L'usure de vos pneus bientôt contrôlée et réglementée
Adoptée au printemps 2024, la norme Euro 7 marque un tournant majeur pour l’automobile européenne. Pour la première fois, elle ne se limite plus aux gaz d’échappement mais fixe aussi des seuils d’émissions concernant l’usure des pneumatiques. Reste que la méthode pour mesurer ces émissions fait toujours débat. Le manufacturier Michelin défend les tests en conditions réelles.
Le test des pneus en question pour la nouvelle norme Euro 7Chaque année, le transport routier génère près de 500 000 tonnes de particules issues du frottement entre les pneus et la chaussée : des résidus invisibles qui se dispersent dans l'air, l'eau et les sols, avec un impact sur l'environnement et la santé publique.
Jusqu'ici, aucun cadre légal n'encadrait ce phénomène pourtant très important. Désormais, les constructeurs de pneus devront s'adapter, car les modèles trop émissifs ne pourront plus être commercialisés dans l'Union Européenne.
Des pneus pas tous égaux
Toues les gommes ne s'usent pas de la même façon : "selon les choix de conception les écarts d'émissions peuvent varier de 1 à 4" explique Cyrille Roget, directeur de la communication scientifique et innovation du Groupe français Michelin. Le manufacturier Clermontois revendique 20 ans de recherche sur le sujet, avec à la clé une réduction de 26% des particules émises par rapport à la moyenne de la concurrence. Des chiffres validés par une étude menée sur 160 modèles par l'ADAC, une association allemande de consommateurs.
On y découvre également que les qualités "environnementales" des pneus ne sont pas corrélées à la gamme de prix "des pneus premiums sont en bas de classement" précise Cyrille Roget qui explique que certains constructeurs n'ont pas investi dans la Recherche et le Développement sur ces sujets, faute de réglementation contraignante. Conséquence de cette absence de règle, pour avoir une durabilité qui se rapproche de celles des pneus qui émettent le moins de particules (ceux qui se dégradent le moins vite), "les constructeurs rajoutent de la gomme" souffle le porte parole de Michelin pour ce qui peut être vu comme du gaspillage de matière première.
La méthode utilisée pour les tests en débat
Si la réglementation permettra de faire le tri entre les pneus, reste aujourd'hui à trouver la bonne méthode qui garantira des taux d'émission le plus raisonnable possible. Et pour cela le protocole de mesure sera déterminant. Deux visions s'opposent avec d'un côté les tests en conditions réelles sur route "un convoi de voitures roulent sur 8000km dans les mêmes conditions et permet de tester plusieurs pneus à la fois" précise Cyrille Roget, et de l'autre côté des tests en laboratoire dit "sur volant".
D'après Michelin, qui plaide pour une application immédiate de la méthode "sur route en conditions réelles" les tests en simulateur donnent des résultats "qui ne sont pas corrélés. C'est à dire qui ne correspondent pas du tout à ce qu'on observe sur route" explique le constructeur Auvergnat qui estime que des pneus qui ne respecteraient pas la normes lors des tests sur route pourraient être autorisés en Europe alors qu'à l'inverse des pneus au comportement excellent lors des tests en conditions réelles pourraient être écarté du marché après une salve de tests sur papier de verre.
Une situation difficile à comprendre d'autant qu'aujourd'hui les consommateurs ne peuvent pas faire le tri "les étiquettes ne donnent pas ces informations" avoue Cyrille Roget avant de confirmer que "ce ne sera pas le cas demain non plus. L'information sur les émissions de particules au Km n'est pas prévu dans les textes et n'apparaîtra pas sur les étiquettes".
Défendre une industrie responsable... ou céder à des standards qui affaiblissent la norme
Un choix stratégique pour l'industrie de demain
L'entée en vigueur de la norme EURO 7 est programmée pour l'année 2028 pour les nouveaux pneus et en 2030 pour l'ensemble des gammes automobiles. Cela laisse quelques mois aux fabricants pour se mettre d'accord et soit relever les niveaux de performance en soutenant l'innovation, soit défendre un compromis qui aura pour conséquence de mettre sur les routes des produits moins vertueux. Pour Florent Menegaux, président de Michelin, l'Europe doit donc faire un choix stratégique "défendre une industrie responsable tout en renforçant son ambition environnementale, ou céder à des standards affaiblissent la norme et pénalisent les acteurs responsables".
Pour l'instant le choix n'a pas été fait. Prévue pour septembre 2025, la décision à été reportée au début de l'année 2026.
