Comment Léon XIV s'adresse aux jeunes
Léon XIV a donc rencontré la jeunesse catholique cet été. Ils étaient environ 800.000 au jubilé des jeunes pour écouter leur nouveau pape. Par quels mots, quels messages, le souverain pontife les a-t-il aidés à espérer ? Quel est le style de Léon XIV pour s'adresser à une génération dont on entend souvent dire qu'elle est en souffrance ?
Le pape Léon XIV lors du jubilé des jeunes, Vatican, 29/07/2025 ©Alessia Giuliani / Hans LucasLa première rencontre publique de Léon XIV avec les jeunes a eu lieu lors du jubilé des jeunes. Elle était fortement attendue par les quelque 800.000 pèlerins de 18 à 35 ans, rassemblés à Rome du 28 juillet au 3 août 2025. Des "mini JMJ" au cours desquelles il a adressé des messages forts. Comment Léon XIV s’adresse-t-il aux jeunes ? A-t-il trouvé le ton juste pour parler de l’espérance - le thème du jubilé 2025 - à une génération que l’on dit en mal-être ? A-t-il une parole que l’on n’entend pas ailleurs ? Le nouveau pape n’a pas hésité à poser des mots parfois un peu abrupts mais avec un ton qui semblait sincère.
Un langage un peu direct mais sincère
Les questions comme les réponses avaient été soigneusement préparées, ce samedi 2 août, lors du jubilé des jeunes. Une grande veillée de prière avec plus de 800.000 jeunes était organisée sur la plaine de Tor Vergata, non loin de Rome - le lieu emblématique des Journées mondiales de la jeunesse de l’an 2000 avec Jean-Paul II.
Sur la scène de Tor Vergata donc, trois jeunes ont adressé chacun une question au souverain pontife : une sur l’amitié à l’ère des réseaux sociaux, une autre sur le courage de faire des choix et enfin sur la rencontre personnelle avec le Christ malgré les épreuves. Ce type de dialogue "est très codé, explique le Père Théophane Hun, responsable de la pastorale des Jeunes du diocèse de Cambrai. On cite le magistère précédent, de manière très formelle, très belle aussi."
Léon XIV a cité le pape François, Benoît XVI et Jean-Paul II. Mais il a montré tout de même "une forme de sincérité dans sa manière de parler aux jeunes, considère le Père Hun. Je ne sais pas si c’est si fréquent que ça, un discours sans trop de faux semblants. Le pape dit les choses comme les chrétiens les comprennent, sans trop d’habillage. C’est un petit peu brut et c’est assez agréable !"
Parler de l’amitié véritable à l’ère des algorithmes
Auprès des jeunes, Léon XIV a beaucoup développé le thème de l’amitié. Soulignant que la façon qu’ont les jeunes d’être amis et de vivre la fraternité pouvait être un exemple pour le monde, dans un contexte de guerre. Pour le souverain pontife, c’est par le lien avec le Christ que "les amitiés deviennent sincères généreuses et authentiques".
"L’amitié avec le Christ, qui est à la base de la foi, a-t-il dit, elle n’est pas une aide parmi d’autres pour construire l’avenir, elle est notre étoile polaire." Une déclaration "assez impressionnante", estime le Père Hun. "Il dit qu’il n’y a pas d’amitiés qui ne se valle réellement si elles ne sont pas appuyées sur le Christ. Il y a une claire hiérarchie dans son discours entre les choses de nos vies, et plus on s’appuie sur le Christ, plus ça a de valeur pour ainsi dire."
Quelques jours auparavant, en marge de ce jubilé des jeunes, 1.400 "missionnaires numériques" ont été accueillis spécialement par le pape, et encouragés à "annoncer la paix" sur les réseaux sociaux. Le numérique est revenu lors de cette séance de questions réponses. Cette fois pour une mise en garde "très intéressante" selon le Père Hun, contre les algorithmes. Léon XIV a opposé "les belles amitiés qui se font lorsque l’on s’appuie sur le Christ", résume le Théophane Hun, et "ces sortes d’amitiés qui sont pensées par le marché pour nous vendre des trucs".
