un garde-fou. Le plan loup met aujourd’hui un premier garde-fou. Il faut travailler avec les éleveurs, mieux comprendre comment le loup vit, et se donner les moyens d’intervenir très rapidement lorsqu’il y a des dommages pour un éleveur" tempère ce biologiste.

Ce dernier rappelle que le loup a hérité génétiquement d’un comportement, qui fait qu’il tue beaucoup plus qu’il ne consomme. Un précepte valable face à un troupeau de brebis, où les proies restent sur place et sont sans défense. Un comportement hérité des premiers loups, des premiers carnivores, apparus sur Terre il y a 40 millions d’années. Face à cela, il faut pourtant trouver des solutions pour protéger les troupeaux.
 

Le plan loup, une sorte de troisième voie

Pour rappel, en été, dans les Alpes, on compte plus de moutons que d’ongulés sauvages. "Il faut améliorer les chiens de protection, utiliser des chiens qui soient plus performants face aux loups et qui acceptent les humains. On peut aussi améliorer les clôtures, et les systèmes d’effarouchement avec les nouvelles technologies. Nous sommes en train de développer un collier répulsif, nous parlons de drones et de surveillance technologique" précise-t-il.

En attendant, haro sur le plan loup présenté par l’exécutif. Les éleveurs se sentent totalement abandonnés, et les défenseurs de la faune sauvage affirment que le plan manque complètement de courage politique. "C’est quelque chose de très complexe. Les éleveurs aimeraient voir moins de loup. Le gouvernement veut promouvoir le développement de l’animal. Le fait que les deux camps ne soient pas d’accord montre que le gouvernement a réussi à trouver une voie du milieu" conclut Jean-Marc Landry.

Émission réalisée en duplex depuis RCF à Chambéry

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