Catherine de Sienne, fêtée le 29 avril, a de quoi inspirer au Vatican, où se prépare le prochain conclave. En cette période de Sede vacante les cardinaux évaluent les enjeux du catholicisme. Unité de l'Église, rôle et place des femmes, attention aux pauvres, engagement pour la paix... On retrouve dans la vie et l'engagement de cette figure mystique du Moyen Âge des échos avec la situation de l'Église aujourd'hui.
La période de Sede vacante dans laquelle se trouve le Vatican après la mort et l’inhumation du pape François, est un moment décisif de son histoire. Réunis en congrégations générales, les cardinaux débattent sur les enjeux à venir du catholicisme. Et si la vie et la spiritualité de Catherine de Sienne, fêtée le 29 avril, était la figure inspirante pour une Église qui se prépare à entrer en conclave ?
Avec plus d’1,4 milliard de catholiques dans le monde, l’institution ecclésiale fait face à plusieurs défis de taille. D’abord préserver son unité alors qu’elle est traversée par des tensions profondes. Il lui faudra poursuivre la dynamique synodale initiée par le pape François et considérer à sa suite le rôle des femmes dans sa gouvernance. Le pape argentin a en effet nommé plusieurs femmes à la tête de dicastères.
Alors que les guerres et les tensions se poursuivent au Proche-Orient, en Ukraine, mais aussi au Soudan ou en République démocratique du Congo (RDC), la diplomatie vaticane va devoir maintenir un engagement en faveur de la paix. On voit mal enfin le futur pape ne pas suivre la ligne du pape François en ce qui concerne la place et la parole des pauvres au sein de l'Église.
Autant d’enjeux qui font écho à la vie et la spiritualité de sainte Catherine de Sienne, fêtée ce mardi 29 avril, au lendemain de l’annonce de la date d’ouverture du prochain conclave. Cette humble jeune femme analphabète, morte à 33 ans, a osé parler aux puissants, à une époque marquée par les conflits et la peste noire. Grande figure mystique du Moyen Âge, Catherine de Sienne a eu le souci de l’unité de l’Église. Son influence aurait fait revenir la papauté d'Avignon à Rome. Proclamée sainte patronne de l'Europe en 1999 par Jean-Paul II, elle est la deuxième femme déclarée docteur de l’Église, en octobre 1970 par Paul VI.
Catherine Benincasa est née en 1347, au moment où l’épidémie de peste noire déferlait sur l'Europe depuis le port de Gênes. Elle est l'avant-dernière d’une famille de vingt-cinq enfants. Une famille très liée à l’ordre des dominicains, fondé au siècle précédent par Dominique de Guzman.
Elle aurait eu une première apparition du Christ à l’âge de cinq ou six ans. Catherine a fait très jeune le choix de ne pas se marier et de se consacrer à Dieu, contre l’avis de ses parents. Chassée de sa chambre, où elle passait beaucoup de temps en prière, elle a ainsi développé l’idée puissante de cellule intérieure. Un espace de vie intime, imprenable, qui a dû inspirer au siècle suivant Thérèse d’Avila et son "Château intérieur" (1588).
Catherine de Sienne n’était pas une religieuse. Les sœurs de la Pénitence de saint Dominique chez qui elle est entrée à l’âge de seize ans appartenaient à ce que l’on appelle aujourd’hui un tiers-ordre. Ces femmes, surnommées les Mantellate, étaient des laïques vivant dans le monde. La vie de sainte Catherine de Sienne était faite de prière, d’extases mystiques, de visites aux prisonniers et aux pestiférés. Une vie de prédication, aussi : elle a rassemblé autour d’elle un groupe de fidèles, les caterini.
Pour son mysticisme et son engagement politique, on compare Catherine de Sienne tantôt à Jeanne d’Arc (XVe siècle) ou à Thérèse d’Avila (XVIe siècle). La jeune femme a poursuivi un véritable engagement politique. "Je te présenterai aux Pontifes, à ceux qui gouvernent l'Église et le peuple chrétien, car je veux, selon mon habitude, avec ce qui est faible, confondre l'orgueil des forts"*, lui aurait dit Jésus au cours de l’une de ses extases, d'après son directeur spirituel et biographe le bienheureux Raymond de Capoue.
À une époque marquée par des divisions entre les cités-États italiennes, et les guerres fratricides au sein même de ces cités, le tout sur fond de guerre de Cent ans, Catherine de Sienne a osé s’adresser aux princes et aux seigneurs et plaider pour la paix. Elle les enjoignait de se tourner vers le Christ et l’Évangile et de se détacher de toute mondanité - comme l’a souvent fait d’ailleurs le pape François.
Catherine, soucieuse de l’unité de l’Église catholique, aurait convaincu, en 1376, le pape Grégoire XI de revenir à Rome et de mettre ainsi fin à la papauté d’Avignon. Cela a sans doute été exagéré selon les historiens, puisque le dernier pape d’Avignon avait annoncé sa décision quelques années auparavant. Auréolée de sa réputation de mystique, Catherine a tout de même pu conforter le Grégoire XI dans sa décision. Le pontificat suivant, celui d’Urbain VI (1378-1389), est marqué par les excommunications réciproques avec les antipapes d’Avignon et le grand schisme d’Occident. Morte en 1380, Catherine de Sienne n'en a connu que les débuts.
* Raymond de Capoue "Vie de Sainte Catherine de Sienne", trad. Étienne Hugueny, 1904
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