Je vous parlais la semaine dernière des larmes de Dieu et aujourd’hui, dans les temps bien lourds où nous sommes, je retrouve le titre d’un texte du jeune écrivain suédois des années 40, qui se suicidera à 31 ans, Stig Dagerman : "notre besoin de consolation est impossible à rassasier".
S’il est des peines à hauteur de vie, celles que l’on console d’un geste, d’un mot, d’un regard : bercer un enfant, souffler sur un bobo, sécher doucement une larme… Il en est d’autres, trop d’autres, dans nos existences, dans la vie des victimes de tous les barbares de la terre qui paraissent inconsolables.
Dans ce qui arrive de désastre à notre Église, dans les tragédies vécues par les victimes, dans la douleur et le trouble qui nous étreignent tous, comment faire ? L’évidence nous a abandonnés. Celle que l’Église ne pouvait faire que du bien. Celle que ses pasteurs étaient des hommes justes. Celle que les méchants seraient punis. Nous avons été dépossédés de quelque chose d’inestimable, car l’Église telle qu’elle nous apparaît aujourd’hui semble vidée de son sens, et là est aussi notre désolation.
Cette douleur-là nous fait sœurs et frères de tant d’humains, ici et partout, dans le secret de leur vie intime comme dans les abominations dont des communautés humaines entières sont victimes. Pour eux aussi, eux d’abord, la vie est dépossédée de son sens, et c’est une telle injustice.
Qu’est-ce qui peut consoler de l’inconsolable dans cet exil au bout de la nuit : juste peut-être le partage opiniâtre et courageux de nos pauvretés capables de faire le compte de ce qui a été perdu, de le nommer et d’en partager toute la douleur. Consoler n’est pas réparer. Consoler n’est pas combler ce qui a été perdu. Mais consoler, c’est apporter un démenti à cette solitude qui paraît devenue définitive par le malheur. C’est empêcher le chagrin d’être absolu en coupant de tout et de tous. Alors peut-être la justice pourra –t-elle commencer.
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