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Influenceurs : peut-on vraiment encadrer l'influence ?

Influenceurs : peut-on vraiment encadrer l'influence ?

Un article rédigé par Marius Segura--Gattuso, Melchior Gormand - RCF, le 24 avril 2025 - Modifié le 24 avril 2025
Je pense donc j'agisInfluenceurs : peut-on vraiment encadrer l'influence ?

Sur Instagram, TikTok, Twitch ou encore YouTube, ceux qu'on appelle influenceurs occupent aujourd'hui une place centrale dans le paysage culturel. Considérés par certains comme des idoles, ils ont plus de pouvoir que jamais, au point d'influencer les habitudes de consommation et les modes de vie. Publicité dissimulée, conseils douteux ou encore mise en scène de vie idéalisée, l'influence peut-elle être encadrée ? Une émission Je pense donc j'agis présentée par Melchior Gormand.

© freepik© freepik

Ces dernières années dans l'actualité, les influenceurs sont sous les projecteurs. Acclamées pour la création d'événements extraordinaires ou au cœur de polémiques, les stars d’Internet font beaucoup de bruit. Depuis 20 ans, avec le développement des réseaux sociaux, une nouvelle génération de stars est née, amenant avec elle, ses succès et son lot de problèmes. Les ”influenceurs” sont décriés dans beaucoup de médias. Ces nouvelles stars ne sont pas uniquement des icônes, mais qui sont-elles ?

Qu'est-ce qu'un influenceur ?

"Influenceur", a rejoint le dictionnaire du Petit Larousse en 2020. En écho avec le mot "follower" (suiveur, fan), l'influenceur est un terme anglo-saxon qui rassemble qui, par sa position sociale, sa notoriété et/ou son exposition médiatique, a un grand pouvoir d'influence sur l'opinion publique. Pour Audrey Chippaux, lanceuse d’alerte derrière le compte Instagram "Vos Stars en réalité" qui dévoile les pratiques malveillantes mises en place par certains influenceurs et auteure du livre Derrière le filtre - Enquête sur le système de l'influence, un influenceur, c'est toute personne qui crée du contenu et qui le poste sur les réseaux sociaux. Donc, c'est vous, c'est moi, c'est tout le monde”. Elle ajoute qu'il n'est pas nécessaire qu'il y ait la notion de vente ou d'échange monétaire pour être influenceur. "Certaines partagent des choses sans intention de nuire ou de vendre des produits négatifs pour le consommateur”, complète-t-elle.

 

On définit l'influenceur depuis la loi du 9 juin 2023. 

 

Sur le plan juridique, Arthur Delaporte apporte son expertise. Membre du Parti socialiste et député depuis 2022, il est à l'origine de la commission d'enquête, avec le député Renaissance Stéphane Vojetta, de la loi encadrant les pratiques des influenceurs, adoptée en 2023. Il préside actuellement une commission d’enquête parlementaire sur les effets psychologiques de TikTok sur les mineurs. “On définit l'influenceur depuis la loi du 9 juin 2023 comme toute personne physique ou morale, c'est-à-dire en échange d'une rémunération, qu'elle soit en nature ou numéraire, mobilise sa notoriété auprès d'une audience pour communiquer au public par voie électronique des contenus qui visent à faire la promotion, directement ou indirectement, de biens, de services ou d'une cause, explique le député. 

Dans cette définition rigoureuse, Maître Raphaël Molina, avocat au barreau de Paris et cofondateur du cabinet INFLUXIO, spécialisé en droit de l’influence marketing, souligne une différence. “Il y a une distinction entre les personnes qui font de l'influence hors commerce, c'est-à-dire qui créent du contenu pour leur communauté, et celles qui mobilisent leur notoriété pour vendre des produits ou des services. C'est là que la loi du 9 juin 2023 intervient et encadre la promotion de ces produits et services, notamment par la transparence envers le consommateur”, précise l'avocat. L’argent va de pair avec cette nouvelle activité. Certains influenceurs gagnent des milliers, voire des millions grâce à la création de leurs contenus, teintant ce métier passion, des vices de la rentabilité.

