Les applaudissements qui ont retenti place Saint-Pierre, samedi 26 avril, voulaient-ils dire "santo subito" ? Le pape François, dont beaucoup ont salué l’humilité et la compassion, pourrait-il être déclaré saint ?
Les critères pour canoniser un pape n’ont pas toujours été les mêmes au cours de l'histoire. Le XXe siècle en a produit plus que les huit siècles précédents. Comme la décision de canoniser un pape revient à l’un de ses successeurs, on est tenté d'y voir sinon un geste stratégique du moins un indice sur la personnalité du pape en exercice.
Le pape François est à ce jour le pape qui a déclaré le plus de saints, avec au total plus de 920 – et notamment "environ 800" martyrs d’Otrante. Parmi les plus connus : Mère Teresa, deux bergers de Fatima ou Óscar Romero. On compte aussi les Français Louis et Zélie Martin, Élisabeth de la Trinité ou encore Charles de Foucauld.
François a aussi canonisé trois de ses prédécesseurs : les papes Jean XXIII et Jean-Paul II en 2014, puis Paul VI en 2018. Il a également proclamé bienheureux Jean-Paul Ier, en 2022. Tous sont des papes du siècle précédent, ils se sont succédés à la tête de l’Église catholique entre 1958 et 2005.
Sur un total de 83 papes canonisés, l’immense majorité sont des hommes des premiers siècles du christianisme. Des fondateurs que l’Église a honorés en les déclarant saints, pour la plupart au cours du Moyen Âge. Après cela, en huit siècles il n’y a eu deux papes saints (un du XIIIe et un du XVIe siècle). En compter cinq du XXe siècle a de quoi susciter l'étonnement.
Des "santo subito" avaient retenti lors des funérailles de Jean-Paul II, en avril 2005. Trois mois plus tard à peine s’ouvrait son procès en béatification dans le diocèse de Rome. Il a été déclaré bienheureux en 2011 et saint trois ans plus tard.
Jean-Paul II a donc été canonisé en un temps record puisque Benoît XVI avait levé l’obligation du délai de cinq ans requis avant l’ouverture d’un procès en canonisation. Délai prévu par la bulle pontificale "Novæ leges pro causis sanctorum" (1983). Si, au Vatican, c’est la Congrégation pour les causes des saints qui s’occupe d’établir une enquête, la décision finale revient au chef de l’Église catholique.
Était-il urgent de canoniser Jean-Paul II ? Son successeur a-t-il voulu répondre à la grande ferveur qui entourait ce "géant de la foi" ? Benoît XVI a tenu à le béatifier : le pape François a voulu qu’il soit canonisé en même temps qu’un autre pape, Jean XXIII. Une manière de mettre en vis-à-vis deux figures différentes de papes. Avec Jean XXIII puis Paul VI, ce sont les deux artisans du concile Vatican II que François a distingués.
400.000 personnes ont assisté aux funérailles du pape François place Saint-Pierre le 26 avril selon les autorités italiennes. Plus de 150.000 étaient massées le long du cortège funèbre. La popularité du pape François notamment en dehors de l’Église a été soulignée tout au long de son pontificat. Pour beaucoup, il était un pape proche des gens, qui incarnait l’humilité et la compassion de l’Évangile.
La voix du peuple a longtemps pesé dans le processus de canonisation. Ce qui était au début du christianisme la célébration des chrétiens morts en martyrs est devenu une volonté de distinguer les hommes et les femmes dont la foi a marqué les contemporains. Ceux et celles dont on disait qu’ils étaient morts en odeur de sainteté. Une réputation établie selon la "vox populi".
Dans quelle mesure la voix du peuple compte-t-elle pour les papes ? Dira-t-on de François qu’il est mort en odeur de sainteté ? En dépit de sa grande popularité, il avait "la réputation d’être un homme difficile à vivre, abrupt, colérique", selon le journaliste Frédéric Mounier. Il était connu pour ses formules improvisées jugées parfois maladroites ou blessantes.
Décrit comme un réformateur et un stratège, le pape François n'a pas fait l'unanimité au sein de l'Église catholique. Son motu proprio visant à restreindre le rite extraordinaire de la messe ou encore son bras de fer avec la Curie romaine ont contribué à en faire une figure clivante au sein de l’Église catholique. Si toutefois un pape décidait d'ouvrir un procès en béatification pour François, sans doute préfèrerait-il attendre un certain temps.
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