Dans le cadre de la semaine des métiers du soin et de l'accompagnement, lumière sur un métier singulier : celui d'aumônier d'Ehpad. Elisabeth Szymczak est aumônier à la Maison Saint-Cyr de Rennes. Une mission auprès des résidents en quête de sens et d’accompagnement spirituel. Témoignage.
C'est d'aller à la rencontre des résidents, prendre du temps pour les écouter; et pour ceux qui le souhaitent, proposer un chemin spirituel avec eux, leur proposer un temps de prière ou plus suivant leurs demandes. La mission d'aumônier n'est pas seulement d'aller dans les chambres, mais aussi, en fonction du temps liturgique, de faire des propositions spirituelles.
Dès le début de ma journée, je commence toujours par un temps à la chapelle. C'est très important pour moi avant de commencer mon après-midi. Je demande au Seigneur de m'aider à être sa voix dans les chambres.
J'arrive donc l’après-midi : il est 2h moins le quart. Je vais dans mon bureau pour m'informer sur l'intranet s'il y a des messages, s'il y a des informations concernant les résidents. Ça peut être leur anniversaire, ça peut être une hospitalisation, ça peut être un décès. Et ensuite, je pars dans les couloirs, je frappe à la porte des chambres, je pénètre dans la chambre pour prendre le temps de discuter. C'est la plus grosse partie de ma journée. Après, il peut y avoir un temps où je prépare les différentes célébrations, les différents temps liturgiques.
Oui, de plus en plus. Depuis que je suis arrivée, il y a deux ans et demi, je remarque une augmentation de la fréquentation de la messe. Avant, il n'y avait pas d'aumônier donc ma présence rend visible la présence de l’Eglise dans l’Ehpad.
On a la chance d'avoir une magnifique chapelle et des religieuses qui sont présentes. Grâce à toute cette atmosphère-là, il y a de plus en plus de monde qui s’adresse à nous. Pour le mercredi des cendres, par exemple, il y avait une cinquantaine de résidents qui sont venus à la messe, c'est-à-dire un tiers de l'Ehpad.
Mon premier souvenir, c’était lorsqu’on a fêté les 104 ans d'un résident. Bon pied bon œil encore, il se déplaçait en déambulateur, il avait encore toute sa tête et quand le directeur lui a demandé quel était son secret pour la longévité, il a répondu : c'est d'aimer. Voilà, l'amour… Il a tout compris. L'amour, ça maintient en vie.
Il y a aussi des moments très forts qu'on peut vivre dans l'accompagnement des personnes en fin de vie quand ils sont sur le chemin de la mort. Je tente de leur apporter un réconfort. Je propose également à la famille un temps une prière, de recommandation pour l’aider à se préparer au départ de leur proche et j’accompagne le départ du résident tant qu'il est encore vivant. Je travaille en concertation avec l'équipe soignante, je suis donc beaucoup plus facilement appelée en cas de besoin de l’ordre spirituel.
C'est un plus. Régulièrement, je rencontre l'équipe soignante qui m’indique les résidents qui ont besoin que je passe les voir parce qu'il y a une baisse de moral, parce qu' il y a un problème de santé, ou parce qu’ils vivent leurs derniers jours. Je dirai que ça complète leur travail. Je ne les remplace pas, mais je peux être un soutien à ceux qui courent après le temps parce que malheureusement, comme partout, il y a beaucoup de résidents à s'occuper et le personnel fait ce qu'il peut. Il fait énormément mais il n'a pas toujours le temps de parler avec tous les résidents comme il le souhaiterait.
J'apporte surtout la notion spirituelle que eux n'apportent pas. Je propose de prier avec les résidents. Parfois certains sont dans la prière mais ne souhaitent pas que l’on prie ensemble. Donc dans ce cas-là, je vais prier pour eux à la chapelle.
Pour moi, c'est avant tout de l'humain et du spirituel. Quand je rentre dans la chambre, je suis reconnue comme la personne qui vient au niveau spirituel. Parfois je suis dépositaire de secrets. J'ai une résidente qui ne s'est jamais dévoilée depuis sa plus tendre enfance et qui m'a déposé son secret. J'essaie d’apporter un sens pour aider les résidents à vivre plus sereinement leur fin de vie sur le plan spirituel.
Je viens apporter un accompagnement spirituel et une écoute aux résidents mais les résidents m'apportent aussi énormément. C'est vraiment un enrichissement. Quand je ressors de la journée, j'ai l'impression d'avoir reçu plein de cadeaux ! Par leurs petites attentions, ils m'ont m'ont fait grandir dans la foi et en humanité. Voilà, c'est vraiment un chemin de croissance ce métier je pense.
C'est rare. Sur le diocèse de Rennes, on doit être une dizaine d'Aumôniers d'Ehpad au niveau du privé. Pour le public, c'est l'aumônier de l'hôpital qui va dans les Ehpad publics. En revanche, je pense qu'en Bretagne, on est très bien servis.
Elle sert à désangoisser la personne dans la mesure de mes capacités. Il ne faut jamais oublier que je ne suis que l'instrument de Dieu. Je suis sa petite main. Donc quand les résidents me remercient, ils remercient Dieu avant tout. Je viens leur apporter du réconfort et si les résidents le souhaitent et qu'ils veulent les derniers sacrements, je peux appeler le prêtre, ce qui arrive de temps en temps.
Et puis quand la personne est décédée, je suis là aussi pour aider la famille à commencer son deuil en organisant des temps de prière autour du défunt et au moment de la fermeture du cercueil.
Je voulais travailler en tant qu'aumônier d'hôpital. Donc j'ai postulé il y a trois ans et on m'a dit : "Non, il n'y a pas de poste. Par contre, il y a un poste dans un Ehpad." Et là, j'ai fait "Ah !...L’Ehpad ça ne me parle pas vraiment. J'avais en tête les vieux souvenirs d’il y a 40 ou 50 ans où c'était le mouroir.
On m'a alors proposé un stage et je suis revenue chez moi au bout de deux demi-journées en me disant "Seigneur, qu'est-ce que tu attends de moi ?" Parce que je ne sais pas si c'est fait pour moi… Lors du troisième jour de stage, je me suis dit : il faut que j'ai une réponse. Dans cet Ehpad, il y a la messe plusieurs fois par semaine. J’ai donc eu ma réponse à la messe. La première parole du prêtre c'était : Dieu nous appelle. Et là, je me suis identifiée. J’ai donc répondu oui à l'appel d'aller en EHPAD. Je ne regrette pas une seconde.
Ma mission à l’Ehpad me permet de prendre un moment de rupture avec mon quotidien d’aidante. En effet, c'est lourd d'aider un mari qui est en souffrance. Le fait de vivre ma foi dans mon travail m'aide à avoir confiance encore plus dans ce que Dieu peut faire pour mon mari, pour nous et c'est ça qui m'aide à tenir debout.
En fait, je dirais que l’Ehpad c'est ma bouée de secours dans ma mission d’aidante au quotidien. Ça m'enrichit tellement que, quand je rentre, je suis reboostée et je suis prête encore à accompagner mon mari au mieux. Je trouve l’energie. On en a des ressources ! Je pense d’ailleurs que si j'arrêtais l’Ehpad, je m'écroulerai… C’est donc important pour moi d’avoir cette double activité.
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