Issue de la petite noblesse, Jeanne-Marie Bouvier de La Motte (1748-1717) avait peu d'éducation et tombait souvent gravement malade. Enfant délaissée par sa mère, elle est mariée de force à un homme brutal - Jacques Guyon. A la mort de celui-ci elle se tourne enfin vers ce qui l'appelle au plus profond d'elle, la voix de l'oraison. Elle publie notamment son "Moyen court et très facile de faire oraison que tous peuvent pratiquer très aisément" qui remporte un franc succès auprès des protestants.
Sévèrement critiquée par un certain nombre de théologiens catholiques qui l'accusent de quiétisme, elle devient toutefois le maître spirituel de Fénelon et de nombreux autres disciples. "En condamnant Madame Guyon, explique Fabrice Midal, on n'a plus du tout compris ce qu'était l'oraison", assimiliée à de l'égocentrisme et au désintérêt de l'autre. Sa vision de l'oraison, "un rapport à Dieu sans médiation, met à mal le rôle de l'Eglise et des prêtres, on ne comprend plus cette dimension de présence, on l'accuse de quiétisme". Selon l'abbé Henri Bremond (1865-1933) qui a beaucoup travaillé sur la question, "c'est à ce moment-là que l'Occident ne comprend plus rien à ce qu'est la mystique et l'oraison", pour Fabrice Midal.
Le message de Madame Guyon a ceci d'intemporel qu'elle place le détachement au cœur de l'oraison. Il est à la portée de chacun, y compris ceux qui n'ont pas de compétences intellectuelles élevées, de s'autoriser simplement à être et à être aimé. Pour Fabrice Midal, sa spiritualité du "pur amour" va jusqu'à l'oubli de soi pour faire place à quelque chose d'autre que soi. Elle va même jusqu'à formuler cette "hypothèse absurde" mais qui dit toute la gratuité de l'amour: "Même si je savais que l'allais en enfer, il faudrait que j'aime Dieu.
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