Faire des choix : un message "pas hyper glamour" et pourtant...
Ne pas se contenter de peu, avoir le courage de poser des choix, c’est en somme la réponse à la deuxième question qui lui était adressée. Il a rappelé que le mariage, l’ordination sacerdotale, la vie consacrée sont des choix radicaux mais riches de sens. Cet appel à donner sa vie semble très peu original dans le contexte catholique.
"Moi j’étais très intéressé, très amusé par la manière qu’il a de parler du choix de vie, raconte le Père Hun. Ce n’est pas hyper glamour ! Il commence en disant qu’en fait les choix on les pose dans les épreuves. Dire ça à des jeunes c’est une manière assez cash, assez brutale de présenter les choses et en même temps c’est très intéressant, c’est profondément vrai."
Il est intéressant de relier cet encouragement à l’invitation qu’a fait Léon XIV de renoncer une culture de la mort. Culture qui semble très présente dans nos sociétés occidentales et qui se manifeste par l’indifférence aux autres, la recherche d’une vie facile, une vision divertissante de la sexualité… Dans la Bible il est fréquent d’opposer ce qui est du côté de la vie et ce qui est du côté du mortifère, de l’impasse. Comme le dit le Père Hun, "suivre le Christ, c’est embrasser la vie".
"Quel est le véritable goût de la vie ?" a demandé le pape à cette génération qui a souffert du confinement et de la pandémie de Covid, où beaucoup ont perdu le sens du goût. Dans son homélie lors de la messe d’envoi, le 3 août, il les a laissés avec ce questionnement : "Qu’est-ce qui nous libère des marécages de l’absurdité, de l’ennui, de la médiocrité ?" Pour le Père Hub, "c’est très fort comme question. Suivre le Christ donne du goût à la vie."
Nous ne naissons pas chrétiens, nous le devenons quand nous sommes touchés par la grâce de Dieu
Ne pas être des "chrétiens de confort" : quand Léon XIV secoue la jeunesse
« Nous ne naissons pas chrétiens, nous le devenons quand nous sommes touchés par la grâce de Dieu. Cependant ce "toucher" s’exprime à travers nos choix dûment réfléchis et notre démarche personnelle. Sans ces exigences véritables nous porterons l’étiquette chrétienne mais des chrétiens de convenance, d’habitude, et de confort. »
Le pape Léon XIV a-t-il voulu secouer la jeunesse ? Ce sont "des mots assez rêches, reconnaît le Père Hun, qui font penser au pape François". Le pape argentin avait incité avec un style direct les jeunes à se lever de leur canapé, mettre leurs baskets et sortir des mondanités… Mais François comme Léon XIV puisent l’un et l’autre dans la Bible. C’est dans la Lettre de saint Jacques que l’on trouve l’idée qu’une foi qui n’est qu’adhésion intellectuelle est une foi morte. "Saint Jacques nous dit que la foi sans les œuvres, c’est une foi morte, précise le Père Hun. Elle doit nécessairement s’incarner, notre foi chrétienne."
C’est donc un élan que le pape a voulu donner aux jeunes. "Nous ressentons une soif si grande et si brûlante qu’aucune boisson de ce monde ne peut l’étancher, a-t-il déclaré. Face à cette soif, ne trompons pas notre cœur en essayant de l’apaiser avec des substituts inefficaces, écoutons-là plutôt. Faisons-en un tabouret sur lequel nous pourrons monter comme des enfants sur la pointe des pieds à la fenêtre de la rencontre avec Dieu, nous nous retrouverons face à lui qui nous attend, qui frappe même gentiment à la vitre de notre âme."
Se tourner vers les réalités d’en haut est une idée qui a été très présente dans les messages de Léon XIV à la jeunesse. Sans doute est-ce en héritier de la pensée de saint Augustin qu’il a montré combien "Dieu est présent, il frappe et on n’a qu’à le suivre tournés les yeux vers le haut !"


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