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Monotraite : pourquoi des éleveurs passent à une traite par jour ?

Monotraite : pourquoi des éleveurs passent à une traite par jour ?

Un article rédigé par Bénédicte Buisson - RCF Calvados-Manche, le 3 juillet 2025 - Modifié le 4 juillet 2025
L'invité normandMonotraite : pourquoi passer à une traite par jour ?

De plus en plus d’éleveurs laitiers passent à la monotraite pour réduire leur temps de travail. Une pratique intéressante pour améliorer la vivabilité du métier et assurer la pérennité des fermes laitières.

La monotraite réduit significativement l’astreinte de la traite ©Mark Stebnicki-PexelsLa monotraite réduit significativement l’astreinte de la traite ©Mark Stebnicki-Pexels

« La monotraite ou le robot ? » Cette question, de nombreux éleveurs laitiers se la posent dans l’optique de diminuer leur temps de travail. La pratique de la monotraite est arrivée depuis une dizaine d’années, comme nous l’explique Thierry Métivier, conseiller en agriculture biologique à la chambre d’agriculture de Normandie : «Ça s'inscrit dans une recherche de vivabilité du métier d'éleveur laitier, en se libérant de l'astreinte de la traite deux fois par jour, tous les jours. Il n’y a pas que le robot pour cela ». 


Comme son nom l’indique, la monotraite consiste à ne traire les vaches qu’une fois par jour, matin ou soir, en fonction des besoins de l’éleveur. « Pour certains, le but est d’être avec ses enfants le matin, pour d'autres, c’est d’être avec eux le soir », détaille Valérie Brocard, chef de projet pour l’Institut de l’élevage. Les éleveurs qui choisissent ce système cherchent à se libérer du temps pour des besoins familiaux, pour un autre atelier de la ferme ou des engagements professionnels. « Certains pratiquent la monotraite toute la semaine alors que d’autres supprimeront seulement la traite du dimanche soir par exemple. C’est très souple. La plus grosse difficulté, c'est de se convaincre que l'on peut le faire et que cela ne va pas avoir de conséquences négatives sur les animaux. »

La plus grosse difficulté, c'est de se convaincre que l'on peut le faire et que cela ne va pas avoir de conséquences négatives sur les animaux.

Valérie Brocard

Des vaches qui s’adaptent facilement

La première réticence envers ce système concerne la santé des vaches. Mais selon les expérimentations menées depuis une vingtaine d'années, le passage à la monotraite n’a pas d’incidence sur le bien-être de l’animal. «Lorsqu'on réduit la fréquence à une traite par jour, la production laitière des vaches va baisser assez rapidement. Au bout de deux ou trois jours, comme on trait moins, on stimule moins la mamelle, la production baisse. Donc, il n’y a aucun risque d'un point de vue du bien-être animal. Les vaches ont une capacité d'adaptation qui est très rapide », estime Valérie Brocard. Malgré tout, il est conseillé aux éleveurs qui commencent de mettre toutes les chances de leur côté : « Il faut plutôt commencer quand les vaches dorment à l'extérieur sur quelque chose d'assez souple, avec un régime alimentaire à base d'herbe qui va être peu coûteux. Pas de concentré évidemment. On ne va pas stimuler la production d'un côté alors qu'on la réduit de l'autre », poursuit Valérie Brocard.

Selon les chiffres de la chambre d’agriculture de Normandie, une baisse de 25 % des volumes produits est observée en moyenne. La production de lait diminuant, les recettes aussi. Mais là encore tout dépend de l’objectif de l’éleveur. « L’agriculteur doit faire ses comptes et réfléchir à ce qui est le plus important pour lui. Par exemple, il peut en être à une période de sa carrière où il a moins d'annuités à payer et donc finalement ce n’est pas gênant pour lui d’avoir un peu moins de recettes », développe Thierry Métivier. 


Cette formule donne aussi plus de souplesse par rapport à la main d'œuvre, qui est quelquefois difficile à trouver avec une astreinte matin et soir. Enfin, cette pratique a l’avantage de ne pas demander d’investissement. « Cette pratique est facilement réversible. On peut revenir à deux traites le soir même ou dans la semaine. À l'inverse avec le robot, il faut prévoir au minimum 150 000 € pour un robot, ça engage pour plusieurs années. »

Cette pratique est facilement réversible. On peut revenir à deux traites le soir même ou dans la semaine.

Thierry Métivier

80 % des élevages en monotraite sont en agriculture biologique

Le choix de la monotraite sur toute l’année est surtout plébiscité par des systèmes en pâturage. « Si on veut garder la rentabilité, il faut avoir un système qui coûte peu cher au niveau des fourrages et donc sans, ou peu, de concentrés. Ceci étant, les systèmes plus conventionnels avec du maïs peuvent tout à fait pratiquer la monotraite sur une partie de l'année ou sur un jour par semaine par exemple », explique Valérie Brocard de l’Institut de l’élevage.

Aujourd’hui, 80 % des agriculteurs qui traient leurs vaches une fois par jour sont installés en bio, un pourcentage logique selon Thierry Métivier, conseiller en agriculture bio pour la chambre d’agriculture : « Quand ils sont passés en bio, ils ont déjà connu la baisse de production laitière. Donc perdre 25 % de leur production laitière en faisant de la monotraite, ce n’est pas un obstacle pour eux. Et puis en passant en bio, ils ont déjà fait un pas de différenciation donc ils vivent différemment le regard des autres. Enfin troisième raison, la monotraite est plus choisie par des personnes non issues du milieu agricole qui prennent plus de liberté avec la question du temps de travail ».

Les personnes non issues du milieu agricole prennent plus de liberté avec la question du temps de travail 

Thierry Métivier


Pour les deux conseillers, la monotraite peut être une solution pour la problématique de renouvellement des générations, car « c’est bien la traite en tant que telle qui est le frein pour l’installation des jeunes ou le maintien des éleveurs en production laitière », conclut Valérie Brocard.

 

L'Invité normand
Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
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