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Aymeric Christensen | Les bijoux du Louvre, un miroir de la crise française ?

Aymeric Christensen | Les bijoux du Louvre, un miroir de la crise française ?

RCF, le 23 octobre 2025 - Modifié le 23 octobre 2025
Point de vueAymeric Christensen | Les bijoux du Louvre, un miroir de la crise française ?

Le vol de bijoux impériaux au musée du Louvre, dimanche 19 octobre, a eu un écho mondial. Mais au-delà de la stupeur et des polémiques, c’est la résonance du fait divers avec la crise actuelle de la France qui semble marquer les esprits.

Aymeric Christensen © DRAymeric Christensen © DR

Le fait divers le plus spectaculaire de la semaine : un vol de bijoux au Louvre dimanche dernier. Un cambriolage qui continue d’alimenter les polémiques… mais qui dit aussi quelque chose de nous-mêmes. Ce n’est pas vraiment de colliers, diadèmes et pierres précieuses que j’aimerais vous parler. Plutôt du miroir que l’événement nous tend, comme société, et qui explique sans
doute en partie l’émotion et la fascination qu’il suscite.

Entre imagination et réalité

D’abord, il y a l’écart saisissant entre l’imaginaire de fictions policières et la réalité. J’imagine que, vous aussi, vous vous délectez de ces romans, films et séries qui mettent en scène des cambriolages très sophistiqués, des monte-en-l’air d’une intelligence supérieure, à grand renfort acrobaties nocturnes, suspense et gadgets technologiques. Et puis, arrivent les casseurs du Louvre, avec leurs moyens d’une humiliante grossièreté : de jour, un monte charge en pleine rue, une fenêtre cassée,
des vitrines attaquées à la disqueuse. Le même vol réalisé par Arsène Lupin, on aurait compris, mais un commando tout droit sorti de chez Kiloutou, non. On pleure de se voir si bêtes en ce miroir !

Les musées sont-ils vraiment sécurisés ?

On découvre qu’il y avait eu des alertes sur la sécurité du musée, et
même pire : que d’autres musées ont aussi été cambriolés ces derniers mois. Justement, tout cela résonne un peu avec le sentiment de déclin de pays, non ? C’est sans doute le plus frappant : très vite, les commentaires y ont vu un symbole – ou un
symptôme – d’une crise bien plus profonde. Une crise de foi en nous-mêmes. Il faut dire que ce fait divers arrive au moment où la vie politique s’embourbe, où les agences dégradent notre note
souveraine, ce qui alourdit encore l’ombre de la dette, au moment où un ancien président est incarcéré. Au moment où une étude souligne que neuf Français sur dix considèrent désormais que la France est en déclin (soit tout de même 15 % de plus qu’il y a trois ans). Un peu comme l’incendie de Notre-Dame en 2019 avait été perçu comme un signe spirituel par les catholiques, c’est comme si cette affaire de bijoux reflétait aujourd’hui un vertige collectif :
à défaut de roi, c’est le royaume entier qui est nu.

L'estime du peuple

Le préjudice des joyaux dérobés est estimé à 88 millions d’euros. L’attention se tourne vers les négligences et les responsabilités.
Il n’est pas interdit non plus de réfléchir au-delà du constat d’assurances. Pourquoi la disparition d’objets, si précieux soient-ils, suscite-t-elle tant d’intérêt et d’émotion ? Sans doute parce que l’inestimable du butin touche à l’estime que nous avons, comme peuple, de nous-mêmes. La valeur du patrimoine n’est pas privée, mais partagée. Un musée, ce n’est pas qu’un lieu de promenade culturelle, c’est un sanctuaire où sont mis à la disposition de tous les trésors de l’art et du temps. Et dans une société qui peine à s’inventer un avenir désirable, la grandeur du passé est un refuge. On peut le déplorer, on peut penser qu’il vaudrait mieux investir ailleurs – par exemple dans l’innovation ou dans la solidarité –, mais on aurait tort de négliger ou de mépriser ces sentiments. Car ce n’est sans doute pas un hasard si l’expression « joyaux de la couronne » est passée dans le langage courant.

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Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
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