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Homélie de Mgr Le Boulc'h lors de sa messe d'installation
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Homélie de Mgr Le Boulc'h lors de sa messe d'installation

Un article rédigé par Arnaud Dernoncourt - RCF Hauts de France, le 24 mai 2023  -  Modifié le 17 juillet 2023

Samedi 20 mai 2023, Mgr Laurent Le Boulc'h a été installé comme nouvel archevêque de Lille, en la cathédrale Notre Dame de la Treille. Retrouvez ci-dessous son homélie.

Mgr Le Boulc'h lors de son installation. (c) Brigitte Naeye / Diocèse de Lille Mgr Le Boulc'h lors de son installation. (c) Brigitte Naeye / Diocèse de Lille

Homélie de Monseigneur Laurent Le Boulc'h lors de sa messe d'installation

 

Frères et sœurs, dans les récits du Nouveau Testament, entre l’évènement de l’Ascension et celui de la Pentecôte, le temps s’est comme suspendu pour les apôtres de Jésus. Le Maître n’est plus présent devant leurs yeux. Les disciples ont perdu leur guide et ils ne savent plus dans quelle direction orienter leur vie. Ils se tiennent simplement unis dans la prière, attendant ce que Jésus leur a promis, sans rien savoir de ce qui va arriver. « Tous, d’un même cœur, étaient assidus à la prière » raconte saint Luc.

 

 

Le petit groupe des disciples ignore que d’ici quelques jours à Jérusalem, il va se produire pour lui un big bang spirituel. La concentration de l’énergie de l’Esprit saint sur les apôtres sera telle qu’elle provoquera en eux une explosion. Le récit des Actes parle de feu, de grand bruit et d’un souffle. Les disciples sont projetés dans les rues et les places. Eux, si timides et apeurés, osent soudain sortir d’eux mêmes pour annoncer à tous la Bonne Nouvelle du Christ Ressuscité. Et les gens s’émerveillent. Dans cette mise au monde des disciples de Jésus, l’Église prend naissance. A Pentecôte, l’Église naît dans la puissance de sortie de Dieu qu’est l’Esprit saint.

 

 

Frères et sœurs, aujourd’hui, dans ce temps d’attente et de veille liturgique, entre la fête de l’Ascension et celle de Pentecôte, je deviens votre évêque, installé par mes frères apôtres sur le siège de la cathédrale Notre Dame de la Treille. Permettez-moi d’y voir une allusion de l’Esprit saint. Comme si le Seigneur envoyait ce jour un nouveau pasteur à l’Église de Lille pour qu’il la prépare à entrer dans une nouvelle naissance. A l’image du premier groupe des apôtres, notre Église serait conviée à entrer dans un temps de gestation pour renaître à la mission que le Christ lui confie.

 

 

Cela ne veut pas dire, frères et sœurs, que j’aurais la prétention de construire avec vous une Église nouvelle. Comme si, depuis ses origines, en 1913, l’Église de Lille n’avait pas réellement pris naissance. Je suis convaincu, au contraire, que j’ai beaucoup à recevoir de l’histoire qui me précède, d’autant que, personnellement, j’ai tendance à croire davantage aux richesses d’une tradition vivante qui se déploie dans la créativité plutôt qu’aux logiques illusoires des ruptures trop verticales.

 

 

Cependant, frères et sœurs, il est vrai que l’Église est toujours appelée à naître et à renaître. Née dans la Pentecôte de l’Esprit saint, il y a plus de 2000 ans, elle est invitée à plonger régulièrement dans l’acte de l’Esprit qui lui donne naissance. La mission de l’évêque, successeur des apôtres, qui m’est confiée pourrait alors être celle-ci : conduire l’Église dans cet acte de renaissance missionnaire.

 

 

L’Église est née pour continuer l’œuvre du Christ dans le monde. Cette mission a l’urgence de l’Évangile. Dès les commencements du récit des évangiles, le ministère public de Jésus est marqué par l’urgence d’ouvrir les esprits et les cœurs à la Bonne Nouvelle d’un Dieu qui vient éclairer et accompagner les hommes et les femmes de son espérance.

 

 

Aujourd’hui, alors qu’une crise écologique d’une ampleur sans précédent, que des changements sociaux et anthropologiques inédits et que de lourdes épreuves existentielles interrogent vertigineusement notre société, l’Église entend l’urgence à témoigner de la sagesse de l’Évangile. La sagesse de Dieu l’appelle à discerner et à encourager les aspirations les plus nobles de l’humanité, à dénoncer les ressorts du mépris envers ce qui est fragile et vulnérable et à ouvrir la création à l’expérience d’un salut dans la libération du Christ Jésus.

 

Frères et sœurs, cette mission est profonde et exigeante. Elle demande de raviver en nous la vie spirituelle. Si l’Église veut renaître dans la mission originelle du Christ et de l’Esprit saint, elle doit se tourner avec ferveur vers son Seigneur et se recevoir de Lui. La vie spirituelle est la condition première du témoignage de l’Église. Le ressourcement, nourri dans la contemplation priante de la Parole de Dieu, dans la prière fraternelle et la célébration des sacrements, est vital à l’Église. Sans lui, l’évangélisation risque de n’être qu’une vaine annonce de nous-mêmes et non pas celle du Christ Vivant. « Je leur ai donné les paroles que tu m’avais données : ils les ont reçues », dit Jésus dans l’évangile au sujet des apôtres.