Les dérives et les risques de l’influence commerciale

Les premiers influenceurs sur Internet n’ont plus rien à voir avec ceux d'aujourd'hui. D’abord des jeunes dans leurs chambres, jouant à des jeux ou donnant des conseils de mode, les influenceurs sont désormais dans les bottes de véritables entrepreneurs. Sur les tapis rouges des plus grands galas, ces personnalités sont devenues des marques à part entière avec de véritables ambitions commerciales. 

 

La loi du 9 juin 2023 encadre la promotion de ces produits et services, notamment par la transparence vis-à-vis du consommateur et en réglementant certains produits ou services risqués.

 

Derrière le compte Instagram "Vos Stars en réalité", la lanceuse d’alerte Audrey Chippaux a exposé bon nombre d’abus de ces nouvelles icônes. J'ai de nombreux exemples de dérives : tout ce qui touche à la médecine esthétique, la chirurgie, parfois promus par des personnes non-médecins. Certains produits non-conformes à la réglementation européenne ont été mis en avant, mettant en danger la santé, comme ces ceintures abdominales qui ont causé des brûlures à des utilisateurs. Il y a aussi des personnes qui ont perdu de l'argent en tradant, en faisant des pronostics sportifs ou en achetant des NFT”. 

Les influenceurs gagnent des sommes importantes par ces “sponsors” (promotions d’article), qu’ils investissent directement dans de nouveaux concepts pour accroître leur visibilité et multiplier leurs gains. Pour réguler ces revenus, “la loi du 9 juin 2023 encadre la promotion de ces produits et services, notamment par la transparence vis-à-vis du consommateur et en réglementant certains produits ou services risqués", explique Raphaël Molina.

L’évolution du métier et son encadrement récent

Désormais loin de la chambre d’un jeune adolescent, ces nouveaux businessmen et businesswomen ont démultiplié leurs ressources. Des studios et des équipes de tournages toutes entières sont dédiés à leurs grandes entreprises pouvant faire pâlir certaines productions cinématographiques. Cette ascension de popularité apporte des choses encore méconnues dans la sphère culturelle. “Ce qui est nouveau, c'est la capacité décuplée de chacun à devenir un relais pouvant toucher des milliers, voire des millions de personnes, avec un coût d'entrée très faible. Il suffit d'un smartphone et d'une connexion Internet pour diffuser une publicité dans le monde entier, sans barrière de frontière ou de langue", explique le député Arthur Delaporte. L’homme politique fait écho à une époque où “avant, faire de la publicité coûtait cher. Aujourd'hui, ce n'est plus le cas : des personnes utilisent une notoriété acquise ailleurs, par exemple dans la téléréalité, pour la mettre au service d'intentions commerciales”.

 

Le droit de l'influence commerciale fait appel à plusieurs branches du droit.

 

Les nouvelles réformes ont mis un coup dans cette fourmilière d’influenceurs. "Les influenceurs se sont retrouvés privés d'une partie de leurs revenus à cause des bloqueurs de publicité. Ils sont donc devenus eux-mêmes des réclames, des hommes ou des femmes sandwichs sur les réseaux sociaux. C'est ce modèle que nous avons cherché à réguler", explique le député du Parti Socialiste. En réaction, Audrey Chippaux ajoute que “la loi fait beaucoup de bien. Elle définit enfin un métier qui, jusqu'alors, n'était pas vraiment reconnu. Aujourd'hui, il y a un métier défini et c'est clair”

La création d’un métier, reconnu par la loi, a beaucoup facilité les outils de lutte contre les abus. Les influenceurs font appel à de nombreux domaines d’expertise, rendant leur pouvoir d’influence difficile à comprendre et à contenir depuis la loi de 2023. "Le droit de l'influence commerciale fait appel à plusieurs branches du droit : la consommation, le commerce, la propriété intellectuelle. La loi du 9 juin 2023 a permis de cadrer et de clarifier ces textes. Aujourd'hui, il est obligatoire de contractualiser entre annonceurs, influenceurs et agents", se félicite l'avocat Raphaël Molina.

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Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
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