Mgr Cador : « Julien et Wilfried ont été configurés au Christ serviteur »
Retour avec l’évêque de Coutances et Avranches sur l’ordination diaconale de Julien Houchard et Wilfried Thonet en vue du sacerdoce, le 21 juin 2025. L’occasion d’expliciter la signification de cette année de diaconat.
Wilfried Thonet et Julien Houchard ont été ordonnés diacres à Donville-les-Bains le 21 juin 2025 ©Diocèse de CoutancesSamedi 21 juin 2025, Wilfried Thonet et Julien Houchard ont été ordonnés diacres en vue du sacerdoce. Leur formation continue en attendant leur ordination sacerdotale. Durant cette année, Julien reste à Granville, tout en étant suivi par la même équipe d’accompagnement. Wilfried continue sa formation au séminaire d’Ars, et passera trois semaines par mois dans la paroisse d’Avranches. Retour avec Mgr Cador sur le sens de cette année de diaconat et sur le rôle du prêtre.
RCF : Samedi dernier, vous avez ordonné Julien Houchard et Wilfried Thonet diacres en vue du sacerdoce. Cette ordination est une étape décisive pour eux sur le chemin du sacerdoce, avec un engagement définitif au célibat. Mais pour autant, ils ne sont pas encore prêtres. Alors quel est le sens de cette année ?
Mgr Cador : Le droit canon demande un minimum de six mois entre les deux ordinations (NDLR : diaconales et sacerdotales), mais je pense qu'une année pastorale, c'est bien, après on verra en fonction de l'évolution des choses. L'idée est que leur service diaconal, en préparation du sacerdoce, se fasse pendant un an. Le diaconat, c’est le même mot que service. L'idée est qu'ils s'imprègnent vraiment de cette réalité, que tous leurs ministères à venir s'enracinent vraiment dans la notion de service. Ils ont été configurés au Christ serviteur. Je leur ai rappelé l'autre jour qu’une fois qu’ils seront ordonnés prêtres, il ne s'agira pas pour eux d'oublier bien vite qu'ils étaient diacres. Non, ils le seront toujours. On reste diacre toute sa vie, et c'est justement pour ça qu'on dit que le diaconat est le premier degré du sacrement de l'ordre. Le premier degré en tant que première marche, c'est la fondation, c'est le fondement. C'est ce sur quoi s'appuie tout l'engagement ministériel, qui se développe ensuite dans le sacerdoce et qui peut aller se développer jusque dans l'épiscopat.
RCF : À cette époque de l'année, pendant laquelle ont lieu généralement les ordinations, on parle souvent de «crise des vocations» et de la baisse du nombre d'ordinations en France. Ne nous concentrons-nous pas trop sur le nombre en oubliant qu’une seule ordination est déjà un don, en oubliant de rendre grâce ?
Mgr Cador : Bien sûr, la réponse est dans votre question. La première chose, c'est l’action de grâce. C'est pour cela que j'ai insisté en premier sur la joie d'avoir ordonné deux diacres en vue du sacerdoce. Effectivement, il faut savoir dire merci à Dieu pour le don qu'il nous fait à travers la réponse de ces deux jeunes à son appel. La question de la crise des vocations est vraie dans toute la société. Les gens qui acceptent de s'engager et d'engager toute leur vie, ça devient de plus en plus rare. Déjà que l'engagement au quotidien pose problème à un certain nombre, mais l'engagement définitif et sans retour pose encore plus question, c’est un signe qui interpelle. […] La diminution du nombre d’ordinations doit nous interpeller sur le fait que peut-être, on n'est pas suffisamment disponible à l'appel de Dieu, mais peut-être aussi sur le fait que Dieu nous dit des choses à travers cette réduction drastique du nombre de prêtres. Peut-être qu'il nous invite à réfléchir davantage au rôle spécifique du prêtre. Dans une communauté telle que la nôtre, on ne peut pas tout miser sur le prêtre. La responsabilité d'annoncer l'Évangile repose sur notre baptême au service duquel certains d'entre nous sommes ordonnés comme intendants des mystères de Dieu. Pourquoi y a-t-il moins de réponses actuellement ou moins d'appels ? Dieu appelle-t-il moins ? Les gens répondent-ils moins ? Je ne sais pas. Cela ne doit pas nous décourager, mais nous interpeller sur la signification d’annoncer l'Évangile. L'interpellation du Christ reste valable aujourd'hui, comme elle l'a toujours été, à une Église qui a moins de prêtres. Ça veut dire qu'il faut reconsidérer et permettre aux prêtres de trouver leur place, toute leur place, rien que leur place, au service de cette Église qui elle-même est missionnaire.
Les gens qui acceptent de s'engager et d'engager toute leur vie, cela devient de plus en plus rare
RCF : Vous dites qu’on ne peut pas tout miser sur le prêtre. Quand on déplore le manque de prêtres, on pense surtout au côté « utilitaire ». Mais quel est le sens profond du sacerdoce, indispensable pour l'Église ?
Mgr Cador : Le prêtre est configuré au Christ prêtre qui donne sa vie en nourriture, donc il est le nourricier, il est celui qui rappelle, à temps et contretemps en célébrant les sacrements, que le Christ nourrit son Église à travers le don qu'il fait de lui-même. Alors il y a un côté utilitaire oui, on voit le prêtre souvent comme un manager, un chef d'équipe, un directeur d'entreprise. Ce n’est pas ça, le prêtre est là pour apporter ce que le Christ lui-même donne. Il n'est pas le Christ, il est celui qui agit « in persona Christi », c’est-à-dire en la personne du Christ. Jésus choisit ceux qu'il veut pour être avec lui au service de cette Église dont il est la tête.
RCF : Cette année, nous fêtons les 100 ans de la canonisation de saint Jean Eudes, saint Normand qui a marqué le diocèse de Coutances et Avranches. Comment cette figure de sainteté peut inspirer les prêtres aujourd'hui, plusieurs siècles après ?
Mgr Cador : Spontanément, j'ai deux idées qui me viennent en tête. D’abord, l'amour du cœur de Jésus. Saint Jean Eudes a été un apôtre de cette dévotion au cœur de Jésus et au cœur de Marie. Et aussi la passion de la mission. Même si saint Jean Eudes n'était pas du diocèse de Coutances et Avranches, c'est chez nous qu'il a développé le plus les missions et le souci d'annoncer l'Évangile à tous […] Il y a deux expressions que je puise chez saint Jean Eudes. Saint Jean Eudes fait dire à Jésus : « Les prêtres sont les intendants du sang que j'ai versé. Ils sont les fontaines de la sainteté chrétienne ». On est là pour aider, nourrir, abreuver le peuple chrétien, pour lui donner la possibilité d'exprimer cette sainteté dans l'annonce de l'Évangile.
Écoutez la suite de l'entretien avec Mgr Cador consacrée aux nominations pour la rentrée 2025


Chaque semaine, l'un des évêques de Normandie se penche sur l'actualité de l'Eglise, de la France et du monde. Une interview réalisée par les journalistes de la rédaction normande et suivie d'une question posée par les auditeurs.
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