Madeleine Vatel | Dietrich Bonhoeffer, témoin d'une humanité blessée
Il y a 80 ans, s’ouvrait le procès de Nuremberg, et ce procès jugeait certains des plus hauts responsables nazis, du 20 novembre 1945, au 1 er octobre 1946. Cette actualité nous invite à repenser le discernement que nous exerçons face aux événements. Et nous pouvons nous appuyer sur de grandes figures spirituelles pour le faire.
Madeleine Vatel © DRLa résistance a fait émerger des figures chrétiennes, des personnalités qui ont montré un sens du service, et un sens de la liberté. Et cette liberté que le christ donne, et c’est aussi la liberté par rapport aux idéologies, comme celle du nazisme. Aujourd’hui encore, des idéologies enferment l’homme, dans ce « qu’il devrait être », ce « qu’il devrait penser », dans ce qu’on attend de lui, ou dans un statut. Cette liberté intérieure n’est jamais acquise.
La nécessité de cultiver sa liberté intérieure
Je crois qu’on n’a jamais fini de chercher ce qu’il y a au fond de notre conscience, et la foi au christianisme nous dit que c’est Dieu qui y réside. Et au cœur des plus grandes violences de la Seconde Guerre Mondiale , des hommes et des femmes se sont opposés à ce qui leur était imposé. C’est le sujet de la Halte spirituelle avec le pasteur allemand Dietrich Bonhoeffer, condamné à mort, et pendu le 9 avril 1945 au camps de concentration de Flossenburg. Faire connaitre la figure de ce théologien, qui a très tôt perçu que c’est l’homme, son caractère sacré qui était en danger, c’est une façon de relire l’histoire et les grandes figures de la résistance.
Dietrich Bonhoeffer
Dietrich Bonhoeffer était protestant, il a refusé le nazisme, assez rapidement, et parce qu’il appelait à
résister pacifiquement, il a été interdit de parler. Son séminaire clandestin dans lequel il enseignait a été fermé. Puis il a été arrêté et tué. Ses écrits témoignent d’une réflexion extrêmement profonde sur ce qui peut présider à nos choix, à l’éthique d’un chrétien en quelque sorte. Il s’est interrogé sur la question de la vérité et du mensonge, mais aussi sur les moyens de l’exprimer. Il a pensé et expérimenter la vie en communauté, comment construire une vie ensemble qui ait du sens, qui soit vraiment aussi une vie pour le Christ. Et puis il a aussi très vite exprimé le fait qu’un chrétien ne peut pas suivre Hitler.
Une figure spirituelle
Je crois qu’il faut lire et relire la pensée des résistants. Leurs tiraillements, leurs doutes, les conflits intérieurs que cela a représentés pour eux. Pour ceux qui avaient la foi, comme Dietrich Bonhoeffer, leur intuition les a conduit à percevoir parfois plus vite ce qui se passait, les dangers qui arrivaient. Je suis aussi intéressée par la façon dont leur foi a été un moteur extraordinaire d’action. C’est parce qu’il croyait - que Dietrich Bonhoeffer a osé établir un séminaire clandestin, c’est parce qu’il avait une foi en Dieu nourrie chaque jour, qu’il a rejeté Hitler et affirmé que l’Eglise ne pouvait pas suivre le nazisme. Bonhoeffer a posé des actes forts, des actes risqués, des actes qui à l’évidence le mettait en danger. Pour lui , suivre le Christ, c’était adopter une vie qui par amour pour l’Humanité, peut aller jusqu’au sacrifice de sa propre vie. Justement, ce sens que l’Humanité a une dignité immense, c’est aussi ce qui a fait le cœur du procès de Nuremberg.
Il y a 80 ans, pour la première fois dans l’histoire, c’est l’apparition du « crime contre l’humanité » qui vise l’assassinat, l’extermination la réduction en esclavage et la déportation de population civiles. Et se souvenir de Nuremberg, c’est se souvenir de tous ceux qui ont combattu et qui ont cherché à sauver ce qui fait la beauté de l’humanité.


Des chroniqueurs d'horizons variés nous livrent leur regard sur l'actualité chaque matin à 7h20, dans la matinale.
- Le lundi : Madeleine Vatel, journaliste au service foi & spiritualité de RCF ;
- Le mardi : Claire des Mesnards, pasteure de l'EPUdF et secrétaire exécutive du réseau européen chrétien pour l’environnement, et Elisabeth Walbaum, déléguée à la vie spirituelle à la Fédération de l'Entraide Protestante ;
- Le mercredi : Blanche Streb, essayiste, chroniqueuse, docteur en pharmacie, auteure de "Grâce à l’émerveillement" (éd. Salvator, 2023), "Éclats de vie" (éd. Emmanuel, 2019) et "Bébés sur mesure - Le monde des meilleurs" (éd. Artège, 2018), et Marie Wallaert de Lutte & Contemplation ;
- Le jeudi : Antoine-Marie Izoard, directeur de la rédaction de Famille chrétienne, et Aymeric Christensen, directeur de la rédaction de La Vie ;
- Le vendredi : Etienne Pépin, directeur des programmes de RCF et Radio Notre-Dame.