 

Frères et sœurs, nous entendons ce soir l’invitation de Jésus à recevoir dans des cœurs toujours plus disponibles, personnellement et communautairement, le don infini de l’Amour créateur et sauveur qu’est Dieu. Unie au Christ Jésus, l’Église qui évangélise reçoit de Lui l’encouragement à entrer dans le dialogue et la conversation avec le monde. « Eux, ils sont dans le monde », dit Jésus à propos de ses disciples. L’Esprit saint ouvre sans cesse l’Église aux voies du dialogue. Aujourd’hui, pourtant, le dialogue tend à devenir un art difficile. Pour toutes sortes de raisons, la tentation est grande pour les individus et les groupes de s’enfermer dans leurs tours d’ivoire et refuser les interrogations de l’autre. Combien est urgente dans notre temps la voix des artisans de dialogue et de paix !

 

 

Le dialogue de l’Evangile se vit dans la grâce de l’écoute. Il appelle à discerner les provocations de l’Esprit saint qui jaillissent dans l’écoute de la Parole de Dieu, la prière et le partage fraternel en Église, et qui surgissent de l’écoute de l’actualité du monde. Frères et sœurs, à quels témoignages de conversion, le monde nous appelle-t-il ? Et vers quelles transformations sociales, politiques ou culturelles, l’Évangile presse-t-il d’agir avec tous les hommes et les femmes de bonne volonté ?

 

 

La Bonne Nouvelle de Jésus n’écarte jamais les petits. Les plus fragiles sont au cœur de la mission du Christ. L’Évangile en fait le critère de sa vérité. Une Église de l’Évangile est une Église qui se tourne vers les délaissés de l’avoir, du savoir et de la gloire. L’Église entend dans la voix des plus petits l’appel à vivre dans la sagesse de Dieu, considérée parfois comme folie aux yeux des hommes. Au nom de l’Évangile, les disciples de Jésus témoignent de l’inconditionnelle dignité de la personne et de sa vocation à la fraternité. La charité est le passeport de Dieu pour la vie éternelle. Ce soir, frères et sœurs, nous entendons l’exhortation du Christ à servir les plus petits, lumières de l’Évangile.

 

 

L’envoi en mission de l’Église de Pentecôte dans le monde s’appuie sur la communion fraternelle des disciples. « À ceci, tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples : si vous avez de l’amour les uns pour les autres. » (Jn 13,35) dit Jésus. L’Église est la fraternité rayonnante de Jésus. Cette fraternité qu’est l’Église ne se berce pas de simples élans de tolérance ou d’amitié. Elle est fondée sur la présence agissante du Ressuscité. Présent au milieu d’elle, le Christ Vivant relie dans l’Esprit saint des croyants de toutes générations, toutes conditions sociales et toutes sensibilités dans une surprenante fraternité.

 

 

Frères et sœurs, dans l’unité de l’Église, les diverses vocations de prêtres, diacres, religieux, religieuses et consacré(e)s, marié(e)s s’éclairent les unes les autres. Chacune d’entre elles valorise les autres pour le témoignage du Christ et le service synodal de l’Église. Cette communion de l’Église, quand elle naît de l’amour du Christ en elle, ne fait pas boucle sur elle-même. Au contraire, elle génère une énergie spirituelle qui rend l’Église capable d’un regain de vitalité pour oser sortir dans le monde annoncer l’Évangile. Frères et sœurs, nous entendons ce soir l’invitation de Jésus Ressuscité à renouveler notre communion fraternelle pour mieux servir sa mission.

 

 

Chers diocésains de Lille, vous me recevez ce soir comme votre évêque, et nous voici emportés ensemble dans l’aventure de l’Esprit saint, appelés à œuvrer pour que l’Évangile de Jésus s’incarne et rayonne dans la vie des hommes et des femmes en ce lieu. Humble pasteur du Seigneur, c’est dans votre prière et votre compagnonnage que je trouverai ma confiance afin que, grâce à Dieu, avec tous les collaborateurs associés à ma mission, je conduise notre Église diocésaine dans les voies du ressourcement spirituel, du dialogue avec nos contemporains, de la charité avec les plus petits et de la communion fraternelle dans le Christ Ressuscité.

 

 

Frères et sœurs, ce soir, notre célébration eucharistique est une belle action de grâce dans laquelle nous louons Dieu pour tout ce qui s’est déjà réalisé d’Évangile sur cette terre du Nord. Confions au Seigneur tout ce qu’Il nous demandera de vivre demain dans les peines et dans les joies.

 

 

Que la Vierge Marie, Notre Dame de la Treille, demeure pour nous aujourd’hui un guide sur les chemins de la foi, de l’espérance et de la charité du Christ Jésus.
Amen. 

 

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